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jamais pendant toute sa vie (1764). En 1737, il publia l'Histoire de la constitution Unigenitus, qui fit beaucoup de bruit. Outre cet ouvrage, on lui doit une Vie de Clément XI, des Sermons, des Conférences pour les missions, etc.

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Jean-François Godescard, né l'an 1728, à Roquemont, diocèse de Rouen, et mort à Paris en 1800, a laissé, parmi plusieurs ouvrages estimables, les Vies des Pères, des martyrs et des principaux saints, traduites de l'anglais Butler; c'est un livre aussi édifiant qu'instructif.

J.-B. Du Halde (1674-1743), Jésuite, composa, sur les mémoires de ses confrères, la Description géographique, historique, chronologique, polirique el physique de la Chine, en 4 vol. in-folio, cartes et figures. Cet ouvrage est ce que nous avions de plus complet, de plus exact et de mieux rédigé sur ce vaste empire, avant qu'on en publiât l'Histoire générale, traduite du texte chinois par le Père du Mailla. Le style en est simple, judicieux, coulant, tel que l'exigeait le genre. On pourrait néanmoins y désirer quelquefois plus d'ordre et de critique.

Du Halde a travaillé aussi au recueil des Lettres édifiantes et curieuses (26 vol. in-12), écrites des missions étrangères, où, parmi les récits propres à intéresser la piété, on trouve des détails de géographie, de physique, d'astronomie, d'histoire naturelle, dignes de l'attention des curieux et des savants. Ces Lettres ont été continuées par l'abbé de La Marche.

François-Xavier de Charlevoix, Jésuite, né l'an 1682 à Saint-Quentin, après avoir passé plusieurs années aux missions du Canada, revint en France, y travailla vingt-deux ans au journal de Trévoux, et mourut en 1766, laissant d'estimables travaux historiques, tels que :

1° Histoire et description du Japon, qui renferme ce que l'ouvrage de Kompfer contient de plus intéressant, avec de nouveaux documents tirés des manuscrits et des relations des missionnaires de son ordre.

2o Histoire de l'Ile espagnole ou de Saint-Domingue, rédigée sur les Mémoires manuscrits du Père Le Pers. Elle ne traite que des affaires civiles et militaires.

3o Histoire de la Nouvelle-France, en 3 vol. dont les deux premiers contiennent l'histoire de tous les établissements français dans l'Amérique septentrionale, et le troisième, le journal de son voyage, entremêlé de récits sur les mœurs des sauvages.

40 Histoire du Paraguay. Elle est écrite d'un style trop lâche et trop . prolixe.

Madame Philipon-Roland naquit à Paris en 1756 d'un graveur, revendeur de bijoux. Elevée au milieu des beaux-arts, des tableaux, des livres et de la musique, elle aspira dès son jeune âge à un rang que sa condition et son manque de fortune semblaient lui refuser. Une imagination vive et un cœur ardent donnèrent d'ailleurs à son caractère une tournure singulière, tandis que son esprit, nourri des lectures les plus propres à l'en. flammer, la porta à cet amour pour la philosophie et pour l'indépendance qui causèrent sa perte et celle de son époux. Elle se vante d'avoir voulu, à l'âge de neuf ans, analyser Plutarque, et à seize ans, elle avait, dit-elle, une érudition assez étendue, se connaissait en peinture, et était une excellente musicienne. Roland, ayant fait sa connaissance, fut enchanté de son esprit lui adressa ses Lettres sur la Suisse, l'Italie, etc., et l'épousa en 1780: il

