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gêne la vie de la campagne, peu de rapports étrangers viennent y traverser les affections et dérouter les sentimens. Les liens de famille y sont plus resserrés. C'est au milieu des peuples pasteurs qu'est née la dictature paternelle. A la campagne, l'esprit est plus fécond parce qu'il est plus libre, les idées s'étendent avec l'horison, et l'expression plus abondante se colore de toutes les nuances d'un beau matin.

Racine, après avoir tracé le plan de ses admirables tragédies, allait, pour les écrire, s'entourer des inspirations de la campagne. Cicéron y a composé la plupart des beaux ouvrages qui nous sont parvenus. Chacune de ses nombreuses habitations avait la destination d'une composition particulière. Par son site, ses distributions, ses ornemens, elle était appropriée au genre du sujet qui devait y être traité, et notre imagination saisira facilement la différence des objets qui devaient entourer cet homme de génie, quand il peignait les charmes de l'amitié, les consolations de la vieillesse, ou lorsqu'inspiré par une vertueuse indignation, dans ses Verrines, ses Catilinaires, ses Philippiques, appelait le châtiment des lois et la haine du monde sur les oppresseurs et les mauvais citoyens.

Enfin, c'est aux champs, c'est en présence des merveilles de la nature, que l'ame, s'affranchissant des impressions terrestres, élance la pensée jusqu'au pied du trône de l'Éternel et se pénètre de la puissance du Créateur au spectacle ravissant de ses œuvres.

Mais, Messieurs, si je pense qu'à la campagne le bonheur est plus doux et plus facile, je pense aussi qu'il est possible dans toutes les situations. Être heureux est la destination de tous les hommes, et si nous la remplissons si rarement, c'est que trop souvent nous cherchons le bonheur où il n'est pas, et que nous restons sourds à la voix qui nous crie: « REMPLIS TES

DEVOIRS SOIS UTILE!

COMPTE RENDU

DES TRAVAUX DE LA SOCIÉTÉ,

PENDANT L'ANNÉE 1822,

Pav M. le D. PRIN, Vice- Secrétaire
es Archiviste.

MESSIEURS,

CHAQUE année, à pareille époque, la Société d'agriculture vient, dans cette solennité, mettre sous les yeux de ses concitoyens, par l'organe de son secrétaire, l'analyse sommaire de ses travaux. Cette séance, annuellement honorée de la présence du premier Magistrat du département, du concours des citoyens recommandables de toutes les classes, m'impose de grandes obligations. Veuillez bien croire, Messieurs et Collégues, que mon zèle suppléera mes forces.

Pour remplir fidèlement la tâche qui m'est confiée je devrais d'abord vous dire que jamais on n'avait observé dans cette Société une envie plus vive de remplir dignement la carrière annuelle, que jamais votre sollicitude n'a été plus grande, et que cependant d'autres temps ont offert des résultats plus nombreux.

Les améliorations agricoles que ce département a déjà éprouvées, et auxquelles, je suis fier de le dire, vous n'êtes point restés étrangers, vous ont engagé à vous occuper plus particulièrement de l'utile compagnon des

travaux de l'agriculteur. Vous êtes pressés de voir les chevaux de la Champagne reprendre la réputation mé ritée dont ils ont joui, et vos vœux s'associant à ceux du chef de l'administration départementale, vous avez sollicité, de S. Exc. le Ministre Secrétaire d'état de l'Intérieur, l'envoi d'un étalon arabe. Nul doute que nos chevaux, par le croisement des races, et surtout par leur alliance avec celle qui se rapproche le plus du type originaire, ne soient susceptibles de reprendre le rang qu'ils occupaient autrefois, et duquel des guer res longues et désastreuses semblent les avoir fait descendre. Vous avez remarqué que, depuis dix ans et plus, on se livre, dans ce département, avec un soin digne d'éloges et d'encouragement, à l'éducation de ce beau quadrupède, et que déjà une notable amélioration s'est fait sentir dans cette branche importante de l'agronomie.

