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DISCOURS

SUR

LA CAUSE DE LA TRANSPARENCE DES CORPS,

PRONONCÉ LE 25 AOUT 1720.

L'académie proposa l'année dernière un second prix sur la transparence. Cette matière, liée avec le système de la lumière, a paru sans doute trop étendue, et a rebuté les auteurs.

pu

Privés des secours étrangers, il faut que le blic y perde le moins possible, mais il y perdra toujours; et, dans la nécessité où nous sommes de traiter ce sujet, convaincus de notre peu de suffisance, nous aimons encore mieux nous excuser sur le peu de temps que nos occupations nous ont laissé.

que

Il semble d'abord qu'Aristote savoit bien.ce c'étoit que la transparence', puisqu'il définissoit la lumière l'acte du transparent en tant que transparent; mais, pour bien dire, il ne connoissoit ni la transparence ni la lumière. Accoutumé à tout expliquer par la cause finale, au lieu de

raisonner par la cause formelle, il regardoit la transparence comme une idée claire, quoiqu'elle ne puisse paroître telle qu'à ceux qui savent déjà ce que c'est que la lumière.

La plupart des modernes croient que la transparence est l'effet de la rectitude des pores, lesquels peuvent, selon eux, facilement transmettre l'action de la lumière.

Un de nos confrères a cru devoir douter des pores droits, en disant que si l'on coupe un cube .de verre, il transmet la lumière de tous côtés. Pour moi, j'avoue que cette hypothèse des pores droits me paroît plus ingénieuse que vraie : je ne trouve pas que cette régularité s'accorde avec l'arrangement fortuit qui produit toutes les formes. Il me semble que cette idée des pores droits ne rend pas raison de la question dont il s'agit; car ce n'est pas de ce que quelques corps sont transparents que je suis embarrassé, mais de ce qu'ils ne sont pas tous transparents.

Il est impossible qu'il y ait sur la terre une matière si condensée qu'elle ne donne passage aux globules. Supposez des póres aussi tortus que vous voudrez; il faut qu'ils laissent passer la lumière, puisque la matière éthérée pénètre tous les corps.

Les corps sont donc tous transparents d'une manière absolue; mais ils ne le sont pas tous

d'une manière relative. Ils sont tous transparents, parce qu'ils laissent tous passer des rayons de lumière; mais il n'en passe pas toujours en assez grand nombre former sur la rétine l'image des objets.

pour

On voit par les expériences de Newton que tous les corps colorés absorbent une partie des rayons, et renvoient l'autre : ils sont donc opaques en tant qu'ils renvoient les rayons, et transparents en tant qu'ils les absorbent.

Nous voyons, dans le Journal des Savants, qu'un homme qui resta six mois enfermé dans une prison obscure voyoit sur la fin tous les objets très - distinctement, ses yeux étant accoutumés à recevoir un très-petit nombre de rayons : l'organe de la vue commença à être ébranlé par une lumière si foible, qu'elle étoit insensible à d'autres yeux qui n'avoient pas été ainsi préparés.

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y a apparence qu'il y a des animaux pour lesquels les murailles les plus épaisses sont transparentes.

pe

De tout ceci je crois pouvoir admettre ce principe, que les corps qui opposent le moins de tites surfaces solides aux rayons de lumière qui les traversent, sont les plus transparents; qu'à proportion qu'ils en opposent davantage, ils le paroissent moins; et qu'ils commencent de paroître opaques dès qu'ils ne laissent pas passer

assez de rayons pour ébranler l'organe de la vision; ce qui est encore relatif à la conformation des yeux, et à la disposition présente où ils se

trouvent.

Lorsque nous pourrons un peu méditer sur cette matière, nous pourrons tirer un meilleur parti de ces idées, et expliquer ce que nous ne faisons ici que montrer.

OBSERVATIONS

SUR L'HISTOIRE NATURELLE,

LUES LE 20 NOVEMBRE 1721.

I. Ayant observé dans le microscope un insecte dont nous ne savons pas le nom (peut-être même qu'il n'en a point, et qu'il est confondu avec une infinité d'autres qu'on ne connoît pas), nous remarquâmes que ce petit animal, qui est d'un trèsbeau rouge, paroît presque grisâtre lorsqu'on le regarde au travers de la lentille, ne conservant qu'une petite nuance de rouge; ce qui nous paroît confirmer le nouveau système des couleurs de Newton, qui croit qu'un objet ne paroît rouge que parce qu'il renvoie aux yeux les rayons capables de produire la sensation du rouge, et absorbe ou renvoie foiblement tout ce qui peut exciter celle des autres couleurs; et comme la principale vertu du microscope est de réunir les rayons, qui, étant séparés, n'auroient point assez de force pour exciter une sensation, il est arrivé dans cette observation que les rayons du gris se

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