DE VIRGILE, TRADUITE EN PROSE, AVEC LE TEXTE EN REGARD 2 Par C.-L. MOLLEVAUT, Membre de l'Institut royal de France (Académie des Inscriptions TOME DEUXIÈME. A PARIS, Chez ARTHUS BERTRAND, Libraire, Ruc Hautefeuille, no. 23. ENEIDOS LIBER QUARTUS. Ar regina, gravi jam dudùm saucia curâ, L'ÉNÉIDE. LIVRE IV. MAIS la reine, depuis long-temps déchirée de soucis cruels, nourrit sa blessure au fond de son cœur, que consume un feu secret. Sans cesse la valeur du héros, sans cesse la splendeur d'une si noble origine reviennent à sa pensée; les traits, les paroles d'Enée restent gravés dans son âme; et les ennuis écartent de ses yeux le paisible sommeil. Déjà l'aurore éclairait la terre des feux d'Apollon, et chassait du ciel l'ombre humide, lorsque la reine éperdue s'adresse à sa fidèle sœur: « Anne ma sœur, quels songes épouvantent mon ame irrésolue ! quel nouvel hôte est entré dans nos demeures! quel port majestueux! qu'il est grand par le cœur et par les armes! Certes, je le crois, et ce n'est point une erreur, il est du sang des Dieux: la crainte décèle une ame dégénérée. Hélas! par quels destins il fut poursuivi! quels combats terribles il racontait! Si ma volonté ferme, immuable, n'était pas de renoncer à jamais au lien de l'hyménée depuis que la mort → |