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d'Eglife, & aux dévots, les hiftoires ra. contées dans la Bible! Préjugé ridicule, funefte & déraisonnable, Monfieur. L'EcritureSainte eft fans contredit le Code de la Religion mais, fi ce Livre facré a pour objet direct & principal de fanctifier le cœur de l'homme, il a pour but également d'éclairer fa raison fur la chaîne des événemens de ce monde. Eft-il donc fi indifférent à l'efprit humain, de favoir que le grand Dieu que nous adorons, a établi fur la furface de la terre, les anciens empires, comme les modernes, & que fa providence s'eft manifeftée conftamment fur eux, en exerçant en faveur de ces peuples, fa bonté miféricordieuse, ou en déployant fa justice vengereffe? Or, comment connoître avec certitude l'influence & l'action de la Divinité fur le gouvernement des royaumes & des nations entieres, fans avoir appris des écrivains facrés, l'hiftoire, ainfi que l'origine des anciens empires? Mais admirez la fageffe Divine à l'intérêt qu'infpirent ces récits par le caractere de vérité qu'ils por tent, puifque ce font des hiftoriens infpirés qui les ont écrits, Dieu a encore voulu joindre l'attrait des exemples. Avez-vous lu, dans quelque auteur profane que ce foit, l'hiftoire d'un miniftre, qui puiffe entrer en parallele avec celle de Jofeph? Il eft le parfait modele d'un adminiftrateur fuprême, & ce premier miniftre à qui toute une nation donne le furnom de Sauveur, même lorfqu'il achete fes terres & fa liberté, un

tel premier miniftre, c'est dans l'Ecriture qu'il faut l'aller chercher.

Vous avez vu qu'Hérodote proclamé le pere de l'Hiftoire, ne vous a cependant débité que des fables; ab uno difce omnes; & néanmoins cet Hérodote, en fait d'Hiftoire ancienne, eft votre oracle!

Avec les armes que m'a fourni jufqu'ici le parallele des traits de fon hiftoire d'Egypte, rapprochés de ceux de l'EcritureSainte, j'ai paré les coups que vous avez voulu porter à la découverte de M. l'abbé du Rocher. Voyons fi j'aurai le même fuccès dans la défense de cet ouvrage, contre les objections que vous empruntez des calculs chronologiques fondés fur les obfervations des aftronomes. C'eft fous cet autre rapport que j'ai promis d'envisager vos difficultés contre l'Hiftoire véritable des tems fabuleux.

VINGT-UNIEME OBJECTION.

21. C'est un fait incontestable, que les habiles chronologiftes ont conftamment regardé les phénomenes céleftes, comme un des moyens les plus fûrs de vérifier certaines époques importantes, qui fe trouvent dans les hiftoires de la plus haute antiquité. Les Egyptiens étoient grands aftronomes; iis difoient avoir obfervé, avant Alexandre, 373 éclipfes de foleil, &832 de lune. Le calcul donne affez ce nombre; donc, quand

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on lira dans leur hiftoire que la date de tel événement fe trouve en concurrence avec une éclipfe de foleil, on peut affigner avec plus de certitude l'époque de ce fait hiftorique par le calcul, que par tout autre procédé. Cette admirable méthode, dont le réfultat ne peut laiffer aucune incertitude, parce qu'il eft le fruit du calcul, eft celle qui a engagé un de mes amis, dont je vous ai fouvent parlé, à travailler à fon grand ouvrage fur l'hiftoire d'Egypte, d'après les obfervations aftronomiques. Par elles il démontre le Synchronifme des anciens rois d'Egypte, dont Hérodote & Diodore ont donné l'hiftoire, & Manéthon les noms & le catalogue. Ils ont donc exifté, ces rois d'Egypte, puifque la date de leur regne concourt avec les obfervations aftronomiques; cependant l'auteur de l'Hiftoire véritable des tems fabuleux, s'efforce d'anéantir tous ces anciens rois d'Egypte. Les raifons qu'il apporte, quelque érudites qu'elles paroiffent, ne peuvent tenir contre l'évidence des calculs des aftronomes, qui renverfent de fond en comble fa prétendue découverte. Comment lutter contre une preuve de cette efpece? Je fuis curieux de favoir de quelle maniere vous vous y prendrez pour vous débarraffer de cette objec

tion.

Elle n'eft pas difficile à réfoudre; elle n'eft que féduifante. Je foufcris d'abord à votre affertion générale fur les phénomenes céleftes, regardés conftamment par les chronologiftes comme un des moyens les plus fûrs de vérifier certaines époques importantes: mais permettez que je vous rappelle deux autres principes pour le moins auffi certains que les vôtres; c'eft qu'il faut 1°. Que ces phénomenes foient réellement arrivés, & qu'ils aient été obfervés exactement dans le tems même où les événemens ont eu lieu; 2°. Que des auteurs contemporains aient certifié le concours du phénomene céleste avec l'événement arrivé fur notre globe. C'eft ainfi que l'on eft affuré de l'année que commença la fameufe guerre du Péloponese, où il arriva une grande éclipfe de foleil, 431 avant l'Ere chrétienne. C'eft ainfi encore que les Romains, témoins de la mort de Jules-Céfar, ont attefté l'obscurciffement du foleil, qui fignala cette catastrophe arrivée 44 ans avant J. C.

Les Egyptiens, prétendez-vous, difoient avoir obfervé, avant Alexandre, 373 éclipfes de foleil, & 832 de lune. Il ne fuffit pas d'avancer que les Egyptiens aient dit avoir obfervé, il faut prouver qu'ils ont obfervé réellement toutes ces éclipfes; & pour établir ce fait, il faut que des perfonnages contemporains de ces obfervations aient laiffé des monumens, foit par écrit, foit autrement, qui atteftent la réalité de ces phénomenes céleftes; fans cela, dès le début de

la contestation, vous vous trouverez en défaut fur la premiere des deux regles requifes indifpenfablement pour affigner l'époque d'un événement, à l'aide des phé nomenes céleftes.

Donc, quand on lira dans l'hiftoire des Egyptiens, que tel événement concourut avec l'époque d'une éclipfe de foleil, on peut plus certainement affigner la date de ce fait hiftorique par le calcul, que par tout autre procédé.

Oui affurément, quand on trouvera des éclipfes rapportées dans l'hiftoire des Egyptiens. Or, elle eft totalement muette fur cet objet; en effet celle d'Hérodote, la plus ancienne fur l'Egypte, ne parle pas d'éclipfes, encore moins d'éclipfes obfervées en Egypte. Cet auteur fait feulement mention de changemens arrivés dans le foleil fous le roi Sethon, trait que j'ai déjà cité ; & qui appartenant à l'Ecriture, porte à faux relativement à l'Egypte. D'ailleurs des taches dans le foleil, ou quelques autres phénomenes, comme un obscurciffement, tel que celui qu'on apperçut à la mort du dictateur Céfar, ne font pas des éclipfes. Ainfi, je vous nie purement & fimplement, qu'on trouve, ou qu'on ait trouvé dans l'hiftoire d'Egypte par Hérodote, que certains événemens concoururent avec une éclipfe de foleil.

En vain, vous m'oppoferiez que Diogenes Laërce fait mention des 373 éclipfes de foleil, & des 832 de lune, que vous

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