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chères espérances de la République. Quels succès n'a-t-elle pas lieu d'attendre d'un aussi heureux ensemble de lumières, de mœurs et de patriotisme! Pour donner à tous les Français l'exemple du sentiment qui doit le plus efficacement contribuer à leur bonheur, venez recevoir du conseil des anciens, dans les embrassemens de son président, un nouveau témoignage de sa confiancé, de son estime, et du désir qu'il a de concourir avec vous au salut de la patrie. Vive la République! »

Les consuls montent au bureau; le président, après les avoir embrassés, lève la séance, et l'ajourne au 1er ventose, à Paris. Le conseil se sépare en répétant vive la République !

Il est quatre heures du matin (20 brumaire). Les députés et les consuls se rendent sur-le-champ dans la capitale.

Proclamation du général en chef Bonaparte. - Du 19 brumaire, onze heures du soir.

A mon retour à Paris j'ai trouvé la division dans toutes les autorités, et l'accord établi sur cette seule vérité que la Constitution était à moitié détruite, et ne pouvait sauver la liberté.

> Tous les partis sont venus à moi, m'ont confié leurs desseins, dévoilé leurs secrets, et m'ont demandé mon appui : j'ai refusé d'être l'homme d'un parti.

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Le conseil des anciens m'a appelé ; j'ai répondu à son appel. Un plan de restauration générale avait été concerté par des hommes en qui la nation est accoutumée à voir des défenseurs de la liberté, de l'égalité, de la propriété : ce plan demandait un examen calme, libre, exempt de toute influence et de toute crainte; en conséquence le conseil des anciens a résolu la translation du corps législatif à Saint-Cloud. Il m'a chargé de la disposition de la force nécessaire à son indépendance. J'ai cru devoir à mes citoyens, aux soldats périssant dans nos armées, à la gloire nationale, acquise au prix de leur sang, d'accepter le commandement.

› Les conseils se rassemblent à Saint-Cloud; les troupes républicaines garantissent la sûreté au dehors. Mais les assassins éta

blissent la terreur au-dedans; plusieurs députés du conseil des cinq-cents, armés de stylets et d'armes à feu, font circuler tout autour d'eux des menaces de mort.

› Les plans qui devaient être développés sont resserrés, la majorité désorganisée, les orateurs les plus intrépides déconcertés, et l'inutilité de toute proposition sage évidente..

» Je porte mon indignation et ma douleur au conseil des anciens; je lui demande d'assurer l'exécution de ses généreux desseins; je lui représente les maux de la patrie, qui les lui ont fait concevoir : il s'unit à moi par de nouveaux témoignages de sa constante volonté.

› Je me présente au conseil des cinq-cents, seul, sans armes, la tête découverte, tel que les anciens m'avaient reçu et applaudi je venais rappeler à la majorité ses volontés, et l'assurer de son pouvoir.

» Les stylets qui menaçaient les députés sont aussitôt levés sur leur libérateur; vingt assassins se précipitent sur moi, et cherchent ma poitrine; les grenadiers du corps législatif, que j'avais laissés à la porte de la salle, accourent, et se mettent entre les assassins et moi. L'un de ces braves grenadiers, Thomé, est frappé d'un coup de stylet dont ses habits sont percés. Ils m'enlèvent.

› Au même moment les cris de hors la loi se font entendre contre le défenseur de la loi: c'était le cri farcache des assassins contre la force destinée à les réprimer.

» Ils se pressent autour du président; la menace à la bouche, les armes à la main, ils lui ordonnent de prononcer le hors la loi. On m'avertit; je donne ordre de l'arracher à leur fureur, et six grenadiers du corps législatif s'en emparent. Aussitôt après des grenadiers du corps législatif entrent au pas de charge dans la salle et la font évacuer.

› Les fa ctieux, intimidés, se dispersent et s'éloignent. La majorité, soustraite à leurs coups, rentre librement et paisiblement dans la salle de ses séances, entend les propositions qui devai ent être faites pour le salut public; délibère, et prépare la réso

jui

lution salutaire qui doit devenir la loi nouvelle et provisoire de la République.

› Français, vous reconnaîtrez sans doute à cette conduite le zèle d'un soldat de la liberté, d'un citoyen dévoué à la République. Les idées conservatrices, tutélaires, libérales, sont rentrées dans leurs droits par la dispersion des factieux qui opprimaient les conseils, et qui, pour être devenus les plus odieux des hommes, n'ont pas cessé d'être les plus méprisables. ›

Le ministre de la police générale de la République à ses concitoyens. · Du 20 brumaire an vIII.

Citoyens, le gouvernement était trop faible pour soutenir la gloire de la République contre les ennemis extérieurs, et garantir les droits des citoyens contre les factions domestiques; il fallait songer à lui donner de la force et de la grandeur.

