Page images
PDF
EPUB
[ocr errors]

que tous ces anciens ont eu grandement raifon de prendre les Rois pasteurs pour les Hébreux. Rappellez-vous le dévoilement de SALATIS & de RAMESÈS. Or, Manéthon, avant M. l'abbé du Rocher, avoit confondu, & à jufte titre, ces Rois pafieurs avec les Hébreux; celui-ci n'a donc pas rêvé les rapports qui exiftoient entre l'hif toire Egyptienne & celle des Hébreux. Ainfi voilà un prêtre Egyptien qui indiquant à M. l'abbé du Rocher, les ruines de ce fuperbe & antique édifice, l'invitoit à les déblayer & à y fouiller.

3. Pluche convient que les commencemens des hiftores anciennes, & nommément ceux de l'hiftoire d'Egypte, font couverts de ténebres & fur-tout chargés de fables imaginées pour remplacer les hifloires perdues. Ce fait n'eft-il pas une des bafes fur lesquelles porte l'ouvrage de M. l'abbé du Rocher?

4. Pluche, il eft vrai, n'eft pas de l'avis de Manéthon & des autres qui prennent les Hébreux pour les Rois pafteurs, parce que ces auteurs, dit-il, fe fondent fur des conjectures, & ne s'appuient d'aucuns monumens juftificatifs. Mais fi Pluche eût vécu jufqu'à ce moment, l'ouvrage de M. du Rocher dont il auroit eu connoiffance, lui auroit montré ces monumens juftificatifs dont il croyoit qu'étoit dénué le témoignage de Manéthon, & l'auroit convaincu, que fi les Hébreux n'ont pas regné en Egypte, les Egyptiens, par une fuite des méprifes les

plus fingulieres, ont métamorphofé ces mêmes Hébreux en fouverains qu'ils ont fait regner en Egypte. L'Hiftoire véritable eût donc ramené le favant Pluche à une découverte dont il s'écartoit d'une part, & dont le rapprochoit de l'autre, malgré fes préjugés fur les Rois pafteurs, l'aveu qu'il faifoit de l'altération de l'hiftoire Egyptienne. Les grandes lumieres qu'il avoit fur l'antiquité auroient puiffamment contribué à cette heureuse révolution, dans fa maniere d'envisager l'hiftoire d'Egypte. On en peut juger par le fuccès avec lequel il explique, à l'aide de la langue hébraïque, grand nombre de fables anciennes dans fon hif toire du Ciel, quoique fon opinion fur la fource de l'idolatrie & de la théogonie païenne, qu'il attribue à l'abus de l'Ecriture fymbolique, ne foit regardée que comme un pur fyftême. D'après le goût de cet écrivain pour les antiquités, & d'après l'inftinct qui l'a fait prefque toucher à la découverte de M. l'abbé du Rocher, même en contredifant Manéthon, je crois pouvoir comparer Pluche à un homme qui eft affis immédiatement devant un rideau, derriere lequel font cachés des perfonnages très-curieux à voir, & qui, par le mouvement & l'inquiétude de fon corps, agite ce voile, fans penfer à le foulever.

Mais à quoi bon, Monfieur, toutes ces inductions, pour vous montrer que la trempe des idées de Pluche fe concilioit avec la découverte de l'auteur de l'Hiftoire vérita

ble? Afin que vous ne me reprochiez pas de n'interpréter les fentimens du premier, que fur de légeres préfomptions, je vais mettre fous vos yeux une de ces réflexions décifives par laquelle il préludoit à la découverte de M. l'abbé du Rocher. Ouvrez l'hiftoire du Ciel à la page 253, tom. I, où en accufant les Egyptiens d'avoir eu des idées bifarres & contraires à la vérité de l'hiftoire, l'auteur s'exprime ainfi : DANS CET ÉPOUVANTABLE AMAS De pensées, ET D'OBJETS SI MAL LIÉS, IL SE TROUVE DES TRACES DE VÉRITÉS, ET une conFORMITÉ SENSIBLE AVEC LE FONDS DE L'HISTOIRE-SAINTE.

Décidez maintenant, Monfieur, fi M. l'abbé du Rocher n'a pas droit de revendiquer Pluche comme un des précurfeurs de fa découverte. C'est donc un témoin de plus en faveur de l'Hiftoire véritable, qui déjà comptoit Rollin parmi fes partifans.