était alors inspecteur des manufactures. Sa femme le suivit à Amiens, où elle cultiva la botanique, et composa un herbier des plantes de la Picardie. Mme Roland fit ensuite des voyages en Suisse et en Angleterre, porta son attention sur ces deux gouvernements, en analysa l'esprit et se passionna dès lors pour les principes de liberté qui en formaient la base. La Révolution arriva, et Mme Roland crut y voir un moyen d'introduire en France ces mêmes principes qu'elle avait tant admirés. Elle ne tarda pas à faire partager ses opinions à son époux, sur lequel elle avait un empire absolu. Ils se trouvaient à Lyon, et se rangèrent aussitôt du côté des innovateurs. Quoique Mme Roland ne pût se dissimuler que les talents de son mari ne pouvaient guère s'étendre au delà de ce qui concernait l'industrie commerciale, elle sut lui persuader qu'il pouvait prétendre à une place plus éminente dans la société ; et lui-même crut agir par ses propres moyens, tandis qu'il n'agissait qu'en second, et par l'impulsion et les conseils de sa femme. Elle parvint à le faire nommer par la ville de Lyon député aux états généraux, afin d'obtenir un secours pour le payement des dettes de cette ville. Transportée sur le grand théatre de la capitale, Mme Roland s'empressa d'y jouer le rôle auquel elle aspirait depuis longtemps. Aussi reçut-elle dans sa maison tous les chefs du parti populaire, et les députés de la Gironde les plus en crédit, comme Brissot, Barbaroux, Louvet, Clairière, Vergniaud, etc. Ces législateurs orgueilleux, cédant à l'empire d'une femme, écoutaient avec déférence les avis de Mme Roland, qui devint l'âme de leurs délibérations. Elle était le principal ressort qui les dirigeait, et la puissance secrète d'où émanaient les innovations qui préparèrent tant de inaux à la France. Avec de tels amis, elle n'eut pas de peine à faire nommer son époux au ministère de l'intérieur; mais elle trouva là un écueil où échouèrent ses talents, qui n'étaient pas ceux de diplomate et de publiciste. Roland, conduit par les conseils de sa femme, ne fit que des fautes tout en humiliant la cour, il indisposa les Jacobins, dont il avait été le collègue, et ne fit rien de remarquable pour le parti de la Gironde. Il était connu que Mme Roland contribuait beaucoup à la rédaction de tous les actes et projets de ce ministre. Elle ne le dissimula pas dans ses Mémoires : « S'il eût fait des homélies, disait-elle, j'en aurais composé. » Quand il fut rappelé au ministère par l'assemblée législative, Danton s'écria: «Si l'on fait une invitation à monsieur, il en faut faire une aussi à madame. Nous avons besoin d'hommes qni voient autrement que par les yeux de leurs femines. » Son époux étant devenu ministre une seconde fois, Mme Roland s'attacha exclusivement au parti des Girondins, et fit commettre à cet époux imprudent et docile de nouvelles fautes que ses ennemis ne tardèrent pas à relever. Dan s les libelles qu'on lançait sur lui, on n'épargnait pas sa femme: elle fut même l'objet d'une dénonciation qui lui procura l'occasion de faire briller son éloquence. Elle parut à la barre de la Convention le 7 décembre 1792, prononça un long discours et parvint à déjouer les projets de ses accusateurs. Cependant le parit que Mme Roland suivait fut écrasé par les Jacobins, et son mari, impliqué dans la proscription des députés de la Gironde, le 31 mai 1793, fut contraint de se sauver en Normandie. Elle crut pouvoir rester dans la capitale, quoiqu'elle ne dût pas ignorer que ses liaisons avec les Girondins, son influence sur les députés, et plus particulièrement encore celle qu'elle exerçait sur son mari, étaient publiquement connues. Son imprudence lui devint funeste. Arrêtée, et enfermée à Sainte-Pélagie, Mme Roland réclama contre cet acte, mais inutilement. Après cinq mois de captivité, elle fut transférée à la Conciergerie, et traduite devant le tribunal révolutionnaire, qui la condanna à mort, comme ayant conspiré contre

l'unité et l'indivisibilité de la république. Elle subit son interrogatoire et entendit son arrêt avec un courage stoïque. Ne voulant pas mourir comme une femme ordinaire, elle marcha à la mort avec l'ironie et le dédain sur les lèvres. Arrivée à la place Louis XV, elle s'inclina devant la statue de la liberté, et s'écria : « O liberté, que de crimes on commet en ton nom ! « Sa gaieté sembla s'animer à la vue de son supplice, et fit même sourire une victime assise à ses côtés. Avant de recevoir le coup fatal, elle annonça que son mari ne pourrait pas lui survivre. Elle fut exécutée le 18 novembre 1793, à l'âge de 39 ans. Madame Roland, quoiqu'elle eût renoncé à tout sentiment de religion, comme elle s'en vante dans ses Mémoires, passait pour avoir des mœurs pures, et parle souvent de l'innocence de sa vie. Elle avait beaucoup de sagacité dans l'esprit, un goût déterminé pour le sarcasme et la satire, et portait ses idées d'indépendance jusqu'à l'exagération. Si elle s'était bornée à briller par des vertus domestiques, et à occuper uniquement la place que lui avaient assignée le sort et la nature, son exemple serait devenu utile à la société. Mais elle voulut être à la fois écrivain, philosophe et publiciste; et son ambition la perdit, en perdant son époux, qui jouissait d'ailleurs d'une réputation bien acquise, dans une sphère plus étroite, mais moins dangereuse. Elle se jeta dans les partis, et ne vit plus dans les députés de la Gironde qu'autant de héros et d'hommes supérieurs dignes seuls de régénérer la France. On dit que Mme Roland avait un cœur sensible; nous ne réfutons pas cette opinion: cependant les malheurs de la famille royale, et de tant de victimes que fit la Gironde, la trouvèrent indifférente. Il n'y a pas un mot, dans ses Mémoires, sur le sort funeste de Louis XVI, et elle ne se plaignit que quand son parti commença à devenir victime de ses déplorables innovations. Mme Roland, sans être belle, avait une figure douce et pleine d'expression; de grands yeux noirs animaient une physionomie peu régulière, mais agréable; sa voix était sonore et flexible, et elle en parle avec complaisance dans ses Mémoires. Elle a laissé plusieurs écrits: 1o des Opuscules sur la mélancolie, sur l'âme, la morale, la vieillesse, l'amitié, l'amour, la retraite et sur Socrate; 2° Voyages en Angleterre et en Suisse. Ces ouvrages ont été réunis à ses Mémoires, qu'elle écrivit en prison, et qui traitent de sa vie privée, du ministère de son mari et de son arrestation, etc.; ils furent publiés d'abord par M. Bosc, après la terreur, et ensuite par M. Champagneux, Paris, 3 vol. in-8. En général, le style de Mme Roland eet incorrect, quelquefois élégant, souvent diffus, mais presque toujours énergique. Ses Mémoires sont peut-être son ouvrage le moins bien écrit, à cause de la position difficile où elle se trouvait dans ce moment. Elle y parle en politique avec un ton bien plus décidé que ne le faisaient Pitt, Fox, Burke et Mirabeau, et se plaît surtout à parler d'ellemême, et à faire l'éloge autant de ses opinions que de son courage. Quoiqu'ils soient curieux et intéressants, ils laissent néanmoins une impression pénible par le ton qui y règne, l'exagération des sentiments, et l'absence de cette délicatesse et de cette réserve qu'une femme ne méprise pas impuņé

