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d'os calcinés. Ce fait déjà constaté par MM. Marcel et Morel-Fatio, ainsi que

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la présence d'ocre jaune ou rouge, indique des cérémonies funéraires com

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pliquées, mais nous ne croyons pas qu'il y ait eu incinération, au sens propre du mot.

Somme toute, les fouilles de 1901 ne nous ont rien révélé de par rapport au mobilier; par contre nous avons obtenu, et c'est capital, 15 squelettes humains adultes complets ou à peu près, plusieurs squelettes d'enfants, et ossements mélangés. Ces squelette

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à ceux qui proviennent des fouilles antérieures, constituent la série a pologique suisse la plus ancienne et la mieux conservée.

En effet, bien que le mobilier funéraire soit relativement pauvre, l'a complète de métal à l'intérieur des sépultures, et la présence d'un teur en pierre, de défenses de sanglier, de coquilles marines per d'ocre jaune et d'ocre rouge, etc., dénote un mobilier très primitif e autorise à rapporter avec toute certitude les sépultures de Chamblan commencement ou, tout au moins, au milieu de la période néoli (époque tardenoisienne ou campignyenne de G. de Mortillet).

Les tombes de Chamblandes, fouillées en 1901, renfermaient gén ment deux squelettes, couchés sur le côté gauche, tètes à l'est et tournées vers le sud, c'est-à-dire du côté du lac Léman. Les col vertébrales, recourbées, étaient situées à peu près parallèlement l' l'autre, la face postérieure, soit l'épine dorsale, tournée du côté no la tombe; les jambes entièrement repliées, les genoux ramenés ve poitrine; les bras généralement repliés, les mains souvent réunies s face et le cou. Les jambes, entre-croisées, font avec les fémurs un inférieur à 45 degrés; ceux-ci sont à peu près à angle droit avec la col vertébrale. Les os de la jambe (tibia et péroné) affectent une direction p lèle à celle du tronc, ce qui a dû nécessiter un effort violent pour ob cette position.

Des sépultures analogues à celles que nous venons de décrire ont trouvées en très grand nombre en 1825 à Pierra-Portay et en 1837 au

telard-sur-Lutry, localités voisines de Chamblandes. Elles renfermaient, à côté des squelettes, des défenses de sanglier, des grattoirs et des pointes de

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Pointe de lance ou coup de poing, Châtelard-sur-Lutry (Suisse)
[Musée de Lausanne].

lances ou coups de poing acheuléens en silex (fig. 89), ainsi qu'un fragment de hache polie en stéatite. Du reste, ces sépultures, dont le type s'est conservé jusqu'à l'âge du bronze, en Suisse, ne sont pas uniques de leur espèce : elles ont été rencontrées à Beurnevésain dans le Jura bernois et au pied du

Simplon, à Glis, près de Brigue. M. Gabriel de Mortillet en a vu blables au milieu de la région des grands dolmens de Plouarze Morbihan; le Dr Prunières et M. F. Gaillard 2 ont décrit des cime ce genre dans la Lozère et dans l'ile Thinic, en Saint-Pierre-Quibe Le Dr Koehl3 a découvert il y a quelques années, près de Worms grand nombre de tombes de la période néolithique dont plusie semblables à celles de Chamblandes par le mobilier funéraire e position accroupie des squelettes; Lindenschmidt a fouillé à M (Hesse-Rhénane) un cimetière de l'âge de la pierre polie renfern haches plates, polies, triangulaires et perforées, semblables à cell verte par le Dr Marcel à Chamblandes; ces sépultures renferma outre, des coquillages marins, travaillés et perforés, en très grande q L'analogie de ces tombeaux néolithiques de Chamblandes avec la même époque que l'on rencontre dans l'Europe occidentale et c ainsi que dans le Nord, est donc frappante. Cette analogie existe au certaines sépultures signalées par M. Zaborowski, notamment Dniestre, le Dniepre, en Ukraine, en Podolie, en Moravie, etc., da quelles on a trouvé, à côté d'un mobilier funéraire à peu près iden celui de Chamblandes, des squelettes souvent accroupis et saup d'une couleur rouge ferrugineuse, détail bien significatif qui expli la présence des morceaux d'ocre rouge et jaune à Chamblandes, c du reste, dans certaines stations lacustres de l'âge de la pierre poli de Chevroux, en particulier. M. Zaborowski a montré, dans un article il y a six ans, l'analogie qu'il y a à cet égard, non seulement en squelettes néolithiques du nord de l'Europe et ceux de Chamblandes aussi avec les squelettes de Menton. Cette analogie existe encore surtout frappante avec les squelettes néolithiques de la Ligurie 7.

