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exercitus (a), étoit un feigneur riche en terres & en maisons? (b)

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Dans tous les empires, un chef fuprême de la justice, maintient l'exécution des loix dans les tribunaux. Un autre personnage revêtu d'une dignité également éminente, appofe l'empreinte & lè fceau du prince fur tous les actes émanés du législateur. L'Ecriture ne nous apprend-elle pas que Pharaon, pour récompenfer Jofeph qui lui avoit dévoilé fes fonges, l'orna du collier & de la robe de fin lin, & lui donna fon anneau (c)? Or, on fait que dans les monarchies anciennes, le collier d'or étoit le fymbole du magiftrat chargé de rendre la juftice en chef (d), & que l'anneau étoit le cachet authentique du fouverain.

Surchargés du poids & de la multitude des affaires publiques, les rois font obligés d'avoir des miniftres qui partagent avec eux les follicitudes d'un grand peuple à gouverner. Un miniftre équitable & bienfaisant, qui fait confidérer, craindre & chérir le nom du prince dont il eft le représentant, eft une partie intéreffante de l'hiftoire. Ne retrouvons-nous pas cet intérêt dans ce que l'Ecriture nous raconte de l'administration

(4) Genef. 39. v. 4.

(b) Genef. ibid. v. 5.

(c) Tulitque annulum de manu fuâ. Genef. 41. Sur le mot annulum, Menochius ajoute, fignatorium ad facienda decreta.

(d) Voyez fur cet article Dom Calmet, Bible de Vence,

de Jofeph, nommé premier miniftre de Pharaon? Quel fpectacle que celui que nous préfente ce miniftre admirable! Et d'abord par la magnificence du représentant du fouverain, on fe fait une idée de la grandeur de fon maître. L'Ecriture ne nous dit-elle pas que Jofeph premier miniftre, avoit luimême un furintendant de fa maifon (a)? Et quel éclat ne devoit pas avoir en effet celle d'un homme à qui le monarque avoit annoncé, que le trône feul étoit la barriere qu'il vouloit mettre entre lui & fon favori (b)? Quel miniftre puiffant & opulent que ce Jofeph, qui, après avoir reconnu fes freres, leur ordonne de dire à fon pere, que lui & toute fa nombreuse famille aient à fe transporter en Egypte; qu'il leur fera partager gratuitement toutes les richeffes de ce royaume; qui envoie à ce vénérable patriarche, dix mulets chargés de tout ce que l'Egypte a de plus rare & de plus riche (c); enfin qui donne en jouiffance à fon pere, & à fes freres arrivés en Egypte, la terre de Geffen, & les y entretient aux fraix du gouvernement (d)! Quel royaume, quel monarque, que celui dont le ministre fait un traitement de cette magnificence à son pere & à fes freres !

Un premier miniftre, par fa place, eft

Genef. 44.

(b) Genef. 47. (c) Genef. ibid. (d) Genef. ibid.

H

tenu à une grande représentation, pour
donner aux étrangers une haute idée de la
dignité de fon fouverain; il fe fait un de-
voir de les accueillir, & de les traiter dans
des repas fplendides où il a foin de raffem-
bler les perfonnages les plus diftingués de
l'état. L'Ecriture ne nous dit-elle pas que
Jofeph, pour jouir plus à fon aife de l'em-
barras de fes freres, qui ne le connoif-
foient pas, les fit inviter par fon intendant
à un grand festin? Et ce qui prouve que le
miniftre d'Egypte fuivit alors l'étiquette de
fa place & du pays, c'eft que l'Ecriture ob-
ferve qu'à ce repas il y avoit trois tables,‹
la premiere pour le miniftre, la feconde
pour les freres de Jofeph, & la troifieme
pour les feigneurs Egyptiens, qui, à caufe
de la différence de leur culte religieux, ne
pouvoient manger avec les Hébreux. (a)

Dans un vafte état, un grand peuple à nourrir, & à qui fans ceffe il faut fournir cette denrée de premiere néceffité, dont la difette fait gémir les fujets, & fait trembler le gouvernement, eft un des objets les plus importans d'une bonne adminiftration politique. Ne lifons-nous pas dans l'Ecriture, que Jofeph établit dans toutes les

(a) Lota facie egreffus (Jofeph) ait: ponite panes. Quibus appofitis, feorfum Jofeph & feorfum fratribus, Egyptiis quoque qui vefcebantur fimul, feorfum illicitum eft enim Ægyptiis comedere cum Hebræis, & profanum putant hujufcemodi convivium) federunt coram eo &c. (Genef, 43. ✯. 31, 32 & 33.)

villes de l'empire, des greniers publics, & que par fa prévoyance, l'abondance parvint à un tel point, que les grains égalerent le fable de la mer (a)? Quand la famine eut commencé fes ravages, & que les clameurs du peuple eurent invoqué la main bienfaifante qui les gouvernoit, Jofeph ouvrit les dépôts publics, & vendit aux habitans de chaque province, du bled à un prix modéré (b). Voilà comme dans une feule phrafe, l'Ecriture nous donne un fyftême admirable d'adminiftration, & nous apprend qu'on peut fe paffer des bureaux d'agriculture.

Dans tous les empires, l'administration des finances eft une partie auffi délicate que compliquée. Un tréfor royal toujours rempli, fournit au fouverain des reffources pour les befoins intérieurs de l'état. L'Ecriture ne nous montre-t-elle pas dans Joseph, le directeur des finances de Pharaon, quand elle fait remarquer qu'il porta dans le tréfor royal de ce monarque, tout l'argent provenu de la vente des grains, faite fous les aufpices du gouvernement, aux Egyptiens & aux Chananéens (c)? Et pour concevoir combien cette fomme étoit énorme, qu'on fe rappelle le nombre immenfe d'ha

(4) Genef. 41.

(b) Genef. 47.

(e) Opprefferat fames terram, maximè Egypti & Chanaan. Quibus omnem pecuniam congregavit pro venditione frumenti & intulit eam in Erarium regis - (Genef. ibid.).

bitans que renfermoient l'Egypte & la terre de Chanaan. Quelle merveilleufe administration de finances, que celle qui, dans 'tout un vafte empire, attirant dans les coffres de l'état, tout ce numéraire qui circuloit dans les mains des particuliers, loin d'exciter le moindre foulévement, fait appeller le miniftre de Pharaon, le fauveur de l'Egypte; opération par-tout ailleurs. très-délicate; mais entre les mains de Jofeph, d'une fimplicité fublime! Elle enrichit le fouverain fans appauvrir les citoyens, & procura de l'or & des bénédictions au monarque, en donnant du pain & la vie à plufieurs millions de fujets affamés.

Dans tout état, le fujet eft tenu de payer au fouverain le tribut & le fubfide; parce qu'il faut que tous les membres de la grande famille, qu'on appelle la fociété, concourent aux dépenfes communes, & achetent par le facrifice d'une portion de leur propriété, le droit d'exiger que la force publique protege & défende le refte. De tous les impôts, le territorial fut toujours le plus jufte, parce qu'il eft le plus naturel; il est le moins onéreux, parce qu'il a pour base une répartition proportionnelle; il est même le plus utile, parce qu'il anime les travaux de l'agriculteur, qui travaille fa terre avec . d'autant plus d'ardeur, qu'elle doit lui rendre ce qu'il eft obligé de payer au fouverain, & lui fournir en même tems fa nourriture; c'est alors qu'il fe confole des fueurs dont il arrofe fa charrue, parce qu'il a le

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