Page images
PDF
EPUB

.

bera que fous le coup qui doit renverfer la machine entiere de l'univers, le philofophe fe fent pénétré de la plus profonde vénération pour l'antiquité.

I admire ces Egyptiens, il s'extafie fur cette nation, qui dans fes édifices gigantefques, peignoit la grandeur de fes idées. Aux yeux du fage, quelle différence entre les édifices publics de nos empires modernes & ceux des anciens! Qu'on rapproche de ces majestueufes PYRAMIDES, nos galans VAUX-HALLS & nos élégans COLYSÉES; c'eft alors qu'on fent que s'il eft agréable d'être François, on devoit être tout fier d'être Egyptien. De-là, les regrets de feu Voltaire fur la perte des anciennes annales d'Egypte, qui fans contredit nous auroient donné la defcription de ces merveilleufes pyramides. Il reproche à Moïfe le filence qu'il garde fur cet objet.

دو

[ocr errors]
[ocr errors]

Il est étonnant, dit-il, que l'auteur » (de la Genefe) ne parle pas (de plufieurs pyramides qui exiftoient de fon tems), & qu'il n'en foit jamais fait la moindre mention dans l'Ecriture.... Il eft trifte pour les curieux, ajoute-t-il, » que l'auteur des livres Juifs ne nous ait » pas dit un feul mot des anciens monu» mens de l'Egypte (a).

[ocr errors]
[ocr errors]

(a) Voyez la Bible enfin expliquée par Voltaire, tom. 1, pag. 115. liv. v.

M. de Voltaire pouvoit avec bien plus de raifon s'étonner de ce qu'Homere, le plus ancien Aui. teur profane dont nous ayons lés écrits, n'ait rien

[ocr errors]

Sans doute l'hiftorien de la Genese n'eft entré dans aucun détail fur les pyramides. Nos Livres faints, qui font le défefpair de toutes les paffions humaines, ont voulu n'attacher aucune importance à tous ces trophées de la vanité de l'homme. Si cependant elle vouloit triompher de ce que l'ouvrage de fes mains fubfifte encore dans ces maffes énormes de pierres entaffées les unes fur les autres, & qui femblent affronter la faulx impitoyable du tems, que l'orgueil humain s'abaiffe, en obfervant que la divine Providence a permis qu'on ignorât même les vrais noms de ceux qui ont fait conftruire ces monumens faftueux.

Mais fous un autre rapport, ils fervent à la faire exalter. Nous venons d'entendre le chef des philofophes modernes s'exhaler en plaintes contre l'hiftorien de la Genefe, qu'il accufe de nous avoir privés d'une differtation qu'il nous devoit fur les pyramides d'Egypte. Rien de moins fondé que ce grief de la philofophie contre Moïfe. Car qu'elle apprenne que tout ce que nous pouvons favoir par les anciennes hiftoires profanes concernant les pyramides, est uniquement ce que les Egyptiens en ont trouvé ou cru retrouver dans l'Hiftoire sainte.

dit des pyramides conftruites long-tems avant lui, quoiqu'il parle de l'Egypte, de Thebes, & de fes cent portes. Quand M. l'abbé Guérin aura publié la découverte qu'il a annoncée concernant l'Iliade, on n'aura plus de peine à concilier le filence d'Ho mere avec l'exiftence des pyramides, bien antérieures à fon fiecle.

Voilà une autre affertion du favant abbé du Rocher. Elle va peut-être, Monfieur, vous faire encore jetter les hauts cris contre la fingularité de fa découverte fur l'hiftoire d'Egypte. Quoi, direz-vous, jufqu'à la construction des pyramides, Hérodote a tout pillé de l'Ecriture! ces pyramides qui furent élevées par des Rois dont il nous marque les noms; ces pyramides qui n'eurent aucun rapport avec l'hiftoire des Hébreux, & que dès-lors les Egyptiens, copistes des Livres faints, n'ont pu être tentés d'aller chercher dans l'Ecriture; ces pyramides dont la construction dit notre grand Voltaire, eft placée par les Coptes (ou Egyptiens modernes) même dès avant le déluge univerfel!

