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Ici, Monfieur, l'authenticité du fait fe prouve par le fait lui-même.

D'après les rapprochemens des deux hiftoires, il eft certain que les Egyptiens ont travefti l'Ecriture-Sainte depuis Noë jufqu'à Nabuchodonofor, & qu'ils en ont fait le fond de leur hiftoire depuis Menès leur premier roi, jufqu'à Amafis le dernier de leurs fouverains. Donc les Egyptiens ont copié l'Ecriture-Sainte. Or, comme ils ne fe font approprié que les traits qui regardoient leur nation, leur opération ne fut pas une tranflation toute entiere de nos Livres faints dans leur langue, comme il arriva chez ces mêmes Egyptiens long-tems après, quand leur roi Ptolomée, pour enrichir sa bibliotheque, fit traduire la Bible hébraïque par les feptante. Ainfi les anciens Egyptiens qui ne cherchoient dans nos Livres faints que les traits qui concernoient leur pays, n'ont pas traduit l'Ecriture toute entiere; ils n'ont donc rédigé que des extraits. Le témoi gnage qui les conftate, émane donc vifcéralement, comme vous voyez, du fait du traveftiffement; car de celui-ci naît la preuve oculaire de la traduction partielle de l'Ecriture. Voilà par conféquent des mémoires, ou des extraits. Puis-je vous démontrer plus folidement qu'ils ont exifté ?

Mais vous voulez abfolument qu'on établiffe la réalité de ces mémoires, par l'autorité de quelques hiftoriens. Vous invitez M. l'abbé du Rocher à indiquer les fources où il a puifé le fait qu'il avance à ce fujet,

Lifez, je vous prie, Monfieur, les obfervations préliminaires de fon livre; vous y trouverez les témoins que vous cherchez. 1. L'auteur a cité un témoignage moderne, celui de l'Hiftoire univerfelle, compofée en anglois, ouvrage très-eftimé, & dont on vient de donner une nouvelle édition.

Ces favans hiftoriens difent,, qu'après que Cambyfe eut enlevé leurs mémoires, les ,, prêtres Egyptiens, fuivant toutes les ap,,parences, pour réparer leur perte

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conferver leurs prétentions d'antiquité, en compoferent de nouveaux, dans lef » quels ils firent, non-feulement de toute ,, néceffité, plufieurs fautes; mais ajoute,, rent auffi beaucoup de leur invention, ,, principalement à l'égard des tems reculés (a). Cependant comme il n'eft là queftion que de mémoires en général compofés par les Egyptiens, fans dire d'où ils les ont recueillis, vous allez voir quelque chofe de plus précis.

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Je vais à ce fujet vous produire un témoin grave, un Egyptien, prêtre lui-même & fcribe des archives facrées. Manéthon, dans un de fes fragmens confacrés par Jo Sephe, dit qu'il avoit tiré fon hiftoire d'Egypte DES LETtres sacrées (b). Dans un autre fragment que nous a confervé Geor ges le Syncelle (c), il nous apprend en

(a) Hiftoire universelle, trad. tom. I, pag. 432. (b) Jofeph, 1. 1. contra Appion. () Syncel. chronographie, pag. 40,

core qu'il avoit tiré ce qu'il écrivoit, des COLONNES SACRÉES qui étoient dans la terre SÉRIADIQUE, fur lesquelles THOTH, le premier hermès, avoit écrit en langue & EN LETTRES SACRÉES. Il ajoute que cette traduction avoit été faite de la langue Sacrée en langue grecque, en caracteres hieroglyphiques & mife.... dans les archives des temples d'Egypte. M. l'abbé du Rocher prouve que le ncn de Thoth ou Athoth, fi célebre chez les Egyptiens, eft le mot qui veut dire en hébreu fignes & lettres, parce qu'en effet les lettres font les fignes des mots. Athiuth, qu'on prononce Othioth, & qui vient D'ATHUTH ou OTHOTH fignes, eft le mot que toutes les grammaires hébraïques emploient pour fignifier les lettres. C'est une indice trèsforte que ce Thoth fi fameux qu'on fait auteur d'un grand nombre d'ouvrages chez les Egyptiens, ou l'inventeur des sciences, autrement des lettres, n'eft dans le vrai que Moïfe auteur des Livres faints (a)

