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compte, comme le porte le paffage de l'Ecriture cité plus haut, & qui empêche Moïfe & fon peuple d'aller facrifier dans le défert ?

Ce qui met le comble à la certitude de ce dévoilement, c'eft que les personnages les plus mémorables du tems de l'oppref fion des Ifraélites, Moïfe & Aaron fon frere, n'ont pas été oubliés dans l'hiftoire des pyramides. Les Egyptiens ont pris fi peu de précaution pour mafquer leur plagiat dans cet endroit, que les noms des perfonnages de l'Ecriture font à peine altérés, & très-reconnoiffables. En effet, felon quelques auteurs Egyptiens, la plus grande des pyramides étoit d'AMROUS; la feconde, d'AMMOSIS; la troifieme, d'INARON. Sous ces trois noms réunis il eft aifé de de viner Mofeh ou Moïfe dans Ammofis; Aaron fon frere, dans Inaron; & Amram leur pere dans Amræus.

Cette oppreffion du peuple Hébreu fut fuivie de fa délivrance par le prodige du paffage de la mer-rouge. Et c'eft ce qui va réfoudre, Monfieur, l'objection que vous empruntez du grand Voltaire, qui fur le témoignage des Coptes, plaçoit la conftruction des pyramides dès avant le déluge univerfel. M. l'Abbé du Rocher vous a déjà appris que le nom de Typhon chez les Egyptiens, en arabe Tufan, en chaldéen Tuphna, fignifioit inondation, fubmerfion. La catastrophe de la mer-rouge, où périt l'armée de Pharaon, fut une fubmer

fion. Cette idée fe mêla dans l'efprit des Egyptiens avec l'inondation du déluge univerfel. Les traditions qui leur reftoient, que quelques-unes des pyramides avoient été conftruites avant une grande fubmerfion, s'étant obfcurcies avec le tems, cette inondation, qui dans le vrai n'étoit que celle de la mer-rouge, fut confondue avec le déluge; la conftruction des pyramides fut également transportée à une date antérieure à l'inondation du genre-humain. L'auteur de l'Hiftoire véritable, apporte une preuve inconteftable de cette erreur chronologique, en montrant qu'avant le Pharaon que ces mêmes Coptes font périr dans l'inondation, prise pour le déluge univerfel, on trouve en remontant, à-peu-près les mêmes noms de rois que les Arabes dans leur lifte placent avant le Pharaon, qui fut fubmergé dans la mer-rouge. On peut citer pour exemple, le roi SAURID (a) qui, fuivant les Coptes, eft auteur des pyramides, & qui, difent-ils, eft enseveli avec tous fes tréfors, dans une de celles qu'il fit conftruire. Ce nom de SAURID eft prefque littéralement le nom hébreu XRID, qu'on prononce SCHARID, qui fignifie refté, fauvé, échappé d'un danger. Ce nom a donc le même fens que le PHILITION dont nous avons parlé plus haut. On voit que c'est toujours l'idée dominante de l'oppreffion des Ifraé.

(•) Hiftoire universelle, trad. de l'Anglois, t. 1, pag. 501.

lites, qui furent délivrés de leur captivité par leur évasion miraculeuse. Les Egyptiens, dit M. l'abbé du Rocher, ayant perdu la fignification des mots, ont dû naturellement défigurer les noms. Il observe très-judicieufement que l'inondation du déluge univerfel, confondue avec la fubmerfion de la mer-rouge, ayant par une méprise très-conféquente, fait déplacer & reculer les époques de la conftruction des pyramides, le rétabliffement de ces dates s'opère très-facilement par la fubftitution du défastre de la mere-rouge, au grand déluge de l'uni

vers.

La conftruction des pyramides a un tel rapport avec le peuple Hébreu, que Manéthon (a) attribue la plus grande à un certain SORIS, après lequel il nomme deux SUPHIS. Ces deux mots SORIS-SUPHIS, en retranchant la terminaifon Is donnée par les Grecs, fe réduifent à SORSUPH, qui revient à OSARSIPH. Vous avez affaire ici, Monfieur, à Manéthon qui nous apprend lui-même que Moïfe a été appellé OSARSIPH. Accuferez-vous ce prêtre égyptien d'être un homme à étymologie?

Concluons de ces différentes explications, qu'à prendre les noms de tous ces conftructeurs des pyramides marqués dans les Hiftoires profanes, il n'eft plus douteux qu'ils ne foient copiés de nos Livres faints traveftis.

(a) Jofeph, liv. 1, contrà apion.

M. l'abbé du Rocher paffe enfuite aux motifs de la conftruction de ces grands monumens; ce qui lui fournit une autre preuve, en faveur de fa découverte fur les pyramides. Pline (a) rapporte qu'elles furent conftruites, felon quelques auteurs, parce que les rois d'Egypte voulurent empêcher le peuple d'être oifif. Ce rapport fe trouve dans ce que dit Pharaon indigné contre les Ifraélites, & déterminé à les excéder de travaux. Ce peuple, dit-il, s'eft extrêmement multiplié. Vous voyez que leur » nombre s'eft beaucoup accru; combien » s'accroîtroit-il d'avantage, fi on lui donnoit » quelque relâche dans fon travail (b) „? Les traces des idées qui firent donner pour motif de la conftruction des pyramides la crainte de l'oifiveté d'un peuple nombreux, font donc ici fort fenfibles.

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Pline ajoute que le fecond motif des monarques d'Egypte, en élevant les pyramides, étoit de ne pas laiffer des trésors à leurs fucceffeurs. On eft agréablement furpris de trouver que ces noms ARI MSCHNUTH, qui expriment en hébreu les grands ouvrages que bâtirent les Ifraélites pendant leur oppreffion, & que la Vulgate rend par villes des tabernacles, font traduits villes des trésors par le paraphrafte Chaldéen & par Sancés-pagnin, auteur de la verfion employée dans la Bible de Vatable.

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On fait de plus ( & Diodore le rapporte), que les pyramides étoient deftinées à fervit de tombeaux où les corps des rois d'Egypte étoient confervés précieusement. On trouve encore dans la plus grande de celles qui font près du Caire, un tombeau dont on peut voir la defcription dans les relations des voyageurs. Un autre fens que préfente le mot Mfchnuth de l'EcritureSainte, convient très-bien avec cette idée de fépulture. Car outre qu'il fignifie tréfors, il veut dire également un lieu où l'on garde quelque chofe.

En admettant que le mot Mfchnuth fignifie lieu de dépôt, cette interprétation me fuggere une explication qui naît de celle de M. l'abbé du Rocher, & qui fe rapporte à l'objet que fe propofe ici ce favant Auteur. En effet, le dictionnaire hébreu interprétant les (a) Mfchnuth par apothecæ, promptuaria, penuaria, cellaria, armamentaria, nous donneroit les pyramides, comme des magafins, des greniers publics; c'est le fens adopté par Vatable & Menochius. Cette verfion nous conduit au dévoilement des deux monumens que conf truifirent les Ifraélites: car ce texte, adificaverunt ARI MSCHNUTH Phithom & Rameffés, pourroit être dès-lors traduit de cette maniere! Ils bâtirent les greniers pu

(a) MSCHNUTH, thefauri, fifcus, promptuaria, penuaria, armamentaria, cellaria, apotheca, taber nacula (V. le Di&t. Hébr, de Giraudeau).

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