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At pius Æneas dextram tendebat inermem,(6 Nudato capite, atque suos clamore vocabat : Quò ruitis? quæve ista repens discordia surgit? O cohibete iras! ictum jam foedus, et omnes Compositæ leges: mihi jus concurrere soli : Me sinite, atque auferte metus: ego foedera faxo Firma manu: Turnum jam debent hæc mihi sacra. Has înter voces, media inter talia verba, Ecce viro stridens alis allapsa sagitta est :

Incertum quâ pulsa manu, quo turbine adacta;

Quis tantam Rutulis laudem, casusne, deusne,

Attulerit pressa est insignis gloria facti ;

:

Nec sese Æneæ jactavit vulnere quisquam.

Turnus, ut Ænean cedentem ex agmine vidit, Turbatosque duces, subitâ spe fervidus ardet : Poscit equos atque arma simul, saltuque superbus Emicat in currum, et manibus molitur habenas. Multa virum volitans dat fortia corpora leto;

Cependant l'ardeur croît, le massacre redouble.
D'Énée à cet aspect le tendre cœur se trouble;
Aussitôt vers les siens au carnage animés

Il court, la tête nue et les bras désarmés;
Et leur tendant les mains, d'une voix paternelle
Il s'écrie : « Arrêtez! quelle ardeur criminelle
>> Vous ramène aux combats? Arrêtez ! arrêtez !
» Moi seul dois en ce jour accomplir les traités;
» De Turnus les destins me promirent la tête,
» Moi seul je dois tenter cette grande conquête.
» Ne craignez rien; j'y cours, et le ciel aujourd'hui
» Verra finir Turnus et la guerre avec lui :

» Les dieux m'en sont garans. » Tandis qu'il parle encore,
Un trait siffle et l'atteint. D'où part-il? On l'ignore.
Quel bras peut s'honorer de ce coup glorieux ?

Est-ce la main du sort, des hommes, ou des dieux?
Un dieu seul sur Énée obtint cette victoire

Sans doute, et nul mortel n'en réclama la gloire.

A peine des Troyens il voit partir le roi,
Ses chefs déconcertés, son camp saisi d'effroi;
Animé par l'espoir, enflammé de colère,
Mes armes! mes chevaux! dit son fier adversaire.
Tout est prêt; sur son char il s'élance soudain,

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Élève un front superbe, et les rênes en main

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Il presse ses coursiers ; ils volent, le char roule,
Des Troyens dans sa course il écrase la foule :
Ici tombent les morts, là roulent les mourans,
De bataillons entiers il moissonne les rangs,

Semineces volvit multos, aut agmina curru

Proterit, aut raptas fugientibus ingerit hastas.
Qualis apud gelidi cùm flumina concitus Hebri
Sanguineus Mavors clypeo increpat, atque furentes
Bella movens immittit equos: illi æquore aperto

Ante notos zephyrumque volant; gemit ultima pulsu
Thraca pedum; circùmque atræ Formidinis ora,
Iræque, Insidiæque, dei comitatus, aguntur :

Talis equos alacer media inter prælia Turnus

Fumantes sudore quatit, miserabile cæsis

Hostibus insultans; spargit rapida ungula rores

Sanguineos, mixtâque cruor calcatur arenâ.

Jamque neci Sthenelumque dedit, Thamyrimque, Pholumqu Hunc congressus et hunc, illum eminus; eminus ambo Imbrasidas, Glaucum atque Laden, quos Imbrasus ipse

Nutrierat Lyciâ, paribusque ornaverat armis,

Vel conferre manum, vel

equo prævertere ventos.

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Désarme les fuyards, s'élance à leur poursuite,
Et de leurs propres traits ensanglante leur fuite.
Tel de l'Hèbre glacé quand le terrible dieu,
Frappant son bouclier, farouche, l'œil en feu,
A lancé ses coursiers, précurseurs de la guerre,

Plus

prompts que les zéphyrs, plus craints que le tonnerre; Ils partent, le char vole, et la terre en frémit;

Sous leurs pas foudroyans la Thrace au loin gémit;
De cadavres sanglans la Victoire entourée,

La Déroute au front pâle, à la marche égarée,
La bouillante Fureur, le Piége insidieux,

Le Meurtre au bras sanglant, et le fer, et les feux,
Du dieu dévastateur sont l'escorte effrayante;
Après lui la Ruine, au-devant l'Épouvante :
Tel s'élance Turnus; de ses coursiers fumans
Ainsi sa main terrible aiguillonne les flancs;
Dans son œil enflammé brille une affreuse joie;
II presse, atteint, égorge et foule aux pieds sa proie;
Et des rangs enfoncés écrasant les débris,

Des mourans sous les morts il étouffe les cris:
Le sang au loin jaillit sous sa roue embrasée,
Sur le sable rougi pleut l'affreuse rosée,
Et du char dont la course emporte le héros
Le rapide sillon s'en abreuve à grands flots :
Il abat de sa main Sthénélus et Thamyre;
De loin du trait mortel l'ardent Pholus expire;
De loin il a frappé les deux fils d'Imbrasus,
Qu'aux sommets lyciens leur mère avoit conçus;

Parte aliâ, media Eumedes in prælia fertur,

Antiqui proles bello præclara Dolonis;

Nomine avum referens, animo manibusque parentem,

Qui quondam, castra ut Danaûm speculator adiret,

Ausus Pelidæ pretium sibi poscere currus:

Illum Tydides alio pro talibus ausis

Affecit pretio; nec equis adspirat Achillis.

Hunc procul ut campo Turnus prospexit aperto,

Antè levi jaculo longum per inane secutus,

Sistit equos bijuges, et curru desilit, atque
Semianimi lapsoque supervenit, et pede collo
Impresso, dextræ mucronem extorquet, et alto
Fulgentem tingit jugulo, atque hæc insuper addit:
En, agros, et quam bello, Trojane, petisti,
Hesperiam metire jacens : hæc præmia, qui me

Ferro ausi tentare, ferunt; sic moenia condunt.

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