(a) M. Bailly (dans fon hift. de l'aftron. anc. éclairciffemens, p. 319.) où il réfute Jablonski, qui penfe que le fameux Thoth n'étoit que les colonnes facrées mêmes des Egyptiens perfonnifiées, parce qu'elles s'appelloient Thoith dans leur langue, M. Bailly, dis-je, prétend que la réalité de L'existence de Thauth eft atteftée par toutes les traditions Egyptiennes & orientales, & qu'indépendamment des ouvrages que nous connoiffons fous fon nom, mais qui peuvent être fuppofés, il y a en Afie des manufcrits.... de Mercure trifmégifte, & c'est une forte présomption de cette existence. M. Bailly nous

Ce que vous avez déjà vu, Monfieur, de la découverte de M. l'abbé du Rocher, ne permet plus de douter que plufieurs inftitutions qui appartiennent aux Hébreux n'aient été attribuées aux Egyptiens..

Le Thoth retrouvé dans la langue hébraïque nous infinue comment les Livres des Juifs, appellés facrés par excellence, ont pu devenir par une fauffe attribution, les lettres facrées des Egyptiens. Et en effet, n'avoit-on pas lieu de s'étonner que les Egyptiens fuffent le feul peuple de l'antiquité païenne, chez lequel on citoit des lettres qui portaffent ce caractere de vénération, toutes les autres nations qui avoient également des prêtres, ayant pu, comme les Egyptiens, fe glorifier d'avoir des let

permettra de lui obferver, que tout cela convient à merveille à Moïfe. Il a demeuré long-tems en Egypte, & a laiffé un grand nom dans l'Afie. Ainfi les Traditions Egyptiennes & Orientales ont dù confacrer fon nom. Indépendamment des ouvra ges de Moife, que nous connoiffons fous le nom de Pentateuque, qui ont été non pas fuppofés, mais altérés par plusieurs écrivains grecs, qui en ont copié beaucoup de chofes, tels qu'Hérodote & Platon, les manufcrits de Moïfe ont dû circuler en Afte. C'est une forte présomption que Moïfe a été travefti fous le nom de Thauth ou Mercure trifmégifte. Nous avons fait voir ailleurs comment Moïle a été appellé Mercérès, d'où vient le nom de Mercure. Remarquons d'ailleurs que la découverte de M. l'abbé du Rocher fur Thoth, cadre avec l'explication que donne Jablonski du nom de Thauth, qu'il fait venir de Thoith égyptien. Celle-ci eft une acceffoire du dévoilement complet fait par l'auteur de l'Hiftoire véritable.

tres facrées, fi par cette dénomination on eût voulu défigner feulement les livres réligieux ou mystérieux compofés par leurs prêtres ?

Ce qui dénote encore que le perfonnage Egyptien, auteur des lettres facrées, eft réellement Moïfe, premier écrivain de nos livres faints, c'eft que ce Thoth est encore appellé Hermès. Or, Hermès eft le même que Mercure chez les païens. Je vous ai montré, Monfieur, que le nom de Mycerinus, Mercérès d'où vient évidemment celui de Mercure, eft un travestissement de Moife. Voilà donc le Thoth, ou l'Hermès des Egyptiens, auteur des lettres facrées, bien démafqué.

Pour prouver que les lettres facrées qu'on imputoit à ce Thoth, n'étoient réellement que les livres hébreux, l'auteur de l'Hiftoire véritable cite des monumens de la langue facrée des Egyptiens, entr'autres, les mots ANUBIS, & CNEPH, nom du Dieu créateur chez eux. Ils représentoient le Cneph avec des ailes, pour montrer que c'étoit un efprit, comme nous peignons les Anges. Or, en hébreu CHNPH, qui est exactement le même mot, veut dire auffi aîle. Anubis chez les Egyptiens fignifioit aboyeur, moniteur; c'étoit le nom qu'ils donnoient à l'étoile caniculaire qui les avertiffoit de la crue du Nil, événement fi ef. fenciel pour les peuples de l'Egypte. En hébreu NBE, & dans la langue phénicienne qui n'eft qu'un dialecte de celui-ci, Enbê

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