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qu'ils n'aient pris cette condition en fraude & pour fe fouftraire aux charges publiques. Un autre (a) veut que les Eglifes aient la Juftice criminelle & civile, fur tous ceux qui habitent dans leur territoire. Enfin le Capitulaire (b) de Charles le Chauve diftingue les Jurifdictions du Roi, celles des Seigneurs, & celles des Eglifes; & je n'en dirai pas davantage (c).

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Que les Juftices étoient établies avant la fin de la feconde

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Race.

Na dit que ce fut dans le défordre de la feconde Race; que les Vaffaux s'attribuerent la Juftice dans leurs fifcs: on a mieux aimé faire une propofition générale, que de l'examiner: il a été plus facile de dire que les Vaffaux ne les Vaffaux ne poffédoient pas, que de découvrir comment ils poffédoient. Mais les Juftices ne doivent point leur origine aux ufurpations; elles dérivent du premier établissement, & non pas de fa corruption.

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CC

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Celui qui tue un homme libre, » eft-il dit dans la Loi (d) des Bavarois, payera la Compofition à fes parens, s'il en a ; & s'it n'en a point, il la payera au Duc, ou à celui à qui il s'étoit re« commandé pendant fa vie. » On fçait ce que c'étoit que fe recommander pour un bénéfice.

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Celui à qui on a enlevé fon efclave, » dit la Loi (e) Allemande, «ira au Prince auquel eft foûmis le raviffeur, afin qu'if « en puiffe obtenir la Compofition.':

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Si un Centenier, » eft-il dit dans le Décret de Childebert (f);

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(a) Capitulaire de l'an 806; il est ajoûté à la Loi des Bavarois, art. 7. Voyez auffi l'art 3, édition de Lindembrock, pag. 444. Imprimis omnium jubendum eft ut habeant Ecclefiæ earum Juftitias, & in vitâ illorum qui habitant in ipfis Ecclefiis & poft, tam in pecuniis quàm & in fubftantiis earum.

(6) De l'an 857, in Synodo apud Carifiacum, art. 4, édition de Baluze, pag. 96. (c) Voyez la Lettre des Evêques affem blés à Rheims, de l'an 858, art. 7, dans les Capitulaires, édition de Baluze, pag. 108. Sicut illæ res & facultates in quibus vivunt

Clerici, ità & illæ fub confecratione Immuni tatis funt de quibus debent militare Vassal li, &c.

(d) Tit. 3, chap. 13, édition de Lindembrock. (e) Tit. 85.

(f) De l'an 595, art. 11 & 12, édition des Capitulaires de Baluze, pag. 19. Pari conditione convenit ut fi una Centena in aliâ Centena veftigium fecuta fuerit & invenerit, vel in quibufcumque Fidelium noftrorum terminis veftigium mijerit,& ipfum in aliam Cens tenam minimè expellere potuerit, aut convictus reddat latronem,&c. O03

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trouve

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pas, il

trouve un voleur dans une autre Centaine que la fienne, ou dans les limites de nos Fideles, & qu'il ne l'en chaffe représentera le voleur ou fe purgera par ferment. » Il y avoit donc de la différence entre le territoire des Centeniers & celui des Fideles.

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Ce Décret (a) de Childebert explique la Conftitution de Clotaire de la même année, qui, donnée pour le même cas & fur le même fait, ne differe que dans les termes, la Conftitution appellant in Trufte ce que le Décret appelle in terminis Fidelium noftrorum. Mrs Bignon & du Cange (b), qui ont dit que in Truste fignifioit le Domaine d'un autre Roi, n'ont pas bien rencontré.

Mais pour finir tout d'un coup, la feconde Race n'étoit ni dans le défordre, ni fur sa fin, du tems de Charle-Magne: fous fon Regne on ne faifoit point d'ufurpations. Si de fon tems les Juftices patrimoniales étoient établies, le système fi commode que l'on propofe, tombe de lui-même.

Dans une Conftitution (c) de Pepin Roi d'Italie, faite tant pour les Francs que pour les Lombards, ce Prince, après avoir impofé des peines aux Comtes & autres Officiers Royaux qui prévariquent dans l'exercice de la Justice, ou qui different de la rendre, ordonne (d) que, s'il arrive qu'un Franc ou un Lom bard ayant un Fief ne veuille pas rendre la Juftice, le Juge dans le diftrict duquel il fera, fufpendra l'exercice de fon Fief; & que, dans cet intervalle, lui ou fon Envoyé rendront la Juftice.

