Page images
PDF
EPUB

de transpiration forme, ou aigrit les maladies de la peau : la nourriture du cochon doit donc être défendue dans les climats où l'on est sujet à ces maladies, comme celui de la Palestine, de l'Arabie, de l'Egypte et de la Lybie.

CHAPITRE XXV I.

Continuation du même sujet.

M. CHARDIN (1) dit qu'il n'y a point de

fleuve navigable en Perse, si ce n'est le fleuve Kur, qui est aux extrémités de l'empire. L'ancienne loi des Guèbres, qui défendoit de naviger sur les fleuves, n'avoit donc aucun inconvénient dans leur pays : mais elle auroit ruiné le commerce dans un autre.

[ocr errors]
[ocr errors]

Les continuelles lotions sont très en usage dans les climats chauds. Cela fait que la loi mahométane et la religion indienne les ordonnent. C'est un acte très-méritoire aux Indes de prier (2) Dieu dans l'eau courante : mais comment exécuter ces choses dans d'autres climats ?

Lorsque la religion, fondée sur le climat, a trop choqué le climat d'un autre pays, elle n'a pu s'y établir; et quand on l'y a introduite, elle en a été chassée. Il semble, humainement

(1) Voyage de Perse', tome II.

parlant, que ce soit le climat qui a prescrit des bornes à la religion chrétienne et à la religion mahométane.

Il suit de-là qu'il est presque toujours convenable qu'une religion ait des dogmes particuliers et un culte général. Dans les loix qui concernent les pratiques de culte, il faut peu de détails, par exemple, des mortifications, et non pas une certaine mortification. Le Christianisme est plein de bon sens : l'abstinence est de droit divin; mais une abstinence particulière est de droit de police, et on peut la changer.

LIVRE

X X V.

Des loix, dans le rapport qu'elles ont avec l'établissement de la religion de chaque pays, et sa police extérieure.

CHAPITRE PREMIER.

Du sentiment pour la religion.

L'HOMME

'HOMME pieux et l'athée parlent toujours de religion; l'un parle de ce qu'il aime, et l'autre de ce qu'il craint.

CHAPITRE II.

Du motif d'attachement pour les diverses religions.

LE's diverses religions du monde ne donnent

pas à ceux qui les professent des motifs égaux d'attachement pour elles cela dépend beaucoup de la manière dont elles se concilient avec la façon de penser et de sentir des hommes.

Nous sommes extrêmement portés à l'idolâ trie, et cependant nous ne sommes pas fort atta

guère portés aux idées spirituelles, et cependant nous sommes très-attachés aux religions qui nous font adorer un être spirituel. C'est un sentiment heureux qui vient en partie de la satisfaction que nous trouvons en nousmêmes, d'avoir été assez intelligens pour avoir choisi une religion qui tire la divinité de l'humiliation où les autres l'avoient mise. Nous regardons l'idolâtrie comme la religion des peuples grossiers; et la religion qui a pour objet un être spirituel, comme celle de peuples éclairés.

Quand, avec l'idée d'un être spirituel suprême, qui forme le dogme, nous pouvons joindre encore des idées sensibles qui entrent dans le culte, cela nous donne un grand attachement pour la religion, parce que les motifs dont nous venons de parler, se trouvent joints à notre penchant naturel pour les choses sensibles. Aussi les catholiques, qui ont plus de cette sorte de culte que les protestans, sont-ils plus invinciblement attachés à leur religion que les protestans ne le sont à la leur, et plus zélés pour sa propagation.

Lorsque (*) le peuple d'Ephèse eut appris que les pères du concile avoient décidé qu'on pouvoit appeller la vierge mère de Dieu, il fut transporté de joie; il baisoit les mains des évêques, il embrassoit leurs genoux, tout retentissoit d'acclamations.

(*) Lettre de S. Cyrille.

Quand une religion intellectuelle nous donne encore l'idée d'un choix fait par la divinité, et d'une distinction de ceux qui la professent d'avec ceux qui ne la professent pas, cela nous attache beaucoup à cette religion. Les Mahométans ne seroient pas si bons musulmans si, d'un côté, il n'y avoit pas de peuples idolâtres qui leur font penser qu'ils sont les vengeurs de l'unité de Dieu, et de l'autre, des chrétiens, pour leur faire croire qu'ils sont l'objet de ces préférences.

Une religion chargée de beaucoup (1) de pratiques, attache plus à elle qu'une autre qui l'est moins on tient beaucoup aux choses dont on est continuellement occupé; témoin l'obstination tenace des Mahométans (2) et des Juifs, et la facilité qu'ont de changer de religion les peuples barbares et sauvages, qui, uniquement occupés de la chasse ou de la guerre, ne se chargent guère de pratiques religieuses.

Les hommes sont extrêmement portés à espérer et à craindre; et une religion qui n'auroit ni enfer ni paradis, ne sauroit guère leur

(1) Ceci n'est point contradictoire avec ce que j'ai dit au chapitre pénultième du livre précédent : ici je parle des motifs d'attachement pour une religion, et là des moyens de la rendre plus générale.

(2) Cela se remarque par toute la terre. Voyez sur les Turcs les missions du levant; le recueil des voyages qui ont servi à l'établissement de la compagnie des Indes, tome III, part. I, p. 201, sur les Maurés de Batavia ; et le P. Labat,

« PreviousContinue »