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le rapporte Hérodote, & Apriès qu' Amafis détrôna, ont été dévoilés par des favans qui, avant M. l'abbé du Rocher, ont af furé que NECOs eft le Pharaon NECHAO de l'Ecriture, & Apriès le Pharaon EPHRÉE dont elle parle. Ainfi de deux chofes l'une : ou ofez donner le démenti aux auteurs qui ont précédé M. l'abbé du Rocher dans cette carriere érudite, ou faites un accueil favorable au moins à ces deux dévoilemens, puifqu'en vous les préfentant, il ne fait que répéter deux vérités historiques conftamment avouées, avant qu'il eût même pensé à prendre la plume fur cette matiere.

Mais je m'attends bien que vous ne jugerez pas devoir rendre hommage à ces deux dévoilemens reconnus & canonifés depuis long-tems avant M. l'abbé du Rocher. Vous avez trop de fagacité pour ne pas concevoir que cet aveu entraîneroit celui de tous les dévoilemens, fruits du travail de notre auteur. En voici la preuve dans le feul procédé qui a conduit fon génie au terme heureux où il eft parvenu. Frappé de voir que certains traits épars de l'hiftoire d'Egypte, comme le penfoient déjà quelques favans, avoient une reffemblance auffi marquée avec les perfonnages des Livres faints, il jugea qu'elle devoit fubfifter également dans les autres traits dont on n'avoit pas encore apperçu les rapports, & qu'on faifiroit immanquablement cette reffemblance, fi on s'appliquoit à la chercher, & fi on s'y prenoit comme il faut

pour la découvrir. Il n'étoit pas en effet croyable que l'hiftoire d'Egypte, dans des traits épars, eût cette identité avec ceux de l'Ecriture, fans que tout le reste participât à cette conformité, puifque les faits qui compofent un corps d'hiftoire, doivent avoir néceffairement entre eux une fuite & une liaison mutuelle. Sur ce principe dicté par le bon fens, M. l'abbé du Rocher chercha & trouva tout ce qui avoit échappé jufqu'ici à l'érudition de fes prédéceffeurs. Pour réfultat de fon travail, il préfenta l'ensemble du tableau dont ceux-ci n'avoient reconnu que quelques traits ifolés. Ce n'eft pas là certainement la marche d'un faifeur de fyftêmes.

Si, avant que le favant Abbé en ait eu feulement la premiere idée, on a trouvé, par exemple, que le NECOS d'Hérodote a été fabriqué fur le Pharaon Nechao de l'Ecriture, découverte en effet conftatée antérieurement à l'ouvrage de Monfieur du Rocher, il faut bien que dans la même hiftoire d'Egypte, le prédéceffeur de Necos foit un perfonnage également travesti de l'Ecriture, puifque dans une fuite de regnes qui fur la fcene du monde paroiffent & difparoiffent les uns après les autres, le prédéceffeur & le fucceffeur ont effenciellement entr'eux, quant aux faits, une dépendance réciproque. Ce principe doit s'appliquer à l'hiftoire d'Egypte, comme à toutes les autres, à moins qu'on ne se réduise à foutenir que dans le genre historique,

elle forme l'exception à la regle générale. Dans ce cas là, ceux qui rejettent la découverte de M. l'abbé du Rocher, feroient fort mal adroits. Car ils travailleroient euxmêmes à décrier leur propre caufe. En effet, s'il n'exifte aucune harmonie dans les différentes parties de l'hiftoire d'Egypte, å la prendre telle qu'elle eft littéralement dans Hérodote, toute cette hiftoire fera évidemment un tiffu de contes ridicules. Car des Rois qui fe fuccedent fans qu'on apperçoive la liaifon d'un regne avec un autre, font des majeftés qu'il faut placer fur la même ligne que les rois de Treffle & de Carreau. Dès-lors l'hiftoire d'Egypte, que fes partifans regardent comme très-véritable, rentre dans la claffe des romans, ou ce qui revient au même, elle n'est tout au plus qu'une piece à tiroir.

SEPTIEME OBJECTION.

