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du Mogol, de la Chine & du Japon, verront bien qu'il eft fouvent auffi néceffaire de les féparer des hommes, lorfqu'on n'en a qu'une, que quand on en a plufieurs.

C'est le climat qui doit décider de ces choses. Que ferviroit d'enfermer les femmes dans nos pays du nord, où leurs moeurs font naturellement bonnes; où toutes leurs paffions font calmes, peu actives, peu raffinées ; où l'amour a fur le cœur un empire fi réglé que la moindre police fuffit pour les conduire ?

11 eft heureux de vivre dans ces climats qui permettent qu'on fe communique; où le fexe qui à le plus d'agrémens, femble parer la fociété; & où les femmes fe réfervant aux plaifirs d'un feul, fervent encore à l'amufement de tous.

CHAPITRE XI I.

De la pudeur naturelle.

OUTES les nations fe font également accorTdues à latacher du mépris l'incontinence des femmes: c'eft que la nature a parlé à toutes les nations. Elle a établi la défense, elle a établi l'attaque ; & ayant mis des deux côtés des defirs, elle a placé dans l'un la témérité, & dans l'autre la honte. Elle a donné aux individus pour fe conferver de longs efpaces de temps, & ne leur a donné pour fe perpétuer que des momens.

Il n'eft donc pas vrai que l'incontinence fuive les loix de la nature; elle les viole au contraire. C'est la modeftie & la retenue qui fuivent ces loix.

D'ailleurs il eft de la nature des êtres intelligens de fentir leurs imperfections: la nature a donc mis en nous la pudeur, c'est-à-dire,la honte de nos imperfections.

Quand donc la puiffance phyfique de certains climats viole la loi naturelle des deux fexes & celle des êtres intelligens, c'est au législateur à faire des loix civiles qui forcent la nature du climat & rétabliffent les loix primitives.

CHAPITRE XI I I.
De la jaloufie.

L faut bien diftinguer, chez les peuples, la ja

Iloufie de paffion d'avec celle de coutume,

de mœurs, de loix. L'une eft une fievre ardente qui dévore; l'autre, froide, mais quelquefois terrible, peut s'allier avec l'indifférence & le mépris.

L'une, qui eft un abus de l'amour, tire fa naiffance de l'amour même. L'autre tient uniquement aux mœurs, aux manieres de la nation, aux loix du pays, à la morale, & quelquefois même à la religion (1).

Elle eft prefque toujours l'effet de la force phyfique du climat, & elle cft le remede de cette force phyfique.

(1) Mahomet recommanda à fes fectateurs, de garder leurs fenimes: un certain iman dit en mourant la même chofe; & Confucius n'a pas moins prêché cette doctrine.

CHAPITRE XIV.

Du gouvernement de la maison, en orient.

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O change fit fouvent de femmes en orient

qu'elles ne peuvent avoir le gouvernement domestique. On en charge donc les eunuques; on leur remet toutes les clefs, & ils ont la difpofition des affaires de la maison." En Perfe, " dit M. Chardin, on donne aux femmes leurs "habits, comme on feroit à des enfans «. Ainfi ce foin qui femble leur convenir fi bien, ce foin qui par-tout ailleurs eft le premier de leurs foins, ne les regarde pas.

CHAPITRE X V.

Du divorce & de la répudiation.

Ly a cette différence entre le divorce & la ré

fait par un con

fentement mutuel à l'occafion d'une incompatibilité mutuelle ; au lieu que la répudiation fe fait par la volonté & pour l'avantage d'une des deux parties, indépendamment de la volonté & de l'avantage de l'autre.

Il eft quelquefois fi néceffaire aux femmes de répudier, & il leur est toujours fi fâcheux de le faire, que la loi eft dure, qui donne ce droit aux hommes, fans le donner aux femmes. Un mari eft le maître de la maifon; il a mille moyens

de

de tenir ou de remettre fes femmes dans le devoir; & il femble que, dans les mains, la répudiation ne foit qu'un nouvel abus de fa puiffance. Mais une femme qui répudie, n'exerce qu'un trifte remede. C'est toujours un grand malheur pour elle d'être contrainte d'aller chercher un fecond mari, lorfqu'elle a perdu la plupart de fes agrémens chez un autre. C'eft un des avantages des charmes de la jeuneffe dans les femmes que, dans un âge avancé, un mari fe porte à la bienveillance par le fouvenir de ses plaisirs.

C'est donc une regle générale, que dans tous les pays où la loi accorde aux hommes la faculté de répudier, elle doit auffi l'accorder aux femmes. Il y a plus dans les climats où les femmes vivent fous un esclavage domeftique, il femble que la loi doive permettre aux femmes la répudiation, & aux maris feulement le divorce.

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Lor que les femmes font dans un férail, le mari ne peut répudier pour caufe d'incompatibilité de mours: c'est la faute du mari, fi les mœurs font incompatibles.

La répudiation pour raifon de la ftérilité de la femme, ne fauroit avoir lieu que dans le cas d'une femme unique (1): lorfque l'on a plufieurs femmes, cette raifon n'eft pour le mari d'aucune importance.

La loi des Maldives (2) permet de reprendre une femme qu'on a répudiée. La loi du Mexique (3) défendoit de fe réunir, fous peine de la

(1) Cela ne fignifie pas que la répudiation pour raifon de la ftérilité, foit permise dans le chriftianifme. (2) Voyage de François Pyrard. On la reprend plutôt qu'une autre ; parce que dans ce cas, il faut moins de dépenfes.

(3) Hiftoire de fa conquête, par Salis, p. 499.
Tome II.

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vie. La loi du Mexique étoit plus fenfée que celle des Maldives; dans le temps même de la diffolution, elle fongeoit à l'éternité du mariage: au lieu que la loi des Maldives femble fe jouer également du mariage & de la répudiation.

La loi du Mexique n'accordoit que le divorce. C'étoit une nouvelle raifon pour ne point permettre à des gens qui s'étoient volontairement féparés, de fe réunir. La répudiation femble plutôt tenir à la promptitude de l'efprit, & à quelque paffion de l'ame; le divorce femble être une affaire de confeil.

Le divorce a ordinairement une grande utilité politique ; & quant à l'utilité civile, il est établi pour le mari & pour la femme, & n'eit pas toujours favorable aux enfans.

CHAPITRE X V I.

De la répudiation & du divorce, chez les Romains.

OMULUS permit au mari de répudier fa

Rus pelle avoit commis un adultere,

préparé du poifon, ou falfifié les clefs. Il ne donna point aux femmes le droit de répudier leur mari. Plutarque (1) appelle cette loi, une loi trèsdure.

Comme la loi d'Athenes (2) donnoit à la femme auffi-bien qu'au mari la faculté de répudier; & que l'on voit que les femmes obtinrent

(1) Vie de Romulus.

(2) C'étoit une loi de Solon,

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