Un Capitulaire (e) de Charle-Magne prouve que les Rois ne levoient point partout les Freda. Un autre (f) du même Prince rappelle plufieurs articles de la Loi Salique, Bourguignonne & Romaine, pour (g) que , pour (g) que chacun de fes Fideles rende la Juftice en conformité. Un autre (h) du même Prince nous fait voir les Regles féodales & la Cour féodale déja établies. Un autre de

(a) Si veftigius comprobatur latronis, tamen præfentia nihil longè muletando; aut fi perfequens latronem fuum comprehenderit, integram fibi Compofitionem accipiat. Quod fi in Truste invenitur, medietatem Compofitionis Truftis adquirat, & capitale exigat à la trone, art. 2 & 3.

(b) Voy. le Glollaire au mot Truftis.

(c) Inférée dans la Loi des Lombards, Liv. II. tit. 52, §. 14; c'eft le Capitulaire de l'an 793, dans Baluze, pag. 544, art. 10.

(d) Et fi forfuan Francus aut Longobardus habens beneficium Juftitiam facere noluerit,

ille Judex in cujus minifterio fuerit, contradi dicat illi beneficium fuum, interim dum ipfe aut Miffus ejus Juftitiam faciat. Voy. encore la même Loi des Lombards, Liv. II. tit. 52. §. 2, qui le rapporte au Capitulaire de Char-, le-Magne, de l'an 779, art. 21.

(e) Le troisieme de l'an 812, art. 10. (f) Le fecond de l'an 813, édition de Baluze, p. 506.

(g) Ut unufquifque Fidelis Juftitias ità fa

ceret,

ibid.

(b) Second Capit. de l'an 813.

Louis le Débonnaire veut que, lorfque celui qui a un Fief ne rend (a) pas la Juftice ou empêche qu'on ne la rende, on vive à difcrétion dans fa maifon, jufqu'à ce que la Juftice foit rendue. Je citerai encore deux (b) Capitulaires de Charles le Chaul'un de l'an 861, où l'on voit des Jurifdictions particulieres établies, des Juges & des Officiers fous eux; l'autre (c) de l'an: 864, où il fait la diftinction de fes propres Seigneuries d'avec: celles des particuliers..

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On n'a point de conceffions originaires des Fiefs, parce qu'ils furent établis par le partage qu'on fçait avoir été fait entre les Vainqueurs. On ne peut donc pas prouver par des contrats originaires, que , que les Juftices, dans les commencemens, aient été attachées aux Fiefs: mais fi, dans les Formules des confirmations, ou des tranflations à perpétuité de ces Fiefs, on trouve,. comme on a dit, que la Juftice y étoit établie, il falloit bien que: ce droit de Juftice fût de la nature du Fief & une de fes principales prérogatives..

, par

Nous avons un plus grand nombre de monumens qui établisfent la Juftice patrimoniale des Eglifes dans leur territoire, que: nous n'en avons pour prouver celle des bénéfices ou Fiefs des Leudes ou Fideles, deux raifons. La premiere, que la plûpart des monumens qui nous reftent ont été confervés ou recueillis par les Moines, pour l'utilité de leurs Monafteres. La. feconde, que le patrimoine des Eglifes ayant été formé par des conceffions particulieres, & une efpece de dérogation à l'ordre: établi, il falloit des Chartres pour cela; au lieu que les concef-fions faites aux Leudes étant des conféquences de l'ordre poli-tique, on n'avoit pas befoin d'avoir & encore moins de conferver une Chartre particuliere. Souvent même les Rois se contentoient de faire une fimple tradition par le Sceptre, comme il paroît par la vie de Saint Maur..

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Mais la troifieme Formule (d) de Marculfe nous prouve affez:

(a) Capitulare quintum anni 819, art. 23, édit. de Baluze, pag. 617. Ut ubicumque Miffi, aut Epifcopum, aut Abbatem, aut alium quemlibet honore præditum invenerint, qui Juftitiam facere noluis vel prohibuit, de ipfius rebus vivant quandiù in eo loco juftitias facere debent.

(b) Edictum in Carifiaco, dans Baluze, tom. II. pag. 152, Unufquifque Advocatus pro omnibus de fuâ Advocatione... in con

venientiâ ut cum Ministerialibus de fuâ ̈ Advocatione quos invenerit contrà hunc Ban- · num noftrum feciffe..... caftiger.

(c) Edictum Piftenfe, art. 18, édit. de Baluze, tom. II. p. 81, Si in fifcum noftrum, vel in quamcunque Immunitatem, aut ali-cujus Potentis Poteftatem vel Proprietatem,» confugerit, &c.