Oui, Monfieur, tout ce que vous & moi avons lu, ou pouvons avoir lu, dans Hérodote, Diodore & autres anciens fur ces monumens Egyptiens, eft emprunté de nos Livres faints. D'après les explications de M. l'abbé du Rocher, vous jugerez s'il prouve la thefe qu'il avance, que tout ce que les auteurs profanes contiennent d'hiftorique touchant la conftruction des pyramides, fe réduit à ce que raconte l'Ecriture des travaux des Ifraélites en Egypte ; quoiqu'elle n'en dife pas affez pour fatisfaire la curiofité fi naturelle à l'efprit hu

main.

Je vais d'abord mettre fous vos yeux le paffage de nos Livres faints, qui a été le canevas qu'ont brodé les copiftes Egyp

tiens avec leur mal-adreffe ordinaire.,, Phadit l'Ecriture, établit des furveillans pour écrafer de fardeaux les Ifraé

دو

[ocr errors]

دو

raon,

lites. Ils conftruifirent les villes des ta"bernacles, Phithom & Ramessés. Pour ,, remplir leur vie d'amertumes, on les em"ployoit à tous les travaux pénibles de ,, brique & de mortier, & aux corvées les » plus dures des ouvrages publics (a).,, L'Auteur de l'Hiftoire véritable foutient que cette oppreffion des Hébreux, nous préfente la clef de tout ce que les auteurs profanes ont écrit fur les pyramides. Le favant auteur observe d'abord qu'Hérodote en attribue la conftruction aux rois CHÉOPS & CHÉPHREN. Diodore appelle celui-ci CHABRYIS ou CHABRYÉS. M. du Rocher fait voir que CHÉOPS ou CHÉPHREN, viennent du mot hébreu CHAB, CHÉEB ou CHEOB, qui fignifie affliction; & qui eft employé dans l'Ecriture. Quant au mot CHABRYIS, ou CHABRYÉS, c'eft l'indication du peuple fur lequel tombe cette douleur ou affliction. CHABRI ou CHABRYÉS, eft le nom d'ABRI qu'on prononce HIBRI fortement afpiré, c'est-à-dire, celui même du peuple HÉBREU. Ainfi ces deux noms

(a) Præpofuit itaque Pharao (iis) magiftros operum ut affligerent eos oneribus.... adificaveruntque urbes tabernaculorum Pharaoni Phithom & Ramesfes.... atque ad amaritudinem perducebant vitam eorum operibus duris luti & lateris, omnique famulatu quo in terrâ operibus premebantur (Exod. 1. 11. & 14).

de rois CHÉOPS, CHABRYÉS, fe trouvent être évidemment les deux mots qui veulent dire AFFLICTION DES HÉBREUX. Comme Moïfe travailla à les en délivrer, ce trait a dû faire germer un autre perfonnage fabuleux fous la plume d'Hérodote. En effet, il parle au fujet de ces pyramides d'un pasteur appellé Philition. C'eft justement le mot PHLITE, qui en hébreu fignifie délivrance, & l'Ecriture s'en fert pour dire la délivrance d'Ifraël, laquelle vint après l'oppreffion que Pharaon leur fit éprouver. C'eft ainfi que la délivrance miraculeufe des Ifraélites qui, comme nous avons vu, furent connus en Egypte fous le nom de Peuple-pafteur, a fervi à fabri quer au fujet des pyramides, le pafteur Philition. Si quelque critique vétilleur entreprenoit de contefter l'analogie frappante qui fe trouve entre les mots Philition & PHILITE, nous lui oppoferions les traits fuivans rapportés par Hérodote, qui achevent de lever entiérement le voile. Après avoir attribué aux rois Chéops & Chephren les pyramides les plus confidérables, il dit que les Egyptiens ne vouloient pas même nommer ces rois, TANT ILS LES DÉTESTOIENT. Il ajoute que le premier des deux fut un très-mauvais roi, qu'il fit fermer tous les Temples, & INTERDIT LES SACRIFICES, enfuite obligea tous les Egyptiens à travailler pour lui. Qui peut méconnoître ici Pharaon qui condamne les Ifraélites à des travaux pénibles pour fon

« PreviousContinue »