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» d'un témoin, quelquefois d'un enfant, » quelquefois d'un efclave, fuffifoit; fur» tout contre les riches, & contre ceux » qui étoient de la faction des verds ».

Il eft fingulier que parmi nous trois crimes, la magie, l'héréfie & le crime contre nature; dont on pourroit prouver du premier qu'il n'existe pas; du fecond, qu'il eft fufceptible d'une infinité de diftinctions, interprétations, limitations; du troifieme, qu'il eft trèsfouvent obfcur, aient été tous trois punis de la peine du feu.

Je dirai bien que le crime contre nature ne fera jamais dans une fociété de grands progrès, fi le peuple ne s'y trouve porté d'ailleurs par quelque coutume, comme chez les Grecs,où les jeunes gens faifoient tous leurs exercices nuds; comme chez nous,oùl'éducation domestique eft hors d'ufage; comme chez les Afiatiques, où des particuliers ont un grand nombre de femmes qu'ils méprifent, tandis que les autres n'en peuvent avoir. Que l'on ne prépare point ce crime qu'on le profcrive par une police exacte, comme toutes les violations des mœurs; & l'on verra foudain la nature, ou défendre fes droits, ou les reprendre.

Douce, aimable, charmante, elle a répan du les plaifirs d'une main libérale; & en nous comblant de délices, elle nous prépare, par des enfans qui nous font, pour ainfi dire, renaître, à des fatisfactions plus grandes que ces délices mêmes.

CHAPITRE VII.
Du crime de lefe-majefté.

Es lois de la Chine décident, que

Lquiconque manque de respect à

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l'empereur, doit être puni de mort. Comme elles ne définiffent pas ce que c'eft que ce manquement de refpect tout peut fournir un prétexte pour ôter la vie à qui l'on veut, & exterminer la famille que l'on veut.

Deux perfonnes chargées de faire la gazette de la cour, ayant mis dans quelque fait des circonftances qui ne fe trouverent pas vraies; on dit que, mentir dans une gazette de la cour, c'étoit manquer de refpe&t à la cour; & on les fit mourir (a). Un prince du fang ayant mis quelque note par mégarde fur un mémorial figné du pinceau rouge par (a) Le P. du Halde, tome I. p. 43.

l'empereur, on décida qu'il avoit man→ qué de refpect à l'empereur; ce qui caufa, contre cette famille, une des terribles perfécutions dont l'hiftoire ait jamais parlé (a).

C'eft affez que le crime de lese-majefté foit vague, pour que le gouvernement dégénere en defpotifme. Je m'étendrai davantage là-deffus dans le livre de la compofition des lois.

(a) Lettres du P. Parennia, dans les lettres édif

CHAPITRE VIII.

De la mauvaife application du nom de crime de facrilege & de lefe-majefté.

C

de

'EST encore un violent abus, nom donner le nom de crime de lefemajesté à une action qui ne l'eft pas. Une loi des empereurs (4) poursuivoit comme facrileges ceux qui mettoient en queftion le jugement du prince, & doutoient du mérite de ceux qu'il avoit choifis pour quelque emploi (c). Ce

(b) Gratien, Valentinien & Théodofe. C'eft le: troifieme au code de crimin. facril.

(c) Sacrilegii inftar eft dubitare an is dignus fit quem alegerit imperator, ibid. Cette loi a fervi de modele à selle de Roger, dans les conftitutions de Naples, til 4*

furent bien le cabinet & les favoris qui établirent ce crime. Une autre loi avoit déclaré que ceux qui attentent contre les miniftres & les officiers du prince font criminels de lefe-majefté, comme s'ils attentoient contre le prince même (a). Nous devons cette loi à deux princes (b) dont la foibleffe eft célebre dans l'hiftoire, deux princes qui furent menés par leurs miniftres, comme les troupeaux font conduits par les pafteurs; deux princes efclaves dans le palais enfans dans le confeil, étrangers aux armées ; qui ne conferverent l'empire que parce qu'ils le donnerent tous les jours. Quelques-uns de ces favoris confpirerent contre leurs empereurs. Ils firent plus: ils confpirerent contre l'empire, ils yappellerent les barbares: & quand on voulut les arrêter, l'état étoit fi foible, qu'il fallut violer leur loi, & s'expofer au crime de lefe-majefté pour les punir.

C'est pourtant fur cette loi que fe fondoit le rapporteur de M. de Cinq Mars (c) lorfque, voulant prouver qu'il

(a) La loi cinquieme, au code ad leg. Jul. maj« (b) Arcadius & Honorius.

(c) Mémoires de Montréfor, tom. I.

étoit coupable du crime de lefe-majeste pour avoir voulu chaffer le cardinal de Richelieu des affaires, il dit : « Le » crime qui touche la perfonne des » miniftres des princes, eft réputé, » par les conftitutions des empereurs, » de pareil poids que celui qui tou» che leur perfonne. Un miniftre fert » bien fon prince & fon état; on l'ôte » à tous les deux ; c'eft comme fi l'on » privoit le premier d'un bras (a), & » le fecond d'une partie de fa puif

fance ». Quand la fervitude ellemême viendroit fur la terre, elle ne parleroit pas autrement.

Une autre loi de Valentinien, Théo dofe & Arcadius (b), déclare les fauxmonnoyeurs coupables du crime de lefe-majefté. Mais, n'étoit-ce pas confondre les idées des chofes ? Porter fur un autre crime le nom de lefe-majesté n'eft-ce pas diminuer l'horreur du crime de lefe-majefté?

(a) Nam ipfi pars corporis noftri funt. Même loi au code ad leg. Jul. maj.

(b) C'eft la neuvieme au code Théod, de falsâ thonsta

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