Ne prohibete! Satis jampridem sanguine nostro Jampridem nobis cœli te regia, Cæsar, Invidet, atque hominum queritur curare triumphos: 540 ruine. Nous avons assez payé de notre sang les parjures de Troie et de la race de Laomédon. Depuis longtemps déjà, ô César, le ciel t'envie à la terre et se plaint que de vains triomphes t'arrêtent encore parmi les hommes. Et pourtant quel spectacle pour tes yeux! Le juste et l'injuste partout confondus, la guerre allumée de toutes parts, le crime se multipliant sous toutes les formes, la charrue négligée et sans honneur, les campagnes d'où le laboureur a été arraché, languissant incultes et désolées, et la faux de Cérès convertie en glaive homicide; tandis que d'un côté l'Euphrate, et, de l'autre, le Danube, se préparent à la guerre; que les villes, rompant les antiques traités et tout lien de voisinage, s'arment les unes contre les autres, et que Mars remplit l'univers entier de ses fureurs impies. Ainsi quand les quadriges, s'élançant hors des barrières, volent dans l'espace, le conducteur, emporté par les rapides coursiers, en vain se roidit et retient les rênes : le char n'écoute plus ni la voix ni le frein. succurrere Troja Laomedonteæ. fas atque nefas versum; tot bella per orbem; facies scelerum tam multæ; non ullus honos dignus aratro ; arva squalent, colonis abductis, et falces curvæ conflantur in ensem rigidum. Hinc Euphrates, illinc Germania movet bellum urbes vicinæ, legibus ruptis inter se, ferunt arma ; Ut, quum quadriga auriga fertur equis, les espèces des crimes sont si nombreuses; aucun honneur digne (assez grand) n'est à la charrue; les campagnes sont-incultes, les colons en ayant été emmenés, et les faux courbes sont fondues pour en faire une épée roide (droite). D'un-côté l'Euphrate, de-l'autre la Germanie met-en-mouvement (commence) la guerre; les villes voisines, les traités étant rompus entre elles, portent (prennent) les armes ; l'impie Mars se-déchaîne dans tout l'univers. Comme, lorsque les quadriges ils ajoutent les espaces aux espaces, les brides, le conducteur est emporté par les chevaux, et le char n'obéit pas aux rênes. NOTES. Page 2 1. Clarissima mundi lumina, se rapporte, selon les meilleurs commentaires, à Cérès et à Bacchus; quelques-uns cependant ont voulu l'entendre du soleil et de la lune. 2. Chaoniam.... poculaque..... Acheloia. Chaoniam, la Chaonie, province maritime de l'Épire, entre la Thesprotie et les monts Acrocérauniens. Acheloia, l'Achélous est un fleuve de la Grèce, qui sépare l'Acarnanie de l'Étolie, et qui se jette dans la mer vis-à-vis des îles Échinades. C'est sur ses bords que la fable place la mort du centaure Nessus. L'Achélous est l'Aspropotamo actuel. 3. Præsentia numina. Præsens, a ici le sens de favorable, propice, comme nous l'avons déjà vu, églogue 1, vers 41. 4. Ceœ. Cée est une des Cyclades dans la mer Égée. Il s'agit ici d'Aristée, fils d'Apollon et de Cyrène, qui se retira dans cette île après la funeste aventure de son fils Actéon. Voyez au IVe livre des Géorgiques, le touchant épisode : Pastor Aristæus, etc. Page 4: 1. Tegece. Pan est appelé Tegeœus, de Tegea, ville d'Arcadie, où il était particulièrement honoré. 2. Puer monstrator aratri; et teneram ab radice ferens, Silvane, cupressum. Puer monstrator désigne Triptolème, suivant les uns; Osiris, suivant les autres. Silvane, Silvain, dieu champêtre qui présidait aux forêts, et qui aimait le jeune Cyparisse, changé en cyprès par Apollon. 3. Urbesne invisere.... terrarumque velis curam. Le verbe invisere régit à la fois les deux substantifs urbes et curam. Avec le premier, il garde son sens propre; avec l'autre, il faut ajouter l'idée d'un autre verbe, tel par exemple que suscipere. 4. Ultima Thule, l'île de Thulé. On croit que c'était l'Islande ou les îles de Shetland, ou le Jutland. C'était dans tous les cas la limite la plus reculée de la géographie ancienne vers le nord, et l'épithète ultima l'accompagne toujours. : Page 6 1. Erigonen.... Érigone est le même signe que la Vierge. Du temps de Virgile on connaissait peu le signe de la Balance. L'espace du ciel compris entre la Vierge et le Scorpion était rempli par les serres de ce dernier : ainsi le Scorpion occupait seul l'étendue de soixante degrés, quoique chaque signe n'en eût que trente. La Balance préside au mois de septembre. -2. Incipiat jam tum mihi. Mihi est ici un pronom explétif; les exemples en sont innombrables dans Virgile. Page 81. Tmolus. Ce mont est sur les confins de la grande Phrygie et de la Lydie; il est fertile en vins et en safran. Nonne vides.... ut.... mittit? D'après les règles de la grammaire, il faudrait mittat; mais nonne vides ut est souvent une formule d'énumération, et n'a pas plus de valeur que præterea, porro. 