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punis; et que le gouvernement soit aidé non-seulement de tous les moyens que le devoir commande, mais encore de tous ceux que le zèle suggère.

› C'est vainement qu'on chercherait encore à jeter de la défaveur sur les plus purs républicains, par les épithètes usées et banales dont on ne cesse de les poursuivre. Le corps législatif ne s'est pas trompé par ces manœuvres, qui, en jetant le découragement dans l'âme des républicains, rehaussant le courage des royalistes, mirent plusieurs fois la République en péril. Il ne s'agit pas de déchaîner les passions révolutionnaires, mais d'enflammer toutes les affections libérales et généreuses, et de faire que la liberté ne soit pas le patrimoine de quelques-uns, mais le domaine de tous les Français.

› Le vœu de tous vos représentans est que la loi soit le droit, comme elle est le devoir de tous, et que personne ne puisse l'invoquer en vain, ni la violer impunément. Vous avez vu cette année avec quel respect religieux tous les choix que vous avez faits ont été respectés par vos représentans. Les scissions, les minorités, toutes les trames de l'ambition sont venues se briser contre le principe tutélaire qui a partout fait triompher les majorités légales. Des lois seront faites pour prévenir, les années suivantes, les déchiremens qu'occasionnent les scissions. Des plaintes nombreuses se sont élevées sur la conduite de plusieurs agens du directoire exécutif, accusés de dilapidations et de rapines, tant dans l'intérieur que chez les républiques alliées. La loi mettra les coupables sous la main de la justice, et le directoire exécutif dissipera cette nuée de vautours qui suivent les armées et assiégent toutes les avenues des caisses et toutes les portes de la puis

sance.

La responsabilité des agens exécutifs sera organisée; les comptes des ministres seront solennellement publiés et sévèrement examinés ; la plus rigoureuse économie sera apportée dans la fixation des dépenses; la liberté des personnes et des opinions sera garantie par des lois sévères: mais les grands moyens d'administration et d'exécution sont entre les mains du directoire exé

cutif, et, fidèles observateurs de la Constitution, nous ne sortirons pas des limites dans lesquelles elle a circonscrit nos devoirs, comme le directoire exécutif n'en sortira jamais lui-même. La tyrannie commence là où les pouvoirs sont envahis ou accumulés; la liberté de tous, comme la sûreté de chacun, est dans l'équilibre des pouvoirs; et c'est toujours à quelques causes qui l'ont dérangé ou qui l'empêchent de se rétablir qu'on doit imputer les fautes et les revers.

› Français, les difficultés qui nous environnent sont grandes, mais le courage de vos représentans est plus grand encore; ils ne peuvent avoir d'autre crainte que celle de ne pas remplir leurs devoirs, d'autre passion que celle de vous voir libres et triomphans; et ils ont fait le serment de vous sauver ou de périr. »

Le directoire accueillit ce message par un silence complet. Cependant, en attendant la réponse qu'il devait, les conseils ne cessaient point leurs hostilités, et déjà les ministériels osaient à peine parler. On remuait la question de la presse ; Garrau demandait qu'on fît cesser l'abus des lois exceptionnelles; on dénonçait les crimes des fournisseurs; on lisait des adresses des départemens; on s'excitait, on s'encourageait, on cherchait à s'assurer une majorité, et parmi les députés et parmi la population de Paris.

Enfin, le 28 prairial, Poulain-Grandprey, au nom des commissions réunies, veut rappeler aux cinq-cents le message et les promesses du 17. Ce message étant resté sans réponse, il proposa de rester en permanence jusqu'à l'arrivée d'une réponse au message suivant dont il demandait l'envoi au directoire.

<< Citoyens directeurs, le conseil vous a fait un message le > 17 prairial, pour vous demander des renseignemens sur la si› tuation intérieure et extérieure de la République. Le salut pu›blic nous avait commandé cette démarche ; le salut public nous

fait un devoir de la réitérer. Nous attendons la réponse au >> message du 17 prairial, aux termes de l'art, 161 de la Corsti> tution. Le conseil vous déclare qu'il sera en permanence jusqu'à l'arrivée de votre réponse. »

1

- Cette proposition fut acceptée unanimement par le conseil. On en donna avis aux anciens; et ceux-ci prirent la même mesure. Enfin le directoire répondit que le lendemain il satisfer ait à la demande qu'on lui adressait.

CONSEIL DES CINQ-CENTS. Présidence de Jean Debry.

Séance permanente du 28 prairial an VII (5 Juin 1799).

Il est sept heures. Un secrétaire donne lecture d'un mesdu directoire, conçu en ces termes :

sage

« Le directoire s'occupait de répondre à votre message du 17 de ce mois, et il espérait vous soumettre sa réponse primidi prochain. Mais d'après votre message itératif de ce jour, il se constitue en permanence; et vous recevrez demain les renseignemens que vous désirez. » Le conseil ordonne l'impression. Quelques voix. « Levez la permanence. »>

Une foule de voix. « Non, non! »

- Briot veut parler contre la levée de la permanence, mais on s'écrie : - « Ce n'est pas appuyé. »

Laujeacq. «La réponse du directoire n'exige aucune délibération; mais comme vous avez informé les anciens de la mesure que vous avez prise, et de la permanence de votre séance, je demande qu'on les instruise également de la réponse que vous avez reçue, et de la prorogation de votre permanence.»>-Adopté. On réclame la reprise de la discussion du projet sur la liberté de la presse.

