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CHAPITRE

VOLLA

VII.

De l'Afrique & de l'Amérique. OILA ce que je puis dire fur l'Afie & fur l'Europe. L'Afrique eft dans un climat pareil à celui du midi de l'Afie, & elle eft dans une même fervitude. L'Amérique (a), détruite & nouvellement repeuplée par les nations de l'Europe & de l'Afrique, ne peut guere aujourd'hui montrer fon propre génie: mais ce que nous favons de fon ancienne hiftoire eft très-conforme à nos principes.

CHAPITRE VIII.

De la capitale de l'Empire.

UNE

dire,

NE des conféquences de ce que nous venons de dire, c'est qu'il eft important à un très-grand prince de bien choifir le fiege de fon empire. Celui qui

(a) Les petits peuples barbares de l'Amérique font appelés Indios bravos, par les Espagnols: bien plus difficiles à foumettre que les grands empires du

le placera au midi courra rifque de per→ dre le nord; & celui qui le placera au nord, confervera aifément le midi. Je ne parle pas des cas particuliers: la mécanique a bien fes frottemens, qui fouvent changent ou arrêtent les effets de la théorie la politique a auffi les fiens.

;

LIVRE

XVIII.

Des Lois dans le rapport qu'elles ont avec la nature du terrain.

CHAPITRE PREMIER.. Comment la nature du terrain influe fur les lois.

A bonté des terres d'un pays y établit naturellement la dépendance. Les gens de la campagne, qui y font la principale partie du peuple, ne font pas fi jaloux de leur liberté : ils font trop occupés & trop pleins de leurs affaires particulieres. Une campagne qui regorge de biens, craint le pillage, elle craint une armée. » Qui eft ce qui » forme le bon parti, difoit Cicéron à » Atticus (a)? Seront-ce les gens de » commerce & de la campagne ? à moins » que nous n'imaginions qu'ils font op» pofés à la monarchie, eux à qui tous » les gouvernemens font égaux, dès» lors qu'ils font tranquilles «<.

Ainfi le gouvernement d'un feul fe trouve plus fouvent dans les pays fertiles, & le gouvernement de plufieurs dans les pays qui ne le font pas; ce qui eft quelquefois un dédommagement.

La ftérilité du terrain de l'Attique y établit le gouvernement populaire; & la fertilité de celui de Lacédémone, le gouvernement ariftocratique. Car, dans ces temps-là, on ne vouloit point dans la Grece du gouvernement d'un feul: or, le gouvernement ariftocratique a plus de rapport avec le gouvernement d'un feul.

Plutarque (a) nous dit que la fédition Cilonienne ayant été appaifée à Athenes, la ville retomba dans fes anciennes diffentions, & fe divifa en autant de partis qu'il y avoit de fortes de territoires dans les pays de l'Attique. Les gens de la montagne vouloient à toute force le gouvernement populaire; ceux de la plaine demandoient le gouvernement des principaux ; ceux qui étoient près de la mer, étoient pour un gouvernement mêlé des deux.

(a) Vie de Solon.

Liv. XVIII. CHAP. II.
LIV.

CHAPITRE II.
Continuation du même fujet.

ES pays fertiles font des plaines, où l'on ne peut rien difputer au plus fort; on fe foumet donc à lui; & quand on lui eft foumis, l'efprit de liberté n'y fauroit revenir; les biens de la campagne font un gage de la fidélité. Mais, dans les pays de montagnes, on peut conferver ce que l'on a, & l'on a peu à conferver. La liberté, c'eft-à-dire le gouvernement dont on jouit, eft le feul bien qui mérite qu'on le défende. Elle regne donc plus dans les pays montagneux & difficiles, que dans ceux que la nature fembloit avoir plus favorisés.

Les montagnards confervent un gouvernement plus modéré, parce qu'ils ne font pas fi fort expofés à la conquête. Ils fe défendent aifément, ils font attaqués difficilement; les munitions de guerre & de bouche font affemblées & portées contre eux avec beaucoup de dépenfe, le pays n'en fournit point. Il eft donc plus difficile de leur faire la guerre, plus dangereux de l'entreprendre; &

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