SCÈNE 11. CLÉON, JULIE, FINETTE. CLEON. MADAME, vous avez bien peu de complaisance. JULIE, l'interrompant. Moi, Cléon, vous aider Á vous perdre? Chez vous on vient vous obséder; On vous pille à mes yeux, et je serai tranquille? Non, non, j'ai fait sur vous un effort inutile; Il faut rompre. CLÉON. Il faut rompre? FINETTE. Oui, Monsieur, à l'instant. Madame parle juste, et j'en ferois autant. Est-ce donc là le prix d'une amour si parfaite? FINETTE. (A Julie.) Chansons que tout cela !... Vite faisons retraite. FINETTE. Prendra-t-elle un époux Qui prodigue ses biens, qui les met au pillage? Souffrez... GLÉON, à Julie. FINETTE, à Julie, en voulant l'emmener. Point de quartier. CLÉON, à Julie, en l'arretant. Je vous promets qu'un journ FINETTE, l'interrompant, en poussant Julie. Promettez, promettez; mais adieu, sans retour. Voulez-vous que je meure? FINETTE, entraînant Julie. A vous permis. CLÉON, retenant Julie. FINETTE, à Julie qui s'arrête. Madame.. 1 1 Fuyez. Il vous séduit. CLÉON, à Julie. Un moment. FINETTE, à Julie, en voyant qu'elle regarde Cleon. JULIE, à Cléon. Quelle femme! Voulez-vous mériter et mon cœur et ma foi? Si je le veux! CLÉON. JULIE. Eh bien! vivez seul avec moi. Allons à votre terre... Un séjour si tranquille FINETTE, l'interrompant, à Cléon. Votre terre est, dit-on, un si charmant séjour! C'est un château superbe, un parc d'une étendue Surprenante! des eaux, et la plus belle vue! Bref, c'est une merveille; outre les revenus, Qui vont, bon an, malan, à dix bons mille écus. Oui, oui, si vous voulez que nous allions y vivre, Nous vous épouserons, et nous allons vous suivre. JULIE, à Cléon. Mais partons dès demain. FINETTE. Soit. JULIE, à Cléon. Vous ne dites mot? CLÉON, à part. Dorante m'a trahi; je suis pris comme un sot. JULIE, d'un air piqué. Vous avez bonne grâce à garder le silence, FINETTE. Il me vient un soupçon; le dirai-je tout haut? Parle. JULIE. FINETTE. Sur mon honneur, la terre a fait le saut; Et cette maison-ci sera bientôt vendue; Je vois bien que Dorante me perd, Et le traître qu'il est vous a tout découvert! JULIE. Qui, cruel! je sais tout, et je vais à mon père CLÉON, l'arrétant. Ah! s'il en est instruit, il vous emmenera. FINETTE. Mais comment voulez-vous qu'une femme se taise? Quand je garde un secret, j'ai les pieds sur la braise. JULIE, à Cléon. Puis-je me dispenser de lui faire savoir?.... CLÉON, l'interrompant. Si vous me déçelez, craignez mon désespoir. Que ferez-vous? FINETTE. CLÉON, mettant la main sur son épée. Je veux me percer à sa vue. FINETTE. Vous? vous n'en ferez rien. CLÉON. Que la foudre me tue, Si mon bras, à l'instant, ne termine mon sort!.... (A Julie.) Je remplirai vos vœux, si vous voulez ma mort. FINETTE, se mettant entr'eux deux... Doucement!.... Nous pouvonsajuster cette affaire. Je ne vois qu'un moyen qui nous force à nous taire. Combien pour cette terre avez-vous eu d'argent? Monsieur est économe, Et sûrement encore il a toute la somme? . Oh, cà! combien lui donnez-vous Pour enchaîner sa langue et calmer son courroux? 09 CLÉON. Tout ce qu'elle voudra. FINETTE. Cent mille francs. La faute Mériteroit, sans doute, une amende plus haute. C'est marché donné; mais nous avons le cœur bon. CLÉON, faisant quelques pas pour sortir. Je reviens à l'instant. 107 FINETTE, l'arrétant. Une fille, dit-on, 19 |