A ces deux autorités je puis ajouter celle de Dom Calmet. Vous le favez, il ne paffa jamais pour un vifionnaire en matiere d'Ecriture-Sainte. Après avoir rapporté le paffage d'Hérodote où on lit le trait fuivant: que" dans ce tems (celui du roi Sethon) le foleil s'étoit levé quatre fois contre le cours ordinaire; il s'étoit levé, dit-il, deux fois où il fe couche maintenant, ,, & couché deux fois où il fe leve,, (Hérod. 11, 142), ce favant Bénédictin fait fur ce conte abfurde d'Hérodote une obfervation que nous ne croyons pas devoir laif

رو

[ocr errors]
[ocr errors]

fer

fer échapper ici. Si l'on y prend garde, dit Dom Calmet, cet auteur multiplie les objets. IL AUROIT PU DIRE fimplement, que le foleil eft retourné deux fois en arriere du couchant à l'orient, & ces deux prodiges NE POURROIENT-ILS PAS DÉSIGNER CEUX QUI ARRIVERENT SOUS JOSUE ET SOUS EZECHIAS (V. Differt. de Dom Calmet fur la rétrog. du foleil à l'Horloge d'Achaz)? Or, c'est ce même paffage de l'hiftorien grec qui a fervi à M. l'abbé du Rocher de terme de comparaison pour le parallele du grand changement arrivé dans le foleil fous Sethon, & du miracle de l'ombre du foleil, opéré fous Ezéchias. Il faut donc placer encore Dom Calmet dans la lifte des avant-coureurs destinés à annoncer la grande découverte de l'Hiftoire véritable.

Si vos préjugés, Monfieur, contre cet ouvrage, vous font déjà fupporter impatiemment de voir trois hommes tels que Rollin, Pluche & Dom Calmet, dont le mérite n'eft pas équivoque, dépofer (a)

(a) On pourroit encore citer fur cette matiere Mi auteur bien plus ancien, & d'une plus grande autorité que tous ceux que nous venons de nommer. Eufebe dans fon bel ouvrage de la Préparation Evangélique, où il combat l'idolâtrie, s'attache à montrer que les Grecs ont emprunté leurs fciences, & la plupart de leurs Dieux, des Egyp tiens, DONT L'HISTOIRE DANS CE QU'ELLE A DE VRAI, S'ACCORDE AVEC CELLE DE MOYSE. (V. la Notice de la vie, & des écrits d'Eufebe de Céfarée dans la Vie des Peres, & des Martyrs, ouvrage traduit de l'Anglois)

E

1

d'avance en faveur de M. l'abbé du Rocher, comment allez-vous traiter Camerarius, favant littérateur du 16e fiecle? Dans fa préface de la traduction d'Hérodote, dont il étoit grand admirateur, il fait obferver qu'une des raisons qui doit nous donner de cet hiftorien la plus haute idée, c'est qu'il n'est point d'auteur qui parle.... dans des termes fi approchans, quelquefois LES MÊMES, QUE CEUX DE L'ÉCRITURE, & que dans fon ouvrage on trouve cette fimplicité des premiers âges, cette maniere de vivre de plufieurs rois fans fufte & fans éclat QU'IL NOUS DÉCRIT COMME LE FAIT L'HISTOIRE SAINTE, au point que le ftyle d'Hérodote, dans une langue fi différente, IMITE LA SIMPLICITÉ ET LA BRIÉVETÉ DE L'HÉBREU, CE QUI LE DISTINGUE ENTRE TOUS LES ÉCRIVAINS GRECS.

[ocr errors]

En preuve de ce qu'il avance Camerarius cite des manieres de parler d'Hérodote, qui ont beaucoup de rapport avec celles de nos Livres faints.

Ce feroit une merveille affurément bien inouïe, qu'Hérodote eût employé des termes fort approchans, QUELQUEFOIS LES MÊMES QUE CEUX DE L'ÉCRITURE, que fon style eût la SIMPLICITÉ ET LA BRIÉVETÉ DE L'HÉBREU, enfin que les rois qu'il dépeint, euffent eu les mœurs patriarchales, qui font décrites dans l'Hiftoire fainte, fans que cet auteur eût eu quelque connoiffance de nos Livres faints. Le mer

« PreviousContinue »