Page images
PDF
EPUB
[graphic][merged small][merged small][subsumed]

Elle parle, et soudain s'élance dans les flots.
Furieuse, à la nage elle suit les vaisseaux.
Sa rage a redoublé sa force et son audace;
A ta poupe, ô Minos, s'attachant sur ta trace,
Son amour obstiné te poursuit sur les mers.
Son père qui déjà plane au milieu des airs,
Et d'un aigle de mer a revêtu la forme,
Prêt à la déchirer, ouvre son bec énorme.
Scylla quitte la poupe, elle glisse, et le vent
Semble la soutenir sur l'abîme mouvant.
C'était son propre vol. Oiseau léger, rapide,
Son nom rappelle encor son larcin parricide.

III. Le Minotaure. Thésée sauvé du Labyrinthe. Couronne d'Ariane changée en Astre.

QUAND sa flotte en triomphe eut repassé les flots, Minos au dieu de Crète immole cent taureaux, Et consacre aux autels sa pompe triomphale. Cependant fruit honteux d'une flamme brutale, Un monstre à double forme atteste à tous les yeux Des flancs qui l'ont porté l'adultère odieux. Minos veut que dans l'ombre un vaste labyrinthe, Prison du monstre affreux, le cache en son enceinte. L'ingénieux Dédale, architecte fameux,

Traça les fondemens de ces murs sinueux,

Dædalus, ingenio fabræ celeberrimus artis,
Ponit opus turbatque notas, et lumina flexum
Ducit in errorem variarum ambage viarum.
Non secus ac liquidus Phrygiis Mæandros in arvis
Ludit; et ambiguo lapsu refluitque fluitque,
Occurrensque sibi venturas aspicit undas':
Et nunc ad fontes, nunc in mare versus apertum,
Incertas exercet aquas : ita Dædalus implet
Innumeras errore vias: vixque ipse reverti
Ad limen potuit: tanta est fallacia tecti!

Quo post quàm tauri geminam juvenisque figuram
Clausit; et Actæo bis pastum sanguine monstrum
Tertia sors annis domuit repetita novenis;
Utque ope virgineâ, nullis iterata priorum,
Janua difficilis filo est inventa relecto;
Protinus Ægides, raptâ Minoïde, Dian
Vela dedit: comitemque suam crudelis in illo
Litore deseruit. Desertæ, et multa querenti,
Amplexus et opem Liber tulit: utque perenni
Sidere clara foret, sumtam de fronte coronam
Immisit cœlo. Tenues volat illa
per auras;
Dumque volat, gemmæ subitos vertuntur in ignes:
Consistuntque loco, specie remanente Coronæ,
Qui medius Nixique genu est Anguemque tenentis.

Rien de plus neuf et de plus ingénieux que cette pensée.

Et dans de longs détours, sans terme et sans issue,
Par l'erreur des sentiers embarrassa la vue.
Tel qu'amoureux de suivre un tortueux chemin,
Le Méandre se joue en son cours incertain,
Et vingt fois sur ses pas ramené dans sa course,
Se rencontre lui-même, et retrouve sa source,
De détours en détours dans sa route égaré :
Tel de nombreux circuits par Dédale entouré,
Tourne le labyrinthe; et l'inventeur lui-même
Put à peine en sortir, tant son art est extrême !
Du
de barbares lois,
sang athénien, par
Là le monstre enfermé s'est engraissé deux fois;
Thésée après neuf ans l'immole et venge Athène.
Belle Ariane, un fil à tes yeux le ramène.
Vainqueur du minotaure, il part, et sur les flots
Il emmène avec lui la fille de Minos,

Et l'ingrat l'abandonne en une île déserte.
Mais le dieu de Naxos vient consoler sa perte;
Et prenant sa couronne, il ordonne aux zéphyrs
D'enlever dans le ciel son cercle de saphirs.
Elle vole, et soudain transformée en étoiles,
De la nuit azurée elle embellit les voiles.
C'est un astre nouveau, près d'Hercule placé,
Qui de son cercle d'or ceint le pôle glacé.

IV. Dædalus et Icarus.

DEDALUS interea, Creten longumque perosus Exsilium, tactusque soli natalis amore,

Clausus erat pelago. Terras licet, inquit, et undas
Obstruat, at coelum certè patet: ibimus illac.
Omnia possideat, non possidet aëra Minos.
Dixit: et ignotas animum dimittit in artes,
Naturamque 'novat. Nam ponit in ordine pennas,
A minimâ cœptas, longam breviore sequenti;
Ut clivo crevisse putes. Sic rustica quondam
Fistula disparibus paulatim surgit avenis.
Tum lino medias, et ceris alligat imas.
Atque ita compositas parvo curvamine * flectit,
Ut veras imitentur aves. Puer Icarus unà
Stabat; et, ignarus sua se tractare perîcla3,
Ore renidenti, modò quas vaga moverat aura,
Captabat plumas: flavam modò pollice ceram
Mollibat, lusuque suo mirabile patris
Impediebat opus. Post quàm manus ultima cœptis

1 Rem novam in naturâ excogitat. Nam homo qui naturá volare non potest, ingenio Dædali aptus ad volatum effectus esse videtur. 2 Parum inflectit, ut veræ avium alæ esse viderentur. 3 A la lettre, l'enfant ignore qu'il manie ses propres périls. Le vrai poète, sans créer des mots nouveaux, langue qui lui est propre.

sait se créer une

♦ Imponere manum ultimam operi, est opus finire.

[ocr errors]
« PreviousContinue »