Enfin il est intéressant de noter spécialement, avec MM. Zaborow Georges Hervé, la présence du corail (Corallium rubrum Lam.), de en jayet et de coquilles méditerranéennes. à l'intérieur des sépultur Chamblandes. Ces faits démontrent des relations commerciales impor à très grande distance et dans des directions diverses pendant le cou la période néolithique.

Quant à l'attitude accroupie des squelettes, elle a été constatée da sépultures anciennes de presque tous les pays d'Europe, de l'Afrique l'Amérique, c'est pourquoi nous ne croyons pas qu'il soit possible

1. G. de Mortillet, Le Préhistorique, 2o édit., p. 597.

2. F. Gaillard, Le cimetière celtique de l'île Thinic à Portivy-en-Saint-Pi Quiberon, Bull. Soc. d'Anthrop., Paris, 1884, p. 12 à 17. 3. L'Anthropologie, t. VIII, p. 353.

4. Lindenschmidt, Cimetière de l'âge de la pierre polie à Monsheim, Worms, Matériaux pour l'histoire naturelle et primitive de l'homme, vol. V. 5. Zaborowski, Du Dniestre à la Caspienne, Esquisse palethnologique, Soc. d'anthrop. de Paris, 1895.

6. Zaborowski, La souche blonde en Europe, Bull. Soc. Anthrop., 1898. 7. L'Anthropologie, t. IX, 1898, p. 690.

8. Bull. Soc. d'Anthrop., Paris, 1901.

tirer un caractère de race, ni le caractère d'une seule et unique période. Les fragments de crâne humain arrondis et travaillés trouvés en 1881 par Morel-Fatio et qui, d'après lui, devaient jouer le rôle d'amulettes, nous ont fait penser aux trépanations préhistoriques, mais tous les cranes exhumés en 1880-81, 1894 et 1901, bien que présentant souvent des perforations dues à la décomposition du tissu osseux, sont indemnes de toute trace de trépanation. Il est probable, toutefois, que les populations néolithiques de Chamblandes devaient, comme ailleurs, pratiquer cet usage; les rondelles craniennes décrites par Morel-Fatio en sont la preuve. En définitive les sépultures de Chamblandes nous montrent, d'une manière générale, que les populations préhistoriques des bords du Léman avaient des mœurs et des coutumes identiques à celles des populations contemporaines de l'Europe centrale et occidentale.

A quelle peuplade devons-nous attribuer les tombes cubiques de Chamblandes et leurs analogues et voisines de Pierra-Portay et du Châtelardsur-Lutry? Pour Morel-Fatio et pour M. A. Naef1, elles seraient les sépultures des populations lacustres des environs de Pully?!! mais d'après les observations de M. le professeur F.-A. Forel et nos observations personnelles il n'y a pas de trace de palafitte dans les environs de Pully; d'autre part les caractères anthropologiques et ethnologiques des squelettes de Chamblandes sont généralement bien différents de ceux des palafitteurs, ce qui nous oblige à admettre l'opinion que formule M. F.-A. Forel, dans le grand ouvrage qu'il vient de publier sur le Léman :

<«< Quant aux cimetières des environs de Pully et Lutry, Châtelard, Chamblandes, Verney, Pierra-Portay, qui se suivent à mi-côte sur une longueur de 4 kilomètres environ, de par la règle archéologique qui fait dater l'ensemble d'une trouvaille par la pièce la plus récente, ils sont de l'époque néolithique; la hache du Dr Ch. Marcel, la lame de stéatite de L. de Montet sont décisives pour cette détermination. Mais, d'une part, ces deux pièces sont de types très spéciaux, très différents des types ordinaires des palafittes, très rarement représentés dans les ruines de ceux-ci; d'autre part l'absence absolue de poteries, si abondantes dans tout ce qui appartient à nos stations lacustres, m'empêche, jusqu'à nouvel avis, d'attribuer ces quatre cimetières au peuple qui bâtissait ses villages sur nos lacs.

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Enfin, et c'est le grand argument qui nous fait écarter l'hypothèse que ces cimetières à tombes cubiques seraient les champs funèbres des palafitteurs, il n'y a pas les relations nécessaires entre les villages et les cimetières; je ne connais aucune palafitte dans le voisinage des cimetières en question, et inversement on n'a nulle part trouvé de cimetières à tombes cubiques dans le voisinage des palafittes de nos lacs subalpins et subjurassiens 2. »

1. A. Naef. La nécropole néolithique de Chamblandes. L'Anthropologie, 1901, p. 268-276. 2. F. A. Forel. Le Léman, t. III, p. 469, Lausanne, 1904.

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