7. Une langue auffi pauvre que l'Hébraïaussi que, où le même mot a fept ou huit fignifications toutes différentes, a dû néceffairement fournir à votre Auteur quelques attributions heureufes für les · traits des deux Hiftoires qu'il comparoit. Je ne vois donc rien de fi merveilleux dans fa prétendue découverte.

D'abord je vous réponds, que l'idée que vous avez de la pauvreté de la langue

braïque est un préjugé, fi on confidere cette langue, non dans l'état de langue morte où elle eft aujourd'hui, mais à la prendre en elle-même. Vous faites peu de cas des richeffes que préfente cet idiôme, parce que ne connoiffant de livre écrit en cette langue, que la Bible, vous transportez à la nature de la langue fainte en ellemême l'opinion que vous donne de la pénurie de fes expreffions, l'hébreu borné au langage des Livres facrés qui ne font pas d'une étendue très-volumineufe. Si Cicéron, Virgile, Tite-Live, Tacite, & tous les livres compofés par les Romains, n'avoient pas échappé au naufrage du tems, & qu'il ne nous fût refté qu'un feul de ces ouvrages, la langue latine vous paroîtroit bien indigente. Obfervez quelle fut dans le douzieme & le treizieme fiecle la pauvreté du latin. Lorfqu'au renouvellement des fciences, les auteurs de la belle latinité fortirent de la pouffiere, & que l'admirable invention de l'Imprimerie les eut propagées, la langue des Romains parut très-riche.

Si de tous les livres écrits autrefois par les Juifs, la fageffe divine a voulu qu'il n'y en ait eu qu'un certain nombre qui ait furvécu au ravage des fiecles, c'eft que ce recueil miraculeufement confervé devoit être le dépôt de la révélation divine. Mais outre ces livres qui forment notre code religieux, il y en a eu plufieurs autres écrits par les Juifs, fur-tout du tems des Rois, & qui fe font perdus, comme on peut s'en con

vaincre par une quantité de textes de l'Ecriture. (a)

Quelle quantité de livres perdus, compofés par des écrivains Hébreux! Ces ouvrages, quoiqu'ils ne foient pas parvenus jufqu'à nous, & quoique regardés comme introuvables, n'en ont pas moins exifté réellement, puifque leur existence ancienne eft atteftée par l'Ecriture-Sainte elle-même. Or, fi on les eût retrouvés, le nombre des mots & des expreffions qu'ils auroient ajouté à la langue hébraïque, l'eût confidérablement enrichie.

La feule Hiftoire naturelle de Salomon

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IV Liber

-V Li- VI Sa

(a) Tels quel. Liber bellorum domini (numer. 21. 14.).II Liber juftorum (feu liber redi Jof. 10. 13. & 2. Reg. 1. 18.). — III Liber verborum (feu rerum geftarum Salomonis 3. Reg. 1. 41.). verborum regum Ifraël (3. Reg. 14. 19.). ber verborum regum Juda (Ibid. n. 29.). muelis liber (1. paral. cap. ult.), — VII Nathanis liber (1. paral. 29. 29. & 2. paral. 9. 29.). — VIII Gad propheta (ibid.). IX Ahia propheta (3. Reg. 14. 38.). X Addo prophetæ (2. paral. 9. 29.). — XI Jehu propheta (paral. 20. 34.). XII Hozai fermones · (2. paral. 33. 19.). -XIII Salomonis tria millia parabolarum (3. Reg. 4. 32.).— XIV Ejufdem carmina quinque & mille (ibid.). — XV Ejufdem phyfica de univerfis plantis, jumentis, volueribus, reptilibus & pifcibus (3. Reg. 4. 33.). XVI Liber Enoch (ex Judæ apoft. epift.). XVII Littera Elia propheta ad Joram regem Ifraël (2. paral. 21. 12.). — XVIII Jeremia defcriptiones (2. Mach 2. 1.). Dans le même chapitre de ce Livre . 13, il eft fait mention d'une bibliotheque où on avoit raffemblé les livres de regionibus & prophetarum & David & epiftolas regum & de donariis.). — XIX Joannis Hircani liber dierum facerdotii (1. Mach. cap. xvi.)

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