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fants étoient toujours préférés (1), soit dans la poursuite des honneurs, soit dans l'exercice de ces honneurs mêmes. Le consul qui avoit le plus d'enfants prenoit le premier les faisceaux (2); il avoit le choix des provinces (3): le sénateur qui avoit le plus d'enfants étoit écrit le premier dans le catalogue des sénateurs; il disoit au sénat son avis le premier (4). L'on pouvoit parvenir avant l'âge aux magistratures, parceque chaque enfant donnoit dispense d'un an (5). Si l'on avoit trois enfants à Rome, on étoit exempt de toutes charges personnelles (6). Les femmes ingénues qui avoient trois enfants, et les affranchies qui en avoient quatre, sortoient (7) de cette perpétuelle tutele où les retenoient (8) les anciennes lois de Rome.

Que s'il y avoit des récompenses, il y avoit aussi des peines (9). Ceux qui n'étoient point mariés ne pouvoient rien recevoir par le testament des (10) étrangers,et ceux qui étant mariés

(1) Tacite, liv. II. Ut numerus liberorum in candidatis præpolleret, quod lex jubebat.—(2) AuluGelle, liv. II, ch. XV.—(3) Tacite, Annal. I. XV.

(4) Voyez la loi VI, §. 5, de decurion.—(5) Voyez la loi II, ff. de minorib.-(6) Loi I, §. 3; et 11, S. 1, ff. de vacat, et excusat. muner.—(7) Fragm. d'Ulpien, tit. XXIX, §. 3.—(8) Plutarque, Vie de Numa.-(9) Voyez les Fragments d'Ulpien, aux tit. XIV, XV, XVI, XVII, et XVIII, qui sont un des beaux morceaux de l'ancienne jurisprudence romaine. (10) Sozom, liv. I, ch. IX. On recevoit de ses parents. Fragm. d'Ulpien, tit. XVI, §. 1.

n'avoient point d'enfants n'en recevoient que la moitié (1). Les Romains, dit Plutarque (2), se marioient pour être héritiers, et non pour avoir des héritiers.

Les avantages qu'un mari et une femme pouvoient se faire par testainent étoient limités par la loi. Ils pouvoient se donner le tout (3) s'ils avoient des enfants l'un de l'autre ; s'ils n'en avoient point, ils pouvoient recevoir la dixieme partie de la succession à cause du mariage; et, s'ils avoient des enfants d'un autre mariage, ils pouvoient se donner autant de dixiemes qu'ils avoient d'enfants.

Si un mari s'absentoit (4) d'auprès de sa femme pour autre cause que pour les affaires de la république, il ne pouvoit en être l'héritier.

La loi donnoit à un mari ou à une femme qui survivoit deux ans (5) pour se remarier,

(1) Sozom, liv. I, ch. IX, et leg. unic. cod. Theod. de infirmis panis cœlib. et orbitat.—(2) OEuvres morales, De l'amour des perés envers leurs enfants. -(3) Voyez un plus long détail de ceci dans les Fragm. d'Ulpien, tit. XV et XVI.—(4) Fragm. d'Ulpien, tit. XVI, §. 1.—(5)Ib. tit. XIV. Il paroît que les premieres lois Juliennes donnerent trois ans. Harangue d'Auguste, dans Dion, liv. LVI; Suétone, Vie d'Auguste, ch. XXXIV. D'autres lois Juliennes n'accorderent qu'unan: enfin, la loi Pappienne en donna deux. Fragm. d'Ulpien, tit. XIV. Ces lois n'étoient point agréables au peuple, et Auguste les tempéroit on les roidissoit selon qu'on étoit plus ou moins disposé à les souffrir.

et un an et demi dans le cas du divorce. Les peres qui ne vouloient pas marier leurs enfants ou donner de dot à leurs filles y étoient contraints par les magistrats (1).

On ne pouvoit faire de fiançailles lorsque le mariage devoit être différé de plus de deux ans (2); et, comme on ne pouvoit épouser une fille qu'à douze ans, on ne pouvoit la fiancer qu'à dix. La loi ne vouloit pas que l'on pût jouir inutilement (3) et sous prétexte de fiançailles des privileges des gens mariés..

