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Ils ne regardoient pas les villes comme une affemblée d'habitans, mais comme des lieux propres à fe fouftraire à leur puiffance. Ils n'avoient aucun art pour les affiéger, & ils s'expofoient beaucoup en les affiégeant; ils vengeoient par fang tout celui qu'ils venoient de répandre.

le

CHAPITRE X X I.

Loi civile des Tartares.

LE pere du Halde dit, que chez les

Tartares, c'eft toujours le dernier des mâles qui eft l'héritier: par la raison qu'à mefure que les aînés font en état de mener la vie paftorale, ils fortent de la maifon avec une certaine quantité de bétail que le pere leur donne, & vont former une nouvelle habitation. Le dernier des mâles, qui refte dans la maison avec fon pere, eft donc fon héritier naturel.

J'ai oui dire qu'une pareille coutume étoit obfervée dans quelques petits diftricts d'Angleterre : & on la trouve encore en Bretagne, dans le duché dẹ Rohan, où elle a lieu pour les rotures.

C'est sans doute une loi pastorale venue de quelque petit peuple Breton, ou portée par quelque peuple Germain. On fait, par Céfar & Tacite, que ces derniers cultivoient peu les terres.

CHAPITRE

XXII.

D'une loi civile des peuples Germains.

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'EXPLIQUERAI ici comment ce texte particulier de la loi falique que l'on appelle ordinairement la loi falique tient aux inftitutions d'un peuple qui ne cultivoit point les terres, moins qui les cultivoit peu.

ou du

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La loi falique (a) veut que, lorf-. qu'un homme laifie des enfans les mâles fuccedent à la terre falique au préjudice des filles.

Pour favoir ce que c'étoit que les terres faliques, il faut chercher ce que c'étoit que les propriétés ou l'ufage des térres chez les Francs, avant qu'ils fuffent fortis de la Germanie.

M. Echard a très bien prouvé que le mot falique vient du mot fala, qui fignifie maifon; & qu'ainfi la terre falique (a) Tit. 62.

étoit la terre de la maison. J'irai plusloin; & j'examinerai ce que c'étoit que la maifon, & la terre de la maison, chez les Germains.

«Ils n'habitent point de villes, dit » Tacite (a), & ils ne peuvent fouffrir >> que leurs maisons se touchent les unes, >> les autres; chacun laiffe autour de fa >> maison un petit terrain ou efpace, >> qui eft clos & fermé ». Tacite parloit exactement. Car plufieurs lois des codes (b) barbares ont des difpofitions différentes contre ceux qui renverfoient cette enceinte, & ceux qui pénétroient dans la maifon même.

Nous favons, par Tacite & Céfar, que les terres que les Germains culti voient ne leur étoient données que pour un an; après quoi elles redevenoient publiques. Ils n'avoient de patrimoine que la maison, & un morceau de terre dans l'enceinte autour de la maison (c).

(a) Nullas Germanorum populis urbes habitari fatis notum eft, ne pati quidem inter fe juntas fedes; colune: difcreti, ut nemus placuit. Vicos locant, non in noftrum morem connexis & cohærentibus ædificiis: fuam quif-que domum fpatio circumdat. De morib. Germ.

(b) La loi des Allemands, ch. X ; & la loi des Bavarois, tit. 10. §. 1 & 2.

(c), Cette enceinte s'appelle curtis dans les char

tres..

C'est ce patrimoine particulier qui appartenoit aux mâles. En effet, pourquoi auroit-il appartenu aux filles? Elles paffoient dans une autre maifon. *

La terre falique étoit donc cette enceinte qui dépendoit de la maison du Germain; c'étoit la feule propriété qu'il eût. Les Francs, après la conquête, acquirent de nouvelles propriétés, & on continua à les appeler des terres faliques. Lorfque les Francs vivoient dans la Germaine, leurs biens étoient des efclaves, des troupeaux, des chevaux des armes, &c. La maifon & la petite portion de terre qui y étoit jointe, étoient naturellement données aux enfans mâles qui devoient y habiter. Mais lorfqu'après la conquête, les Francs eurent acquis de grandes terres, on trouva dur que les filles & leurs enfans ne puffent y avoir de part. Il s'introduifit un ufage, qui permettoit au pere de rappeler fa fille & les enfans de fa fille. On fit taire la loi; & il falloit bien que ces fortes de rappels fuffent communs, puifqu'on en fit des formules (a).

(a) Voyez Marculfe, liv. II. form. 10 & 12; l'appendice de Marculfe, form. 49; & les formules anciennes, appellées de Sirmond, form. 22.

Parmi toutes ces formules, j'en trouve une finguliere (a). Un aïeul rappelle fes petits-enfans pour fuccéder avec fes fils & avec fes filles. Que devenoit donc la loi falique? Il falloit que, dans ces tempslà même, elle ne fût plus obfervée; du que l'ufage continuel de rappeller les filles eût fait regarder leur capacité de fuccéder comme le cas le plus ordinaire.

nom,

La loi falique n'ayant point pour objet une certaine préférence d'un fexe fur un autre, elle avoit encore moins celui d'une perpétuité de famille, de ou de tranfmiffion de terre : tout cela n'entroit point dans la tête des Germains. C'étoit une loi purement économique, qui donnoit la maifon, & la terre dépendante de la maison, aux mâles qui devoient l'habiter, & à qui par conféquent elle convenoit le mieux,

Il n'y a qu'à transcrire ici le titre des alleus de la loi falique, ce texte fi fameux, dont tant de gens ont parlé, & que fi peu de gens ont lu.

1o. «Si un homme meurt fans enfans, fon pere ou fa mere lui fuccé» deront. 2°. S'il n'a ni pere ni mere, »fon frere ou fa foeur lui fuccéderont,

(a) Form. 55. dans le recueil de Lindembroch,

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