Chollet. «Dans cette séance permanente, on ne doit s'occuper que des objets sur lesquels la permanence a été arrêtée; or, le message reçu ne fournissant aucune matière à délibération, je demande que la séance ne soit reprise que demain à dix heures. Car ce n'est pas la discussion du projet sur la presse qui fera reculer les ennemis. >>

Garrau. «Sans doute la liberté de la presse ne doit pas faire reculer nos ennemis; mais quand le projet de la loi qui l'organise sera adopté, nous aurons des objets de la plus haute importance à discuter; nous aurons à délibérer sur des mesures que vos

commissions, réunies, doivent nous soumettre. Dans les dangers de la patrie, tous les citoyens doivent être à leur poste; or, dans le moment, on ne peut nier que la patrie ne soit en danger, les représentans du peuple doivent donc être à leur poste, comme les soldats des armées y sont eux-mêmes. »

Briot. « La commission qui vous a proposé de vous mettre en permanence jusqu'à la réception de la réponse du directoire a eu les plus graves motifs. Il importe donc de lui renvoyer le message que vous venez de recevoir; car, sans doute, elle avait des mesures à vous proposer, et il faut la mettre à même de les mûrir.

› Je suis bien étonné d'entendre le directoire vous dire qu'il se proposait de vous transmettre sa réponse le 1er messidor. Le 1er messidor!.... L'avez-vous remarquée cette époque, citoyens représentans? Le 1er messidor!... Eh! quel est celui d'entre nous qui n'eût été instruit que le 1er messidor devait être marqué par un grand événement? Oui, il n'est aucun de nous qui doute des dangers imminens que court la chose publique. Ma correspondance d'aujourd'hui m'apprend que le corps législatif est menacé des plus grands dangers. Le directoire déclare qu'il se constitue en permanence : vous devez y rester à votre tour. Je ne veux pas m'expliquer davantage; nous devons périr à notre poste, ou assurer le maintien de la République avant de nous séparer. (Ici un grand mouvement se manifeste; de toutes parts on s'écrie: Oui, oui!) Depuis long-temps tous les républicains de la France et des armées attendent ce que sera le corps législatif; il ne doit pas rester soixante jours à faire soixante articles de loi. La permanence de nos séances annonce aux conspirateurs que là, dans cette enceinte, il existe une force, une puissance, qui saura repousser les attentats qu'ils méditent. Représentans du peuple, je vous adjure, au nom du peuple qui a les yeux fixés sur vous, au nom de la patrie dont le salut dépend de votre attitude, au nom de votre propre existence, ne vous séparez pas. Vous seriez responsables aux yeux de vos contemporains et de la postérité, si un grand complot allait éclater.

>Je demande l'envoi d'un message au conseil des anciens, pour lui déclarer que celui des cinq-cents est à son poste, et qu'il continue ses travaux législatifs. » - Adopté.

Un secrétaire invite les membres des commissions réunies à se rendre au salon des conférences.

Crochon. C'est au nom des commissions réunies que l'on vous a proposé le message du 17 prairial; c'est au nom des mêmes commissions que l'on vous a proposé le message d'aujourd'hui, et la permanence de nos séances; mais je ne connais aucun arrêté du conseil qui autorise des commissions à se réunir et à former un arrêté diplomatique, un comité de sûreté générale, un comité de salut public. Je désirerais savoir quel rapport ont les commissions existantes avec les affaires actuelles, et quelles mesures elles ont à prendre ou à proposer. Nous ne voulons point de commission de salut public (murmures). C'est par la Constitution que je suis ici; c'est pour la maintenir que j'y suis encore; or la Constitution porte en termes formels que chaque commission ne doit s'occuper que de l'objet pour lequel elle a été formée. Comment donc arrive-t-il que des commissions chargées de missions particulières se réunissent pour examiner des objets qui ne leur ont point été renvoyés? Mes réflexions sont dictées par l'amour sincère de la République; ma tranquillité et mon existence sont attachées à son maintien, car, et moi aussi j'ai été victime du régime de 1793. Je défie que l'on me cite un arrêté du conseil qui ordonne la réunion des commissions, et qui les autorise à prendre des mesures diplomatiques et de sûreté intérieure. ›

Plusieurs voix. « L'ordre du jour. ›

Bergasse-Laziroulles. Il est aisé de répondre à Crochon et de calmer ses inquiétudes. Le conseil a chargé diverses commissions d'examiner les états de dépenses des ministres de la guerre, de la marine, de la police générale, etc., pour l'an 8. L'arrêté qui le crée les autorise à se retenir dans tous les objets qui établissent entre elles un point de contact. En commençant leurs travaux, ces commissions ont dû examiner quel était l'état actuel

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