(d) Liv. II. Si beneficia opportuna locis Ecclefiarum aut cai voluerit dicere.....

que

que le privilége d'Immunité, & par conféquent celui de la Justice, étoient communs aux Eccléfiaftiques & aux Séculiers, puifqu'elle est faite pour les uns & pour les autres.

CHAPITRE XXIII.

Idée générale du Livre de l'Etablissement de la Monarchie Françoife dans les Gaules, par M. l'Abbé DUBOS.

Left bon qu'avant de finir ce Livre, j'examine un peu l'Ou

Ivrage de M. l'Abbé Dubos, parce que més idées font perpé

tuellement contraires aux fiennes ; & que, s'il a trouvé la vérité, je ne l'ai pas trouvée.

Cet Ouvrage a féduit beaucoup de gens, parce qu'il eft écrit avec beaucoup d'art; parce qu'on y fuppofe éternellement ce qui eft en queftion; parce que, plus on y manque de preuves, plus on y multiplie les probabilités; parce qu'une infinité de conjectures font mifes en principe, & qu'on en tire comme conféquences d'autres conjectures. Le Lecteur oublie qu'il a douté, pour commencer à croire. Et comme une érudition fans fin eft placée, non pas dans le système, mais à côté du fyftème, l'efprit eft diftrait par des acceffoires, & ne s'occupe plus du principal. D'ailleurs, tant de recherches ne permettent pas d'imaginer qu'on n'ait rien trouvé ; la longueur du voyage fait croire qu'on est enfin arrivé.

Mais quand on examine bien, on trouve un coloffe immense qui a des pieds d'argile; & c'est parce que les pieds font d'argile, que le coloffe eft immenfe. Si le fyftème de M. l'Abbé Dubos avoit eu de bons fondemens, il n'auroit pas été obligé de faire trois mortels volumes pour le prouver; il auroit tout trouvé dans son fujet; & fans aller chercher de toutes parts ce qui en étoit très-loin, la raifon elle-même se seroit chargée de placer cette vérité dans la chaîne des autres vérités. L'Hiftoire & nos Loix lui auroient dit : « Ne prenez point tant de peine, « nous rendrons témoignage de vous. »

CHAPITRE

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Continuation du même fujet. Réflexion fur le fond du
Système.

M3

R l'Abbé Dubos veut ôter toute efpece d'idée que les Francs foient entrés dans les Gaules en Conquérans: felon lui, nos Rois, appellés par les Peuples, n'ont fait que fe mettre à la place & fuccéder aux Droits des Empereurs Romains.

pas que

donc fe

Cette prétention ne peut pas s'appliquer au tems où Clovis entrant dans les Gaules, faccagea & prit les villes; elle ne peut pas s'appliquer non plus au tems où il défit Siagrius, Officier Romain, & conquit le pays qu'il tenoit ; elle ne peut rapporter qu'à celui où Clovis, devenu maître d'une grande partie des Gaules par la violence, auroit été appellé, par le choix & l'amour des Peuples, à la domination du refte du pays; & il Clovis ait été reçû, il faut qu'il ait été appellé; ne fuffit il faut M. l'Abbé Dubos prouve que les Peuples ont mieux que aimé vivre sous la domination de Clovis, que de vivre fous la domination des Romains, ou fous leurs propres Loix. Or les Romains de cette partie des Gaules qui n'avoit point encore été envahie par les Barbares, étoient, felon M. l'Abbé Dubos, de deux fortes; les uns étoient de la Confédération Armorique, & avoient chaffé les Officiers de l'Empereur, pour fe défendre euxmêmes contre les Barbares & fe gouverner par leurs propres Loix; les autres obéiffoient aux Officiers Romains. Or M. l'Abbé Dubos prouve-t'il que les Romains qui étoient encore foûmis à T'Empire, aient appellé Clovis? point du tout. Prouve-t'il que la République des Armoriques ait appellé Clovis, & fait même un Traité quelconque avec lui? point du tout encore. Bien loin qu'il puiffe nous dire quelle fut la deftinée de cette République, il n'en fçauroit pas même montrer l'exiftence; & quoiqu'il la fuive depuis le tems d'Honorius jufqu'à la conquête de Clovis, quoiqu'il y rapporte avec un art admirable tous les événemens de ces tems-là, elle est restée invisible dans les Auteurs. Car il a bien de la différence entre prouver par un paffage de Zozime (a), que fous l'Empire d'Honorius, la contrée Armorique (b) & les

y

(‹) Hift. Liv. vi. (b) Totufque Tractatus Armoricus, aliæque Galliar. Provincia. Ibid. Part. II.

PP

autres

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