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s'abaiffoient lui.

4. Protée étoit inftruit de tous les fe

crets.

5. Protée avoit deux fils, TELEGONUS & POLYGONUS; le premier fignifie né loin de fon pays, & le fecond fécond, ou qui multiplie.

6. Protée pafteur de phoques ou de yeaux marins.

7. Un étranger fut accufé fous leregne de Protée d'avoir féduit la femme de fon hôte. 8. Sous Protée un étranger fut arrêté.

9. Protée ne donnoit point de réponse fans être lié.

10. Protée changeoit de formes, avant que de donner des réponses.

devant

4. Jofeph eft l'homme à qui les fecrets font révélés, dit l'Ecriture.

5. Jofeph eut deux fils, MANASSES & ÉPHRAIM, quien Hébreu fignifient exactement la même chofe que TELEGONUS & POLYGONUS.

6. Jofeph interprete un fonge fur des vaches forties du sein des eaux, & qui paif. foient fur les bords.

7. Jofeph accufé d'avoir voulu féduire la femme de fon maître Putiphar.

8. Jofeph étranger fut mis en prifon. 9. Jofeph répond aux queftions fur les fonges, étant dans les liens, ou dans la prifon.

10. Jofeph change de vêtement, avant que de paroître devant le Roi, pour lui expliquer fes fonges. 11. Les

11. Protée ayant II. Les os de Joun paffage paffage ouvert feph tranfportés par miraculeufement au un paffage miraculeufond de la mer. fement ouvert dans la

mer-rouge.

Comment, Monfieur, pouvoir contester la prodigieufe reffemblance qui fe trouve entre Protée & Joseph? Pour ne m'en tenir qu'au premier parallele de ce tableau que j'ai affecté de mettre en deux colonnes, afin que vos yeux s'élevaffent en témoignage contre vous, le trait du bled des deux côtés, porte-t-il fur un jeu de mots? L'identité de noms dans les deux personnages eft-elle une interprétation forcée? Protos en grec, Princeps en latin ou Primus, n'eft-il pas la traduction littérale des SCHALIT en Hébreu qui fignifie également Prince? Pourquoi fe roidir contre des vérités auffi fenfibles? Quand on fe bouche les yeux avec la main, & qu'on fe moque de ceux qui voient, on eft bien à plaindre.

Pour vous démontrer combien, fous des noms différens, les auteurs Païens ont défiguré l'hiftoire de Jofeph, qui vu l'éclat qu'eut fon miniftere en Egypte, dut laiffer après lui une grande réputation, je vais vous rapporter ici un paffage curieux de Suidas. Il eft fâcheux que l'auteur de l'Hif. toire véritable ne l'ait cité qu'en grec. La traduction latine, plus à la portée du commun des lecteurs, eût rendu ce rapprochement plus faillant. Tel eft le paffage

B

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de Suidas traduit en latin. Cum autem FAUNUS infidiis appeteretur A PROPRIIS FRATRIBUS IN EGYPTUM FUGIT.... & ab iis fufceptus, cum ipfis habitavit; & AUREA VESTE INDUTUS, & vaticinans, & tanquàm Deus ab ipfis honorabatur & colebatur, quòd ipfis divitias impertiret (Dict, de Suidas verbo Φαννος).

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Dans ce prétendu Dieu Faune, qui peut méconnoître Jofeph ? L'Ecriture ne nous dit-elle pas que celui-ci fut persécuté par fes freres, qu'il fut tranfporté en Egypte où il demeura, où ils vinrent le trouver où il prophétifa en expliquant les fonges de Pharaon; où le Roi le revêtit de fuperbes habits; (veftivit eum (Pharao) ftola Byffinâ, & collo torquem AUREAM circumpofuit. (Genef. 41. 42.); où il fut extrêmement honoré pour avoir été le libérateur de P'Egypte, & pour avoir prodigieufement enrichi le tréfor public pendant fon miniftere ?

Mais comment des traits de Jofeph a-t-on pu fabriquer un perfonnage que dans la fuite on a fait paffer pour le dieu Faune, Phaunos en grec? Pour dévoiler cette métamor phofe, qu'on fe rappelle un trait de l'Ecriture. Il y eft dit que le roi d'Egypte, en proclamant Jofeph fon premier miniftre, lui donna un nom tiré de la langue Egyptienne. Vertitque nomen ejus (Pharao)

&
vocavit eum LINGUA EGYTIACA, fal-
vatorem mundi (Genef. 41. 45.). Tâchons
donc de trouver ce nom que Joseph reçut

nous

directement de Pharaon: ce nom que la Vulgate fe contente de traduire, fans le défigner, nous a été confervé par le paraphrafte Chaldéen ; il nous apprend que c'est Saphenath Pahaneah. Les feptante l'ont écrit P/onthom Phanech, & la Vulgate l'a rendu par Salvatorem mundi (a). Quoi de plus naturel & de plus vraisemblable que l'explication de M. l'abbé du Rocher qui prétend que PAHANEAH ou PHANECH, nom de Jofeph, a un très-grand air de famille avec Faune, Faunus, Phaunos. Dans le rapprochement des traits de SESOSTRIS, avons vu comment de Pfentom-Phanech les Egyptiens ont fait l'oifeau Phénix. Ici l'on voit, comment les Grecs à leur tour, d'après le même mot Phanech, ont fabriqué leur dieu Phaunos, Faunus, Faune. Oferiez-vous férieusement foutenir que c'est-là une intrerprétation fauffe & forcée ? & quand vous réuffiriez à nous prouver que cette analogie de nom eft chimérique, comment vous tireriez-vous de l'embarras que vous donneroit celle des faits? Perfifteriez-vous à denier la jufteffe des rapprochemens que je viens d'expofer? De bonne foi, je vous le demande, les faits ne font-ils pas les mêmes dans les deux hiftoires? Tant que vous m'oppoferez les noms & les mots comme fondement des explications de M. l'abbé du Rocher, je vous fommerai de me démontrer qu'une fuite d'actions énoncées tout au

(4) Voyez les notes de la Bible de Vatable.

long dans deux hiftoires avec des rapports conftans, n'eft que l'effet d'un jeu de mots dont le hafard fournit l'identité.

QUATRIEME OBJECTION.

4. N'a-t-on pas vu le pere Lafiteau dans fon hiftoire des Sauvages Américains, faire venir les Américains des Grecs? Les preuves qu'il en donne font tout aussi folides que celles de M. l'abbé du Rocher; 1. que les uns & les autres avoient des fables; 2. que les uns & les autres alloient à la chaffe; 3. que les uns & les autres danfoient dans leurs fêtes; 4. que les Grecs avoient des oracles & les Américains des forciers. Il ne s'en tient pas là; car il va jufqu'à foutenir que les Caraïbes étoient une colonie de la Carie, ce qu'il prouve comme l'abbé du Rocher par l'étymologie.

Je conviens que le P. Lafiteau a été certainement très-mal adroit, en voulant prouver que les Américains viennent des Grecs. Mais l'idée en elle-même de démontrer que tel peuple vient d'un autre, n'est ni ridicule, ni paradoxale. Montefquieu, fi je ne me trompe, ne prétend-il pas qu'il eft vraifemblable que les fauvages du Canada, à raifon de l'analogie de leurs ufages & de leurs mœurs avec les peuples de la partie feptentrionale de l'Afie, font fortis de cette contrée? Que voulez-vous donc prouver ?

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