Nos champs sont ranimés; la forêt dépouillée DAMÈTE. Muse! chante d'abord le dieu de l'univers! MÉNALQUE. Moi je chante Apollon; j'offre à ce dieu qui m'aime, DAMÈTE. Par des fruits qu'elle jette, Églé vient m'assaillir, MÉNALQUE. Amynte, cet enfant, doux charme de ma vie, DAMÈTE. que Délie. Pour la jeune beauté dont l'amour fait mon bien, MÉNALQUE. Amynte tient de moi (pouvois-je davantage?) Que de fois mon Églé m'a parlé de ses feux! MÉNALQUE. M'aimes-tu bien, Amynte, alors que dans tes chasses t I. 27 DAMÈTE. Je célèbre aujourd'hui le jour où je naquis; MÉNALQUE. Phyllis dans nos hameaux est la seule que j'aime. DAMÈTE. Comme un loup dévorant est craint des bergeries, MÉNALQUE. Si l'eau nourrit les grains qu'on sème dans nos plaines, Si des jeunes chevreaux l'arboisier est chéri, DAMÈTE. Muses, à Pollion gardez une génisse; Qu'avec soin dans les prés votre main la nourrisse: MÉNALQUE. Lui-même avec succès il fait ouïr ses chants; DAMÈTE. Que l'ami qui partage en secret ton bonheur, Puisse-t-il recueillir le doux miel sur l'yeuse, MÉNALQUE. Que celui qui se plaît aux vers de Bavius DAMÈTE. Vous qui cueillez la fraise aux vermeilles couleurs, Fuyez! un froid serpent s'est caché sous les fleurs. MÉNALQUE. Fuyez les bords glissans de ce fleuve perfide, DAMÈTE. Tityre, du rivage éloignez vos troupeaux; MÉNALQUE. Rassemblez vos brebis dans la forêt prochaine; Dans leur sein, sous nos doigts, resteroit endurci. DAMETE. Mon taureau s'amaigrit dans un gras pâturage; MÉNALQUE. Quel magique pouvoir épuise mes agneaux ? DAMÈTE. Sois Apollon pour moi, si tu me dis la place Où trois pieds de l'Olympe enferment tout l'espace. MÉNALQUE. Phyllis t'aimera seul; mais dans quels lieux, dis-moi, PALÉMON. Même prix vous est dû : pourrai-je avec justice On regrette que M. Dorange ait négligé, dans sa belle traduction, les expressions des derniers vers de l'églogue, et quisquis amores etc., qui ont fait l'objet d'une note intéressante de Malfilâtre. M. Tissot les a très-heureusement conservées dans la sienne : Il ne m'appartient pas de nommer le vainqueur : ÉGLOGUE IX. DRUSUS. SUJET. Le sujet de cette églogue est suffisamment expliqué dans la Vie de Virgile (*). Elle fut composée dans le commencement de l'année 716 de la fondation de Rome. C'est le poëte qui parle dans toute la pièce. (1) MUSES de Sicile (a), chantons des sujets un peu plus élevés. Les buissons et les humbles bruyères ne plaisent pas à tous les lecteurs. Si nous chantons les forêts, que les forêts soient dignes d'un consul (b). Les derniers temps annoncés par les vers de la Sibylle déjà sont arrivés. La grande chaîne des siècles (c) recommence de nouveau : Astrée révient déjà, déjà revient le règne de Saturne : déja une nouvelle race d'hommes est envoyée du haut du ciel. Daigne seulement, chaste Lucine (d), favoriser cet enfant naissant, par qui d'abord disparoîtra la race de fer, et renaîtra celle de l'âge d'or (e), dans tout le monde : sois-lui propice; Apollon, ton frère, règne aujourd'hui (ƒ). Et toi, Pollion, c'est à ton consulat qu'est attachée la naissance de cet âge glorieux; c'est à lui (*) Voyez ci-après les notes (h et i). 1 |