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»cens? » à cet autre enfin (a) où Charles. le chauve (b) parle des terres cenfuelles, dont le cens avoit de toute antiquité appartenu au roi ?

Remarquez qu'il y a quelques textes qui paroiffent d'abord contraires à ceque j'ai dit, & qui cependant le confirment. On a vu ci-deffus que les hommes libres dans la monarchie n'étoient obligés qu'à fournir de certaines voitures; le capitulaire que je viens de citer appelle cela cenfus (c), & il l'oppofe au cens qui étoit payé par les ferfs.

De plus, l'édit de Pistes (d) parle de ces hommes Francs qui devoient payer le cens royal pour leur tête (a) & pour leurs cafes, & qui s'étoient vendus pendant la famine. Le roi veut qu'ils foient rachetés. C'est que ceux (ƒ) qui étoient affranchis par lettres du roi,

(a) De l'an 805, art 8.

(b) Unde cenfus ad partem regis exivit antiquitùs capitulaire de l'an 805, art. 8.

(c) Cenfibus vel paraveredis quos Franci homines ad regiam poteftatem exfolvere debent.

(d) De l'an 864, art. 34, édit. de Baluze, p. 192. (e) De illis Francis hominibus qui cenfum regium de fuo capite & de fuis recellis debeant, ibid.

(f) L'article 28 du même édit explique bien tout cela; il met même une diftinction entre l'affranchi Romain, & l'affranchi Franc: on y voit que le cens n'étoit pas général. Il faut le lire,

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n'acquéroient point ordinairement une pleine & entiere liberté (a); mais ils payoient cenfum in capite; & c'eft de cette forte de gens dont il eft ici parlé.

Il faut donc fe défaire de l'idée d'un cens général & univerfel, dérivé de la police des Romains, duquel on fup pofe que les droits des feigneurs ont dérivé de même par des ufurpations. Ce qu'on appelloit cens dans la monarchie Françoife, indépendamment de l'abus que l'on a fait de ce mot, étoit un droit particulier levé fur les ferfs par les maîtres.

Je fupplie le lecteur de me pardonner l'ennui mortel que tant de citations doivent lui donner: je ferois plus court, fije ne trouvois toujours devant moi le livre de l'établiffement de la monarchie Françoife dans les Gaules, de M. l'Abbé Dubos. Rien ne recule plus le progrès des connoiffances, qu'un mauvais ouvrage d'un auteur célebre; parce qu'avant d'inftruire, il faut commencer par détromper.

(a) Comme il paroît par un capitulaire de Charle magne, de l'an 813, déjà cité.

CHAPITRE XV I.
Des leudes ou vaffaux.

'AI parlé de ces volontaires qui, chez les Germains, fuivoient les princes dans leurs entreprifes. Le même ufage fe conferva après la conquête. Tacite les défigne par le nom de compagnons (a); la loi falique par celui d'hommes qui font fous la foi du roi (b); les formules de Marculfe (c) par celui d'antrutions du roi (d); nos premiers hiftoriens par celui de leudes (e), de fideles; & les fuivans par celui de vaffaux (f) & feigneurs.

On trouve dans les lois Saliques & Ripuaires un nombre infini de difpofitions pour les Francs, & quelques-unes feulement pour les antruftions. Les difpofitions fur ces antruftions font différentes de celles faites pour les autres Francs; on y regle par-tout les biens (a) Comites.

(b) Qui funt in trufte regis, tit. 44, art. 4. (c) Livre I, formule 18.

(d) Du mot trew, qui fignifie fidele chez les Alle mands, & chez les Anglois true vrai.

(e) Leudes, fideles.

(f) Vuffalli, feniores.

des Francs; & on ne dit rien de ceux des antrustions: ce qui vient de ce que les biens de ceux-ci fe régloient plutôt par la loi politique que par la loi civile, & qu'ils étoient le fort d'une armée & non le patrimoine d'une famille.

Les biens réfervés pour les leudes furent appellés des biens fifcaux (a), des bénéfices, des honneurs, des fiefs, dans les divers auteurs & dans les divers temps:

On ne peut pas douter que d'abord les fiefs ne fuffent amovibles (b). On voit dans Grégoire de Tours (c), que l'on ôte à Sunegifile & à Galloman tout ce qu'ils tenoient du fifc, & qu'on ne leur laiffe que ce qu'ils avoient en propriété, Gontran, élevant au trône fon neveu Childebert, eut une conférence fecrette avec lui, & lui indiqua ceux. (d) à qui if devoit donner des fiefs, & ceux à qui

(a) Fifcalia. Voyez la formule 14 de Marculfe, livre I. Il eft dit, dans la vie de S. Maur, dedit fifcum unum ; & dans les annales de Metz fur l'an 747, dedit illi comitatus & fifcos plur mos. Les biens destinés à l'entretien de la famille royale étoient appellés regalia.

(b) Voyez le livre I, tit. 1, des fiefs ; & Cujas sur ce livre.

(c) Livre IX, ch. xxxvIII.

(d) Quos honoraret muneribus, quos ab honore de pelleret, ibid. liv, VII.

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il devoit les ôter. Dans une formule de Marculfe (a), le roi donne en échange, non feulement des bénéfices que fon fifc tenoit, mais encore ceux qu'un autre avoit tenus. La loi des Lombards oppofe les bénéfices à la propriété (b). Les hiftoriens, les formules, les codes des différens peuples barbares, tous les monumens qui nous reftent, font unanimes. Enfin, ceux qui ont écrit le livre des fiefs (c), nous apprennent que d'abord les feigneurs purent les ôter à leur volonté, qu'enfuite ils les affurerent pour un an (d), & après les donnerent pour la vie.

(a) Vel reliquis quibufcumque beneficiis, quodcum que ille, vel fifcus nofter, in ipfis locis tenuiffe nofciture Livre I, formule 30.

(b) Livre III, tit. 8, §. 3.

(c) Feudorum, lib. I, tit. 1.

(d) C'étoit une espece de précaire que le feigneur renouvelloit, ou ne renouvelloit pas l'année d'en uite, comme Cujas l'a remarqué.

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