Page images
PDF
EPUB

n'avoient point d'enfants n'en recevoient que la moitié (1). Les Romains, dit Plutarque (2), se marioient pour être héritiers, et non pour avoir des héritiers.

[ocr errors]

Les avantages qu'un mari et une femme pouvoient se faire par testainent étoient limités par la loi. Ils pouvoient se donner le tout (3) s'ils avoient des enfants l'un de l'autre ; s'ils n'en avoient point, ils pouvoient recevoir la dixieme partie de la succession à cause du mariage; et, s'ils avoient des enfants d'un autre mariage, ils pouvoient se donner autant de dixiemes qu'ils avoient d'enfants.

Si un mari s'absentoit (4) d'auprès de sa femme pour autre cause que pour les affaires de la république, il ne pouvoit en être l'héritier.

La loi donnoit à un mari ou à une femme qui survivoit deux ans (5) pour se remarier

[ocr errors]

(1) Sozom, liv. I, ch. IX, et leg. unic. cod. Theod. de infirmis panis cælib. et orbitat.—(2) OEuvres morales, De l'amour des perés envers leurs enfants. -(3) Voyez un plus long détail de ceci dans les Fragm. d'Ulpien, tit. XV et XVI. (4) Fragm. d'Ulpien, tit. XVI, §. 1.—(5)Ib. tit. XIV. Il paroît queles premieres lois Juliennes donnerent trois ans. Harangue d'Auguste, dans Dion, liv. LVI; Suétone, Vie d'Auguste, ch. XXXIV. D'autres lois Juliennes n'accorderent qu'un an: enfin, la loi Pappienne en donna deux. Fragm. d'Ulpien, tit. XIV. Ces lois n'étoient point agréables au peuple, et Auguste les tempéroit ou les roidissoit selon qu'on étoit plus ou moins disposé à les souffrir.

et un an et demi dans le cas du divorce. Les peres qui ne vouloient pas marier leurs enfants ou donner de dot à leurs filles y étoient contraints par les magistrats (1).

On ne pouvoit faire de fiançailles lorsque le mariage devoit être différé de plus de deux ans (2); et, comme on ne pouvoit épouser une fille qu'à douze ans, on ne pouvoit la fiancer qu'à dix. La loi ne vouloit pas que l'on pût jouir inutilement (3) et sous prétexte de fiançailles des privileges des gens mariés..

Il étoit défendu à un homme qui avoit soixante ans (4) d'épouser une femme qui en avoit cinquante. Comme on avoit donné de grands privileges aux gens mariés, la loi ne vouloit point qu'il y eût de mariages inutiles. Par la même raison, le sénatus-consulte calvisien déclaroit illégal (5) le mariage d'une femme qui avoit plus de cinquante ans avec un homme qui en avoit moins de soixante; de sorte qu'une femme qui avoit cinquante ans ne pouvoit se marier sans encourir les peines de ces lois. Tibere ajouta (6) à la rigueur de la loi Pappienne, et défendit à un homme de soixante ans d'é

(1) C'étoit le trente-cinquieme chef de la loi Pappienne, leg. XIX, ff. de ritu nuptiarum.—(2) Voyez Dion, liv. LIV, anno 736; Suétone, in Octavio, ch. XXXIV.-(3) Voyez Dion, liv. LIV; et, dans le même Dion, la harangue d'Augustė, liv. LVI.(4) Fragm. d'Ulpien, tit. XVI; et la loi XXVII, cod. de nuptiis.-(5) Fragni. d'Ulpien, tit. XVI, §. 3.-(6) Voyez Suétone, in Claudio, ch. XXIII. 19

ESPR. DES LOIS. 3.