ment.

Madame Necker naquit vers 1746, à Genève, de M. Naas, ministrę protestant, pauvre, mais qui fit donner à sa fille une éducation très-soignée. Mademoiselle Naas acquit un grand nombre de connaissances, 'se chargea de l'instruction d'une jeune demoiselle de Genève, qu'elle quitta pour épouser Necker, qui n'était qu'un simple commis, et elle suivit constamment la fortune de son époux. Madame Necker avait un caractère affable, bienfaisant, et, d'après l'opinion publique, elle ne se servit de son pouvoir

que pour faire du bien; elle donna beaucoup de soins à l'amélioration du régime intérieur des hôpitaux, et établit, à ses frais, près de Paris, un hospice qu'elle dirigeait elle-même. Madame Necker avait les faiblesses de la plupart des personnes instruites, des prétentions à l'esprit; mais elle avait néanmoins la modération de ne pas choquer les opinions des autres; épouse d'un ministre et amie des lettres, on ne saurait l'accuser ni d'orgueil ni de pédantisme. Elle avait une autre qualité rare parmi les personnes de son sexe qui ont reçu une brillante éducation : elle n'humiliait pas l'amour-propré des autres femmes par ce ton de supériorité qui décèle les petitesses de la vanité; cependant le désir de jouer un rôle augmenta.sa renommée, en diminuant son bonheur. Madame Necker eut beaucoup d'amis parmi les gens de lettres, et fut très-liée avec Thomas et Buffon. Elle appelait le premier, et avec assez de justesse, l'homme du siècle, et le second l'homme des siècles. Thomas lui adressa des vers, et dans l'Essai sur les femmes, il fit indirectement son éloge. Elle accompagna son mari dans sa retraite à Copet, où elle mourut en 1796. On lui doit : 1o Des inhumations précipitées, 1798; 2o Mémoire sur l'établissement des hospices, in-8°; 3o Réflexions sur le divorce, 1798, in-8°. Quoique née dans une religion qui permet le divorce, elle n'en défend pas moins l'indissolubilité du mariage, et elle soutient son opinion avec autant de force que de sensibilité. 4° Mélanges extraits des manuscrits de madame Necker, 1798, 3 vol. in-8°, qu'on a publiés après la mort de l'auteur. On trouve dans ses écrits, à travers quelques défauts, des idées justes, de beaux tableaux et des conseils sages. ÉRUDITS, TRADUCTEURS, COMPILATEURS.

Furgault.

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La Porte. Du Theil.- Gédoyn. Clavier. Auger.
Dussaulx.

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Brumoy.

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- Lemonnier. - La Bletterie.

Mirabaud.

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Lagrange.

Du Resnel. Dupré de Saint-Maur.