2. Virosaque Pontus castorea. Le castoreum est d'un très-grand usage en médecine: c'est un puissant soporifique. Lucrèce a dit : Castoreoque gravis mulier sopita recumbit. : Page 10 1. Arcturum. L'Arcturus est une étoile de la première grandeur dans le signe du Bootès (Bouvier), près de la queue de la grande Ourse. Du temps de Virgile son lever cosmique arrivait au commencement de septembre; il arrive aujourd'hui au commencement d'octobre. 2. Alternis idem tonsas cessare novales. Par novales, Pline entend une terre qu'on ensemence de deux ans l'un. Page 12 1. Multum adeo, rastris glebas qui frangit inertes, etc. Les Romains brisaient d'abord la terre avec des râteaux, et l'aplanissaient ensuite en y traînant des claies. Columelle semble avoir voulu consacrer le précepte donné par notre poëte, en disant après lui: Glebas sarculis resolvere, et inducta crate coæquare. 2. Mysia.... Gargara messes. Mysia, la Mysie asiatique le long de la mer Egée. Il y a dans cette province une montagne et une ville du nom de Gargara. Comme les peuples de ce pays devaient moins leurs belles moissons à l'industrie qu'à la bonté du sol, Virgile a dit très-bien : Ipsa suas mirantur Gargara messes. Page 14: 1. Incertis.... mensibus. La Fontaine songeait sans doute à ce vers de Virgile qui désigne les mois douteux de l'automne, quand il disait (liv. VI, fable III): Il pleut, le soleil luit, et l'écharpe d'Iris Qu'en ces mois le manteau leur est fort nécessaire : Les anciens les nommaient douteux pour cette affaire. 2. Strymoniæque grues. Virgile parle de la grue comme d'un oiseau funeste aux moissons. Ces oiseaux se trouvent en foule sur les bords du Strymon, fleuve de la Thrace. Quand ils sont attroupés, un d'entre eux se met un peu à l'écart, se pose sur un pied et fait sentinelle; de là: Faire le pied de grue, pour dire attendre quelqu'un longtemps. Page 16: 1. Pleiadas, Hyadas, claramque Lycaonis Arcton. Les Pléiades sont sept étoiles placées sur le cou du Taureau; les Hyades sont sept autres étoiles placées sur le front du Taureau. - Arcton. Calisto, fille de Lycaon, eut de Jupiter un fils nommé Arcas. Junon les changea l'un et l'autre en ours; mais Jupiter les plaça au ciel près du pôle arctique : c'est la grande et la petite Ourse. Page 22 1. Quum se nux.... induet in florem. Construction poéti que, au lieu de induet flore. On trouve aussi, Énéide, liv. VII, vers 20 Quos.... induerat Circe in vullus ac terga ferarum. Au contraire, en prose, Columelle, IV, 24, 12: Vites induunt se uvis. Plus loin, liv. IV des Géorgiques, vers 142, nous trouverons : : Page 24 1. Abydi, Abydos, aujourd'hui Nagara-Bouroun, sur l'Hellespont, à l'endroit le plus resserré du détroit, vis-à-vis de Sestos,. en Europe; Virgile l'appelle ostrifer, à cause des huîtres excellentes qu'on pêchait sur cette côte. - 2. Die, pour diei. De même Horace, Odes, III, VII, 4: Constantis juvenem fide. Et Ovide : Utque fide pignus dextras utriusque poposcit. Page 26: 1. Candidus auratis aperit quum cornibus annum Taurus... Canis occidit.... C'est par le Bélier que commence l'année astronomi-que; mais, comme c'est au mois d'avril que la terre ouvre son sein, et que avril (aprilis) et ouvrir (aperire) ont une même étymologie, Virgile a jugé à propos de faire ouvrir l'année rurale par le signe du Taureau, où le soleil entre le 22 avril. Virgile donne au Taureau deux cornes dorées, parce que chacune de ses cornes a une étoile très-brillante l'une de ces étoiles est de la seconde grandeur, l'autre de la troisième. Canis occidit. Il s'agit du coucher héliaque de la Canicule, lorsque, étant engagée dans les rayons du soleil, elle cesse d'être aperçue. - 2. Eoa Atlantides abscondantur. Virgile veut parler du coucher cosmique des Pléiades, lorsque le matin elles descendent sous l'horizon en même temps que le soleil se lève. L'une de ces étoiles s'appelait Maia. Les Pléiades étaient filles d'Atlas, Atlantides. 3. Gnosiaque ardentis decedat stella Corona. Il s'agit ici du lever héliaque de la Couronne d'Ariane, lorsque, s'étant dégagée des rayons du soleil, elle commence à se faire voir. Ariane était fille de Minos, roi de l'île de Crète, où était Gnosse: de là Gnosia stella. Page 28 1. Cadens.... Bootes. Il s'agit du coucher achronique du Bouvier ou Arcturus, ou gardien de l'Ourse, lorsqu'une partie de ses étoiles descend sous l'horizon. Ce coucher répond, suivant Columelle, au 21 d'octobre; il a lieu aujourd'hui plus tard. : 2. Glacie concretæ atque imbribus atris. Concreta ne se rapporte à imbribus que par attraction, et n'a son sens propre qu'en le joignant à glacie. 3. Mundus ut ad Scythiam Riphæasque.... Virgile parle ici des pôles et de leur élévation relative à l'horizon de chaque peuple. - Riphæas, chaîne de montagnes que les poëtes confondent souvent avec les monts Hyperboréens. Il faut chercher les monts Riphées dans la Sarmatie, au-dessus des Palus-Méotides. Ces montagnes étaient généralement, pour les anciens, le point le plus reculé vers le nord, et ils |