Il étoit défendu à un homme qui avoit soixante ans (4) d'épouser une femme qui en avoit cinquante. Comme on avoit donné de grands privileges aux gens mariés, la loi ne vouloit point qu'il y eût de mariages inutiles. Par la même raison, le sénatus-consulte calvisien déclaroit illégal (5)le mariage d'une femme qui avoit plus de cinquante ans avec un homme qui en avoit moins de soixante; de sorte qu'une femme qui avoit cinquante ans ne pouvoit se marier sans encourir les peines de ces lois. Tibere ajouta (6) à la rigueur de la loi Pappienne, et défendit à un homme de soixante ans d'é

(1) C'étoit le trente-cinquieme chef de la loi Pappienne, leg. XIX, ff. de ritu nuptiarum.—(2) Voyez Dion, liv. LIV, anno 736; Suétone, in Octavio, ch. XXXIV.—(3) Voyez Dion, liv. LIV; et, dans le même Dion, la harangue d'Auguste, liv. LVI.(4) Fragm. d'Ulpien, tit. XVI; et la loi XXVII, cod. de nuptiis.—(5) Fragmı. d'Ulpien, tit. XVI, §. 3.-(6) Voyez Suétone, in Claudio, ch. XXIII.

ESPR. DES LOIS. 3.

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pouser une femme qui en avoit moins de cinquante; de sorte qu'un homme de soixante ans ne pouvoit se marier dans aucun cas sans encourir la peine. Mais Claude (1) abrogea ce qui avoit été fait sous Tibere à cet égard.

Toutes ces dispositions étoient plus conformes au climat d'Italie qu'à celui du nord, où un homme de soixante ans a encore de la force, et où les femmes de cinquante ans ne sont pas généralement stériles.

Pour que l'on ne fût pas inutilement borné dans le choix que l'on pouvoit faire, Auguste permit à tous les ingénus qui n'étoient pas sénateurs (2) d'épouser des affranchies (3). La loi (4) Pappienne interdisoit aux sénateurs le mariage avec les femmes qui avoient été affranchies ou qui s'étoient produites sur le théâtre; et, du temps d'Ulpien (5), il étoit défendu aux ingénus d'épouser des femmes qui avoient mené une mauvaise vie, qui étoient montées sur le théâtre, ou qui avoient été condamnées par un jugement public. Il falloit que ce fût quelque sénatus-consulte qui eût établi cela. Du temps de la république, on n'avoit guere fait de ces sortes de lois, parceque les

(1) Voyez Suétone, Vie de Claude, ch. XXIII; et les Fragm. d'Ulpien, tit. XVI, §. 3.-(2) Dión, liv. LIV; Fragm. d'Ulp., tit. XIII.—(3) Harangue d'Auguste, dans Dion, liv. LVI.—(4) Fragm. d'Ulpien, ch. XIII; et la loi XLIV, au ff. de ritu nuptiarum, à la fin.-(5) Voyez les Fragm. d'Ulpien, tit. XIII

et XVI.

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censeurs corrigeoient à cet égard les désordres qui naissoient, ou les empêchoient de naître. Constantin (1) ayant fait une loi par laquelle il comprenoit dans la défense de la loi Pappienne non seulement les sénateurs, mais encore ceux qui avoient un rang considérable dans l'état, sans parler de ceux qui étoient d'une condition inférieure ; cela forma le droit de ce temps-là: il n'y eut plus que les ingénus` compris dans la loi de Constantin à qui de tels mariages fussent défendus. Justinien (2) abrogea encore la loi de Constantin, et permit à toutes sortes de personnes de contracter ces mariages: c'est par-là que nous avons acquis une liberté si triste.

Il est clair que les peines portées contre ceux qui se marioient contre la défense de la loi étoient les mêmes que celles portées contre ceux qui ne se marioient point du tout. Ces mariages ne leur donnoient aucun avantage (3) civil: la dot (4) étoit caduque (5) après la mort de la femme.

Auguste ayant adjugé au trésor (6) public" les successions et les legs de ceux que ces lois en déclaroient incapables, ces lois parurent

(1) Voyez la loi I, au cod. de nat. lib.--(2) Novelle 117.-(3) Loi XXXVII, ff. de oper. libert., S. 7; Fragm. d'Ulpien, tit. XVI, §. 2.- -(4) Fragm. ibid. (5) Voyez ci-après le ch. XIII du liv. XXVI.

-(6) Excepté dans de certains cas. Voyez les Fragm. d'Ulpien, tit. XVIII; et la loi unique, au cod. de caduc. tollend.

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