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Nicolas Furgault, né l'an 1706, à Saint-Urbain, près de Joinville, publia, en 1746, un Nouvel abrégé de la Grammaire grecque, dont l'Université fit constamment usage jusqu'au moment de sa suppression. Il en fut de même à l'égard de la prosodie latine, qu'il donna sous le titre d'Abrégé de la quantité. On doit encore à Furgault un Dictionnaire d'antiquités grecques et romaines, un Dictionnaire géographique, historique et mythologique, etc. Tous les ouvrages de Furgault, mort en 1795, ont été surpassés par d'autres semblables.

Pierre Brumoy, né à Rouen, en 1688, Jésuite en 1704, se fit connaître d'abord par des Pensées sur la décadence de la poésie latine, insérées dans les Mémoires de Trévoux. Des travaux plus considérables l'occupèrent ensuite. A l'étude des lettres il joignit celle des mathématiques, qu'il professa même pendant six ans. Il mourut en 1742. Ses principaux ouvrages sont : 1o La Vie de l'impératrice Eléonore, biographie très-édifiante, qui n'est traitée que sous le rapport religieux.

2o L'Apologie des Anglais et des Français, ou Observations sur le Livre de Murat intitulé: Lettres sur les Anglais et les Français, ouvrage fait en société avec Desfontaines.

3o L'Examen du Poëme de la grace, avec les R. P. Pongnant et Rouillé. 4o Le Théatre des Grecs, contenant des traductions et des analyses, des discours et des remarques sur le théâtre grec. Cet ouvrage est plein d'érudition; mais on y désirerait plus de précision et de simplicité dans le style et, dans les traductions, une exactitude égale à leur élégance. On peut lui reprocher aussi, sinon son admiration pour le théâtre grec, au moins trop de penchant à déprimer le nôtre.

5o Recueil de diverses pièces en prose et en vers. On y trouve deux poëmes latins le premier sur les passions, plein d'imagination et de poésie, et recommandable par l'élégance comme par la pureté du style; le second, sur la Verrerie, qui présente des fictions ingénieuses et de beaux vers. A la suite de ces deux poëmes, que l'auteur a traduits en une prose très-inférieure à ses vers, sont des discours, des épîtres, des tragédies, Isaac, Jonathas, et le Couronnement de David; des comédies, la Boite de Pandore et Flutus, pièces qui prouvent, dit Voltaire, qu'il est plus aisé de traduire et de louer les anciens que d'égaler, par ses propres productions, les grands modèles. 6o Le 11o et le 12 volume de l'Histoire de l'Eglise gallicane, que les R.P. de Longueval et de Fontenay avait conduite jusqu'au 10e volume inclusi

vement.

Le travail du P. Brumoy ne vaut pas celui de ses devanciers.

Guillaume de Rochefort, natif de Lyon (1731-1788), a donné la traduction en vers de l'Iliade et de l'Odyssée, où il a prouvé, par des discours préliminaires, qu'il était plus fait pour commenter savamment les anciens que pour les traduire avec bonheur; en général, son style est traînant et diffus. On lui doit encore la traduction complète du Théâtre de Sophocle, version estimée, avec des notes pleines de goût, de critique et de littérature; quelques tragédies (Ulysse, Electre), qui n'eurent point de succès, et plusieurs Mémoires importants dans le recueil de l'Académie des inscriptions.

Paul-Jérémie Bitaubé, né l'an 1732, à Koenigsberg, d'une famille de réfugiés français, se passionna de bonne heure pour le barde ionien. Dès 1762, il donna une Traduction abrégée de l'Iliade, qui devint, en 1780, une traduction complète. L'Odyssée parut cinq ans après. Cette traduction a beaucoup de naturel et d'élégance; elle se fait lire avec une extrême intérêt ; mais elle est en prose, et quelle prose peut rendre une telle poésie !

On retrouve, dans le poëme de Joseph, 1767, un homme nourri de la Bible, d'Homère et de tous les classiques grecs ou latins. Cet ouvrage n'est pas sans unļcertain mérite de composition; il y règne un fonds de sentiments tendres et religieux qui touchent; mais on y trouve quelques scènes de volupté, dont les couleurs vives et transparentes peuvent altérer l'innocence des jeunes lecteurs. Les Bataves, autre poëme en prose, parurent en 1796, sous les auspices de la révolution française. Une composition raisonnable, mais à peu près historique et froide comme la Pharsale, des pensées élevées, quelques beautés de détail, l'amour de l'humanité, tels sont les seuls titres de cet ouvrage.

On doit encore à Bitaubé;

1o La traduction d'Hermann et Dorothée, de Goethe, qu'il ose comparer aux poëmes d'Homère.

2o L'Examen de la Profession du vicaire savoyard.

3o De l'Influence des Belles-Lettres sur la Philosophie.

Bitaubé mourut en 1808, membre de l'Institut.

Pierre-Henri Larcher, natif de Dijon (1726), aussi passionné pour l'an

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