[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]

« Pendant que les maladies et les guerres << nous enlevent tant de citoyens, que deviendra <«< la ville si on ne contracte plus de mariages? « La cité ne consiste point dans les maisons, les «portiques, les places publiques; ce sont les hommes qui font la cité. Vous ne verrez point,' «< comme dans les fables, sortir des hommes de «dessous la terre pour prendre soin de vos affaires. Ce n'est point pour vivre seuls que « vous restez dans le célibat: chacun de vous a « des compagnes de sa table et de son lit, et << vous ne cherchez que la paix dans vos déréglements. Citerez-vous ici l'exemple des vier<< ges vestales? Donc, si vous ne gardiez pas « les lois de la pudicité, il faudroit vous punir << comme elles. Vous êtes également mauvais citoyens, soit que tout le monde imite votre exemple, soit que personne ne le suive. Mon unique objet est la perpétuité de la républi«que. J'ai augmenté les peines de ceux qui « n'ont point obéi; et, à l'égard des récom« penses, elles sont telles que je ne sache pas que la vertu en ait encore eu de plus grandes: << il y en a de moindres, qui portent mille gens à exposer leur vie ; et celles-ci ne vous engage<< roient pas à prendre une femme et à nourrir « des enfants! >>

[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]

Il donna la loi qu'on nomma de son nom Julia, et Pappia Poppœa, du nom des consuls (1) d'une partie de cette année-là. La gran

(1) Marcus Pappius Mutilus, et Q. Poppens Sa

deur du mal paroissoit dans leur élection même. Dion (1) nous dit qu'ils n'étoient point mariés, et qu'ils n'avoient point d'enfants.

Cette loi d'Auguste fut proprement un code de lois et un corps systématique de tous les réglements qu'on pouvoit faire sur ce sujet. On y refondit les lois Juliennes (2), et on leur donna plus de force: elles ont tant de vues, elles influent sur tant de choses, qu'elles forment la plus belle partie des lois civiles des Romains.

On en trouve (3) les morceaux dispersés dans les précieux Fragments d'Ulpien; dans les lois du Digeste, tirées des auteurs qui ont écrit sur les lois Pappiennes; dans les historiens et les autres auteurs qui les ont citées; dans le code Théodosien qui les a abrogées; dans les peres qui les ont censurées, sans doute avec un zele louable pour les choses de l'autre vie, mais avec très peu de connoissance des affaires de celle-ci.

Ces lois avoient plusieurs chefs, et l'on en connoît trente-cinq (4). Mais, allant à mon sujet le plus directement qu'il me sera possible, je commencerai par le chef qu'Aulu-Gelle (5) nous dit être le septieme, et qui regarde les

binus. Dion, liv. LVI.—(1) Liv. LVI.—(2) Le titre XIV des Fragments d'Ulpien distingue fort bien la loi Julienne de la Pappienne.—(3) Jacques Godefroi en a fait une compilation.-(4) Le trente-cinquieme est cité dans la loi XIX, ff. de ritu nuptiarum.— (5) Liv. II, ch. XV.

honneurs et les récompenses accordés par cette loi.

Les Romains, sortis pour la plupart des villes latines, qui étoient des colonies lacédémoniennes (1), et qui avoient même tiré de ces villes (2) une partie de leurs lois, eurent, comme les Lacédémoniens, pour la vieillessè ce respect qui donne tous les honneurs et toutes les préséances. Lorsque la république manqua de citoyens, on accorda au mariage et au nombre des enfants les prérogatives que l'on avoit données à l'âge (3); on en attacha quelques unes au mariage seul, indépendamment des enfants qui en pourroient naître : cela s'appeloit le droit des maris. On en donna d'autres à ceux qui avoient des enfants, de plus grandes à ceux qui avoient trois enfants. Il ne faut pas confondre ces trois choses. Il y avoit de ces privileges dont les gens mariés jouissoient toujours, comme par exemple une place particuliere au théâtre (4); il y en avoit dont ils ne jouissoient que lorsque des gens qui avoient des enfants ou qui en avoient plus qu'eux ne les leur ôtoient pas.

Ces privileges étoient très étendus. Les gens mariés qui avoient le plus grand nombre d'en

(1) Denys d'Halicarnasse. -(2) Les députés de Rome qui furent envoyés pour chercher des lois grecques allerent à Athenes et dans les villes d'Italie. -(3) Aulu-Gelle, liv. II, ch. XV.—(4) Suétone, in Augusto, ch. XLIV.

« PreviousContinue »