› La sagesse nationale, le conseil des anciens, en a conçu la pensée, en a manifesté la volonté.

› Il a ordonné la translation du corps législatif hors de l'enceinte où trop de passions grondaient autour de lui.

› Les deux conseils allaient proposer des mesures dignes des représentans du peuple français.

› Une poignée de factieux a voulu y mettre obstacle; ils se sont livrés à une fureur que l'immense majorité des conseils a rendue impuissante.

› Cette majorité libératrice s'est réunie après la dispersion des factieux; elle a chargé deux commissions, prises dans le sein des conseils, du dépôt de la puissance législative.

› Elle a remis l'autorité exécutive entre les mains de trois consuls, qu'elle a revêtus des mêmes pouvoirs que le directoire. › Elle a choisi les citoyens Siéyès, Bonaparte et Roger-Ducos, et aujourd'hui ils entrent en fonctions.

De ce moment un nouvel ordre de choses commence. Le gouvernement fut oppresseur parce qu'il fut faible; celui qui lui succède s'impose le devoir d'être fort pour remplir celui d'être juste.

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› Il appelle pour le seconder tous les amis de la République et de la liberté, tous les Français.

» Unissons-nous pour rendre le nom de citoyen français si grand, que chacun de nous, orgueilleux de le porter, oublie les désignations funestes à l'aide desquelles les factions ont préparé nos malheurs par nos divisions..

→ Les consuls atteindront ce but, parce qu'ils le veulent forte,

ment.

› Bientôt les bannières de tous les partis seront détruites; tous les Français seront ralliés sous l'étendard républicain.

› Bientôt les travaux du gouvernement assureront le triomphe de la République au-dehors par la victoire, sa prospérité au-dedans par la justice, et le bonheur du peuple par la paix. » Le ministre de la police, FouсHÉ. »

Le ministre de la justice aux administrations centrales, aux tribunaux, aux commissaires du pouvoir exécutif, etc.- Du 20 bru maire an VIII.

• Depuis long-temps, citoyens, la voix publique appelait des changemens dans les dispositions organiques de notre pacte social. › Ces changemens se feront.

› On va préparer dans le calme de la méditation et discuter avec sagesse des codes établis sur les bases immuables de la liberté, de l'égalité des droits, et du respect dû à la propriété.

Alors tous les coeurs se rattacheront au système représentatif, et la République recevra de la législation un éclat non moins brillant que celui qu'elle tient des triomphes de ses défenseurs.

C'est afin de parvenir à ce but si désirable que les représentans de la nation ont décrété les mesures consacrées dans la loi du 19 de ce mois, que je vous transmets avec cette lettre.

› Recevez cette loi comme un bienfait; et secondez de tous vos moyens les efforts généreux des consuls, qui travailleront sans relâche à donner à la patrie des jours de paix et de prospérité. Je recommande aux administrations centrales de procéder avec pompe à la publication ordonnée, et de veiller à ce que des

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exemplaires en placard de la loi soient affichés dans les lieux ac coutumés.

» Il me sera rendu compte de l'accomplissement de cette double formalité. Salut et fraternité. — Signé CAMBACÉRÈS.» (Suivait la loi portant établissement d'un gouvernement provisoire.)

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Proclamation des consuls. — Du 21 brumaire an vIII,

• La Constitution de l'an III périssait : elle n'avait su ́ ni garantir vos droits, ni se garantir elle-même. Des atteintes multipliées lui ravissaient sans retour le respect du peuple; des factions haineuses et cupides se partageaient la République; la France approchait enfin du dernier terme d'une désorganisation générale....

Les patriotes se sont entendus. Tout ce qui pouvait vous nuire a été écarté; tout ce qui pouvait vous servir, tout ce qui était resté pur dans la représentation-nationale s'est réuni sous les bannières de la liberté.

Français, la République, raffermie et replacée dans l'Europe au rang qu'elle n'aurait jamais dû perdre, verra se réaliser toutes les espérances des citoyens, et accomplira ses glorieuses destinées.

› Prêtez avec nous le serment que nous faisons d'être fidèles à la République une et indivisible, fondée sur l'égalité, la liberté et le système représentatif. "

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› Par les consuls de la République, ROGER-DUCOS, BONAPARTE, SIÉVÈS. »

Les consuls conservèrent Cambacérès au ministère de la justice et Fouché à la police générale. Ils remplacèrent, à la guerre, Dubois-Crancé par Alexandre Berthier; à l'intérieur, Quinette par Laplace; aux finances, Robert Lindet par Gaudin; aux relations extérieures, Reinhart par Talleyrand; à la marine, Bourdon-Vatry par Forfait.

Nous terminerons l'histoire du 18 brumaire, par un document inédit qui nous a été transmis par M. Delbrel,

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