Au moment des fortes chaleurs que nous avons esBuyées, votre attention s'est portée toute entière sur ce noble animal, et vous m'avez chargé de rédiger une note sur le traitement à employer pour arrêter ou prévenir les accidens auxquels il pourrait être exposé; accidens connus sous les noms de coup de sang, de coup de soleil, de chevaux brûlés. Depuis quelque temps, aussi, votre sollicitude a été éveillée par d'autres accidens que les chevaux de cette contrée, principalement, ont éprouvés, et qui ont presque toujours été des inflammations des bronches et de l'estomac, accompagnées de fièvre. Vous avez pris dès-lors l'engagement de rechercher à quelles causes doivent être attribuées ces maladies desquelles je ne caractériserai ici ni la marche ni les symptômes, mais qui ont cédé à l'emploi des adoucissans et à un régime approprié. Mon opinion, partagée par quelques-uns de nos Collégues, est que les bronchites et les gastrites auxquelles les chevaux de nos agriculteurs sont plus particulièrement exposés, pourraient bien être attribuées à l'usa

ge habituel des foins provenant des prairies artificielles, surtout s'ils ont été récoltés sous l'influence d'une température humide et pluvieuse. Nous avons pu croire, en effet, que ce fourrage que nous sommes bien loin de déprécier, et dont nous reconnaissons avec vous l'heureux emploi sur nos terres, obtenu presque toujours par des semis de plâtre et de cendres, croissant par conséquent sous l'influence de ces modificateurs, pourrait bien recéler en lui-même des principes excitans, assez prononcés pour donner lieu à ces maladies. S'il pouvait arriver que la présence de ces deux engrais, cause déterminante d'une végétation trop rapide, influençât les plantes de manière à les rendre sèches et arides, ne devriez-vous pas alors chercher dans quelles conditions ces engrais doivent être employés, et s'il n'est pas un terme auquel il serait prudent de s'arrêter. Nos conjectures ont encore été fortifiées par la grande diminution des thièbles dont les abeilles périssent chaque jour d'une manière effrayante. Nous nous sommes demandés si ce précieux insecte, en moissonnant le parfum des fleurs ne trouvait pas la mort au milieu de ses industrieux travaux. Voilà, Messieurs et Collégues, deux questions importantes que vous êtes impatiens de résoudre, et desquelles le temps et l'expérience nous donneront la solution.

Vous pouvez tout attendre, pour vous aider dans l'examen de ces questions, de l'association qui, sous le titre de Comice agricole, vient unir ses efforts aux vôtres pour atteindre le même but. Une correspondance franche et active s'est établie, et les secours que vous vous prêtez mutuellement, en unissant la théorie à la pratique, rendront les succès plus faciles.

Vous n'avez pas non plus oublié l'agriculteur. Déjà vous avez appelé la sollicitude des philantropes sur les maladies auxquelles il pourrait être plus particu

lièrement exposé, et l'hygiène fixe toute votre attention. Il vous a paru essentiel de vous occuper de la salubrité des logemens de la classe nombreuse des laboureurs, et des bâtimens nécessaires à leur exploitation. Ces vues générales, bien connues et mises en pratique, vous paraissent tendre à l'amélioration du sort du cultivateur et au perfectionnement des races d'animaux qu'on élève.

Aujourd'hui nous pouvons nous assurer que le blé de Tangarock a eu le succès le plus complet. M. LaMAIRESSE, chargé, au printemps de 1821, d'ensemencer les 400 grains qui nous avaient été envoyés, en a recolté 80 grains pour un. Cette réussite étonnera moins lorsqu'on voudra bien réfléchir que le climat de la Mer noire et de la Mer d'Asof a, à peu près, la même tem~ pérature que le nord et le centre de la France. Cette année, notre Collégue a renouvelé ses expériences et il n'a obtenu que cinq grains pour un. Je vais vous faire connaître les motifs de cette différence, en vous présentant l'analyse des expériences de M. RoUSSEAU.

"

Chargé de faire, au printemps de cette année, l'essai de trois espèces de froment de mars, Chinois, Kalmouck et Froment rouge; M. ROUSSEAU s'exprime ainsi: Le désir que j'avais de mettre à l'abri de tout danger la petite quantité de semences que vous m'aviez confiée, m'a engagé à la faire cultiver dans votre jardin des plantes. Mais, soit que le sol trop ingrat n'ait pas convenu à la culture de ces espèces de blés, soit encore, et c'est ce qui me paraît le plus vraisemblable, que les saisons du printemps et de l'été, qui ont été extrêmement sèches et chaudes, aient nui à ces récol tes, comme elles ont nui à toutes celles du printemps en général; les essais tentés n'ont pas donné les résultats que vous pouviez attendre. Les épis que j'ai obtenus ne m'ont offert qu'un grain mal nourri. Je me

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