EXTRAIT DU DISCOURS PRONONCÉ PAR M. L'ABBÉ VIRGUIN, SUR LES OBJETS QUI DOIVENT COMPOSER LE CABINET D'HISTOIRE NATURELLE DU DÉPARTEMENT. DEPUIS EPUIS plusieurs années la Société d'agriculture se propose de former une collection des objets d'histoire naturelle que peut offrir le département de la Marne. Une conception aussi intéressante, et dont on ne peut méconnaître l'utilité pour les progrès de notre agriculture et de notre industrie, n'a jamais été abandonnée; seulement on a été forcé de suspendre son exécution pendant ces tems de guerres et de désastres dont notre pays a été particulièrement le théâtre. Aussitôt que nous avons vu renaître des jours de paix et de sérénité, la Société a repris avec empressement son ancien projet, et elle suivra avec zèle la direction qu'elle s'est tracée, autant que le permettront les circonstances et les moyens dont elle pourra disposer. Dans une création de ce genre, le premier soin doit être de passer en revue les élémens qui peuvent y entrer. Cette première reconnaissance de nos richesses, faite rapidement et par grandes masses, nous suffira pour les mieux apprécier. Si cette contrée paraît l'une des moins favorisées du Royaume sous le rapport de l'histoire naturelle, on verra que les matériaux qu'elle présente sont encore assez nombreux et assez importans, pour que notre entreprise ne soit pas dénuée d'intérêt aux yeux des amis des sciences; on verra que l'industrie peut tirer de notre sol et de nos produits indigènes, des ressources multipliées et des germes féconds de prospérité. Le minéralogiste trouvera chez nous, outre la craie dont une grande partie de notre sol est formée, des argiles, des marnes, des gypses, des sables de diverses espèces, des grès, des quartz cariés, des silex, des stalactites, des pyrites, des cendres sulfureuses dont l'agriculture tire un si grand parti, et, sur divers points, de nombreux fossiles qui peut-être n'ont point été assez étudiés. Cette division de votre collection sera accompagnée d'une carte générale semblable à celles qui accompagnent la description minéralogique de la France, de MM. Guettard et Monnet; mais sur une échelle plus étendue, faisant connaître les diverses zônes de terreins dont se compose notre territoire, et enrichie de signes indicatifs du gisement des substances les plus remarquables. On estime que la Fiore du département comprendra environ dix-huit cents plantes ; aucune sans doute n'est particulière à ce pays, et n'offre aux botanistes l'espoir de quelques découvertes; mais le caractère spécial de localité que nous donnerons à notre herbier, le rendra intéressant pour nos concitoyens et utile peut-être à quelques-uns de nos arts industriels. Un herbier ordinaire est sujet aux ravages des insectes, et d'ailleurs ne présente jamais que des individus morts, et privés par conséquent de fraicheur et de coloris : nous ne désespérons pas de joindre au nôtre, une collection de nos plantes dessinées et coloriées d'après nature; ce sera un travail long et pénible sans doute, mais non -pas impossible à cet esprit de suite qui doit ac compagner les projets d'une véritable utilité. A côté des plantes se rangeront leurs fruits et leurs graines, au moins les plus remarquables par leurs formes et leurs usages. A la suite des végétaux qu'on peut considérer dans leur ensemble, viendra se placer le cadre des échantillons de nos différens bois, soit de nos arbres forestiers, soit de ceux que d'habiles essais ont introduits déjà sur les points les plus stériles de ce département. La partie zoologique offrira peu d'individus dans les grands ordres des crustacées et des testacées. Dans ce dernier, cependant, nos coquillages fluviatiles et terrestres se recommanderont à l'attention du géologue, empressé de comparer les espèces vivantes à celles dont nos fossiles lui donnent les débris. Nous ne pouvons pas nous promettre une récolte bien riche en poissons, en reptiles, en amphibies et quadrupèdes ovipares. L'ordre même des oiseaux n'offre rien que le reste de la France ne possède avec nous; mais la collection de nos insectes plus facile à former et plus nombreuse, pourra piquer la curiosité par la singularité des formes, la variété et l'éclat des couleurs de quelques unes de ses classes: quelques espèces surtout appelleront notre attention par les services qu'elles nous rendent ou le tort qu'elles nous font ; et parmi ces dernières figureront les insectes redoutés du jardinier, du laboureur et surtout de l'habitant de nos précieux vignobles. Si l'espace ne nous permet pas d'admettre dans notre cabinet les plus grands individus de l'ordre des quadrupedes vivipares, les plus petits du moins y trouveront place, et quand aux autres nous ne négligerons pas de recueillir et de classer les échantillons de leurs produits les plus utiles; ainsi nous formerons le tableau intéressant pour notre industrie, des laines de nos moutons indigènes et des troupeaux améliorés par l'introduction des races étrangères. Enfin l'espèce la plus parfaite, l'homme, viendra dans notre collection compléter la série des êtres naturels dont il est le chef et le roi. Une ostéologie, une myologie, une névrologie et une angiologie, avec quelques autres morceaux d'anatomie, offriront un objet d'étude applicable à l'art de guérir, |