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CHAPITRE XII.

Du nombre de filles et de garçons dans différens pays.

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'A1 déjà dit qu'en (1) Europe il naît un peu plus de garçons que de filles. On a remarqué qu'au Japon (2), il naissoit un peu plus de filles que de garçons: toutes choses égales, il y aura plus de femmes fécondes au Japon qu'en Europe, et par conséquent plus de peuple.

Des relations (3) disent qu'à Bantam il y a dix filles pour un garçon; une disproportion pareille, qui feroit que le nombre des familles y seroient au nombre de celle des autres climats comme un est à cinq et demi, seroit excessive. Les familles y pourroient être plus grandes à la vérité: mais il y a peu de gens assez aisés pour pouvoir entretenir une si grande famille.

(1) Au liv. XVI, ch. IV.

(2) Voyez Kempfer, qui rapporte un dénombrement de Méaco.

(3) Recueil des voyages qui ont servi à l'établissement de la compagnie des Indes, tome I, p. 347.

CHAPITRE XIII.

Des ports de mer.

DANS ANS les ports de mer, où les hommes s'exposent à mille dangers, et vont mourir ou vivre dans des climats reculés, il y a moins d'hommes que de femmes; cependant on y voit plus d'enfans qu'ailleurs : cela vient de la facilité de la subsistance. Peut-être même que les parties huileuses du poisson sont plus propres à fournir cette matière qui sert à la génération. Ce seroit une des causes de ce nombre infini de peuple qui est au Japon (1) et à la Chine (2), où l'on ne vit presque que de poisson (3). Si cela étoit, de certaines règles monastiques, qui obligent de vivre de poisson, seroient contraires à l'esprit du législateur même.

(1) Le Japon est composé d'isles; il y a beaucoup de rivages, et la mer y est très-poissonneuse.

(2) La Chine est pleine de ruisseaux.

(3) Voyez le P. du Halde, tome II, p. 139, 142 et

suivantes.

CHAPITRE XI V.

Des productions de la terre qui demandent plus ou moins d'hommes.

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ES pays de pâturages sont peu peuplés, parce que peu de gens y trouvent de l'occupation; les terres à bled occupent plus d'hommes et les vignobles infiniment davantage.

En Angleterre (*) on s'est souvent plaint que l'augmentation des pâturages diminuoit les habitans; et on observe en France, que la grande quantité de vignobles y est une des grandes causes de la multitude des hommes.

Les pays où des mines de charbon fournissent des matières propres à brûler, ont cet avantage sur les autres, qu'il n'y faut point de forêts, et que toutes les terres peuvent être cultivées.

Dans les lieux où croît le riz, il faut de grands travaux pour ménager les eaux; beaucoup de gens y peuvent donc être occupés. Il

(*) La plupart des propriétaires des fonds de terre, dit Burnet, trouvant plus de profit en la vente de leur laine que de leur bled, enfermèrent leurs possessions; les communes, qui mouroient de faim, se soulevèrent: on proposa une loi agraire; le jeune roi écrivit même làdessus on fit des proclamations contre ceux qui avoient renfermé leurs terres. Abrégé de l'histoire de la réform P. 44 et 83.

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y a plus : il y faut moins de terre pour fournir à la subsistance d'une famille, que dans ceux qui produisent d'autres grains: enfin la terre qui est employée ailleurs à la nourriture des animaux, y sert immédiatement à la subsistance des hommes le travail que font ailleurs les animaux, est fait là par les hommes ; et la culture des terres devient pour les hommes une immense manufacture.

CHAPITRE X V.

Du nombre des habitans, par rapport aux arts.

LORSQU'IL y a une loi agraire, et que les terres sont également partagées, le pays peut être très-peuplé, quoiqu'il y ait peu d'arts, parce que chaque citoyen trouve dans le travail de sa terre précisément de quoi se nourrir, et que tous les citoyens ensemble consomment tous les fruits du pays. Cela étoit ainsi dans quelques anciennes républiques.

Mais dans nos états d'aujourd'hui, les fonds de terre sont inégalement distribués; ils produisent plus de fruits que ceux qui les cultivent n'en peuvent consommer; et si l'on y néglige les arts, et qu'on ne s'attache qu'à l'agriculture, le pays ne peut être peuplé. Ceux qui cultivent ou font cultiver, ayant des fruits de reste, rien ne les engage à travailler l'année

d'ensuite les fruits ne seroient point consommés par les gens oisifs, car les gens oisifs n'auroient pas de quoi les acheter. Il faut donc que les arts s'établissent, pour que les fruits soient consommés par les laboureurs et les artisans. En un mot, ces états ont besoin que beaucoup de gens cultivent au-delà de ce qui leur est nécessaire pour cela, il faut leur donner envie d'avoir le superflu; mais il n'y a que les artisans qui le donnent.

Ces machines, dont l'objet est d'abréger l'art, ne sont pas toujours utiles. Si un ouvrage est à un prix médiocre, et qui convienne également à celui qui l'achète et à l'ouvrier qui l'a fait, les machines qui en simplifieroient la manufacture, c'est-à-dire, qui diminueroient le nombre des ouvriers, seroient pernicieuses; et si les moulins à eau n'étoient pas par-tout établis, je ne les croirois pas aussi utiles qu'on le dit, parce qu'ils ont fait reposer une infinité de bras, qu'ils ont privé bien des gens de l'usage des eaux, et ont fait perdre la fécondité à beaucoup de terres.

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