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ment à Athenes fon hiftoire, & qu'elle reçut de fi grands applaudiffemens, qu'à chacun des neuf Livres dont elle étoit compofée, les Athéniens donnerent unanimement le nom d'une Mufe; tant ils furent épris de la douce éloquence de l'hiftorien. Rappellez-vous auffi que St. Paul, plufieurs fiecles après, parlant à ces mêmes Athéniens au milieu de l'Aréopage, leur annonça que la Divinité à laquelle ils offroient leur en& dont l'autel dreffé dans l'enceinte de leur ville, portoit cette infcription, Igmoto Deo, étoit le vrai Dieu auquel ils ne penfoient pas (a). Suppofez que, pour donner un plus grand développement au difcours du St. Apôtre, quelque chrétien favant dans les antiquités profanes, fût furvenu après St. Paul, & entrant dans la falle de l'Aréopage, leur eût ajouté que, quand ils crurent 500 ans avant n'avoir applaudi qu'à l'ouvrage de leur Hérodote, ils avoient dans le fonds donné leurs éloges à un Auteur divin qu'ils ne foupçonnoient pas, & dont les extraits avoient fervi de matériaux à la belle hiftoire qui faifoit l'objet de leur admiration, & qu'ainfi ils avoient encore sous cet autre rapport rendu anciennement hom

cydide qui affiftoit à cette lecture, en fut fi enchanté qu'il résolut d'écrire auffi une hiftoire. Nos lectures académiques produisent-elles le même enthousiasme? Les éloges hiftoriques qu'on débite au Louvre avec tant d'appareil & tant de fracas, ont-ils jamais électrifé l'efprit de nos Thucydide? (a) Act. xvij.

mage à ce Dieu inconnu, dont l'efprit a dicté nos Livres faints; jugez Monfieur, quel eût été l'étonnement des Athéniens à cette remarque neuve fur le plus éloquent de leurs hiftoriens!

Cette idée qui fe préfente ici fous ma plume, pourra vous paroître encore fingu liere; mais rien de plus fondé. Elle est une conféquence immédiate tirée de ce point de fait, que l'hiftoire d'Egypte par Hérodote, n'eft qu'une compilation traveftie de l'E criture. Or, cette hiftoire compose préci fément la feconde partie de l'ouvrage de l'écrivain Grec, tant applaudi par la délicate & ingénieufe Athenes,

Ces confidérations, ce me femble, fuf fifoient pour juftifier à vos yeux mon enthoufiafme fur la production du génie de M. l'Abbé G. du Rocher. Je m'étois flatté de faire paffer dans votre ame, les fentimens dont j'étois pénétré pour une auffi belle découverte. Malheureufement mes espérances ont été trompées, & mes efforts fans fuccès. Par votre réponse, je vois que votre opinion fur l'Hiftoire véritable des Tems fabuleux, combat directement la mienne. Vous formez contre cet ouvrage des difficultés qui vous paroiffent infolubles.,, Votre grand "argument fur-tout, eft une chronologie "Egyptienne à laquelle travaille depuis lon"gues années un favant mathématicien de vos amis, qui établit fur les obfervations aftronomiques les plus certaines, le Syn» chronisme, & par fuite l'existence des an

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ciens rois d'Egypte dont parlent Hérodote, Diodore, & Manéthon; vous ne » pouvez imaginer que l'Hiftoire véritable des Tems fabuleux, puiffe anéantir la certitude de ces calculs aftronomiques, Le fyftême de M. l'Abbé du Rocher, concluez-vous, ne doit donc être regardé que comme un tiffu de chimeres, & le rêve d'un érudit.

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J'avois lieu de croire qu'à l'aide de mes premieres obfervations, vous euffiez été inacceffible aux préjugés qu'on auroit pu vous fuggérer contre la découverte de cet auteur. Votre incrédulité fur Particle me force de reprendre la plume. Voyons fi cette fois-ci je ferai plus heureux que la premiere. Vous m'ayez expofé avec franchise ce que vous penfiez de l'ouvrage de M. l'abbé du Rocher; trouvez donc bon qu'ufant de la même liberté, je vous faffe part auffi de mes réflexions, & qu'à vos critiques j'oppofe une réfutation raifonnée. Je commencerai par les objections qui touchent directement le fonds de l'ouvrage, c'est-à-dire, le rapprochement des traits des deux hiftoires, & les procédés de M. l'abbé du Rocher pour parvenir à sa découverte. J'examinerai enfuite votre principe fur les calculs aftronomiques, d'où vous tirez la preuve du Synchronisme & de l'exiftence des perfonnages Egyptiens, démontrés fabuleux par l'auteur de l'Hiftoire véritable.

Difcutors chacune de vos objections.

PREMIERE OBJECTION.

1. M. l'Abbé du Rocher donne aux auteurs anciens une interprétation non-feu- · lement forcée, mais fausse.

A l'aide de ces interprétations que vous regardez comme forcées & fauffes, vous avez eu l'art de paffer précisément à côté du point principal de la découverte de notre auteur. J'avois infifté fur la conformité des traits paralleles des deux hiftoires, & non fur des interprétations de noms. Je vous ai rapporté des exemples décififs. Au lieu de vous attacher à détruire ces rapprochemens, vous vous étendez fur l'analogie des noms. Ainfi, votre lettre laiffe intacts ces rapports de traits. C'eft un aveu bien formel de l'impuiffance où vous êtes de les attaquer non feulement en détail, mais même en général. Vous n'avez donc pas même effleuré la fubftance de ma preuve fondamentale.

Il eft inutile & ridicule de difputer contre des faits fenfibles. D'après ceux que je vais expofer, le public jugera fi les interprétations que M. l'abbé du Rocher donne aux auteurs anciens, méritent les qualifications dont vous le gratifiez.

Débutons par l'Arche de Noé, laquelle s'appelle en Hébreu THBE, que les Egyptiens ont pris pour la ville de Thebes; nous verrons enfuite l'hiftoire de Jacob travestie

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par eux en celle de SESOSTRIS, roi conquérant. Tenons-nous-en pour le moment à ces deux morceaux que l'auteur de l'Hif toire véritable a dévoilés.

Hiftoire d'Egypte.

1. MENES eft ce

Hiftoire Sainte.

1. Noë dont le nom

lui qui regna le pre-en Hébreu est Né ou

mier des hommes.

2. Du tems de Menès toute l'Egypte n'étoit qu'un marais

Mnée, fon dérivé, qui fignifie repos (a), eft le pere commun de tous les peuples; c'eft dans l'Ecriture le premier homme qui regne dans un fens après le déluge; puifqu'il fe trouve le chef & le fouverain naturel de tout le genre humain réduit alors à fa famille.

2. Du tems de Noë, non-feulement l'Egypte, mais la terre

(a) M. en Hébreu eft une lettre fervile au com. mencement du mot.

J'ai cru que, pour me mettre plus à portée des Lecteurs qui ignorent les langues anciennes, il convenoit d'écrire en lettres ordinaires les mots Hébreux dont il m'a fallu faire un fréquent ufage, vu la nature de l'objet que je me propofe de dif cuter. Ceux qui feroient curieux de vérifier ces mots de la langue hébraïque, peuvent recourir à l’Histoire véritable des Tems fabuleux.

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