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LA REINE MARGUERITE.

La Reine Marguerite. Mylords, les hommes sages ne restent pas oisifs à déplorer leurs désastres; mais, animés d'un nouveau courage, ils s'occupent à les réparer. Qu'importe que notre mât brisé ait disparu sous les flots, que nos câbles soient rompus, notre ancre perdue, et la moitié de nos matelots engloutis sous les ondes? Notre pilote vit encore. Convient-il qu'il abandonne le gouvernail, et que, pareil à un enfant timide, il mêle ses larmes à l'eau de la mer, ajoutant de nouveaux aliments au péril qui n'en a déjà que trop, tandis que sa dolente affliction laisserait briser sur les écueils le vaisseau qu'un peu de vigueur et de .courage auraient sauvé? Ah! quelle honte! et quelle faute ce serait de notre part! Warwick était notre ancre de salut; qu'importe ? Montaigu, notre mât de misaine; qu'importe? Nos amis égorgés étaient nos cordages; qu'importe encore? qu'importe encore? N'avons-nous pas dans Oxford une autre ancre; dans Somerset un autre mât excellent; dans nos amis de France d'autres voiles et d'autres cordages? Et malgré notre insuffisance, Edouard et moi, ne pouvons-nous, pour un jour, remplacer un pilote habile? Nous ne quitterons pas le gouvernail pour croiser les bras et pleurer; nous ferons marcher le navire, malgré les vents contraires, et nous vous sauverons des écueils qui vous menacent du naufrage. Il ne sert à rien de gourmander la mer, pas plus que de lui adresser de belles paroles. Et qu'est-ce qu'Edouard, sinon un mer impitoyable? Qu'est-ce que Clarence, sinon un sable mouvant et perfide? et Richard, sinon un roc âpre et fatal? Voilà les ennemis qui menacent notre barque chétive. Vous savez nager, dites-vous; vous ne nagerez pas longtemps: vous marcherez sur les sables; ils se déroberont sous vous vous gravirez les rocs; le flot vous en balayera, ou vous y mourrez de faim; et c'est trois fois mourir. Je vous parle ainsi, mylords, pour que vous sachiez bien, au cas où quelqu'un d'entre vous serait tenté de nous abandonner, qu'il n'a point de merci à attendre de ces trois barbares frères, pas plus qu'il n'en attendrait des vagues, des sables et des rochers. Courage, done! Ce qu'on ne peut éviter, c'est faiblesse puérile que de le déplorer ou de le craindre.

HENRI VI.-3eme Partie.-Acte V. Scène IV.

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LADY GREY.

King Edward. "Twere pity they should lose their father's land.
Lady Grey. Be pitiful, dread lord, and grant it then.

King Edward. Lords, give us leave; I'll try this widow's wit.
Gloucester. Ay, good leave have you; for you will have leave,
Till youth take leave, and leave you to the crutch.

[GLOUCESTER and CLARENCE retire to the other side. King Edward. Now tell me, madam, do you love your children? Lady Grey. Ay, full as dearly as I love myself.

King Edward. And, would you not do much, to do them good?
Lady Grey. To do them good, I would sustain some harm..
King Edward. Then get your husband's lands, to do them good.
Lady Grey. Therefore I came unto your majesty..
King Edward. I'll tell you how these lands are to be got.
Lady Grey. So shall you bind me to your highness' service.
King Edward. What service wilt thou do me, if I give them?
Lady Grey. What you command, that rests in me to do.

KING HENRY VI., Part III.—Act III. Scene II.

LADY GREY.

Le Roi Edouard. Mon frère Gloster, le mari de cette dame, sir John Grey, a été tué à la bataille de Saint-Albans. Ses biens ont été confisqués par le vainqueur; elle demande maintenant qu'ils lui soient rendus, ce que la justice ne nous permet guère de lui refuser; car c'est en servant la cause de la maison d'York que ce digne gentilhomme a perdu la vie.

Gloster. Votre majesté fera bien de lui accorder sa demande; il y aurait injustice à lui opposer un refus.

Le Roi Edouard. C'est vrai; toutefois, je réfléchirai encore . . . Belle veuve, nous examinerons votre demande; revenez une autre fois; nous vous ferons connaître nos intentions.

Lady Grey. Mon gracieux souverain, tout délai me serait hautement préjudiciable; que votre majesté ait la bonté de me donner une réponse maintenant; et votre bon plaisir, quel qu'il soit, me satisfera.

Le Roi Edouard. Dites-moi, belle veuve, combien avez-vous d'enfants? Lady Grey. Trois, mon gracieux souverain.

Le Roi Edouard. Ce serait dommage qu'ils perdissent le patrimoine de leur père.

Lady Grey. Ayez donc pitié d'eux, sire, et faites qu'il leur soit rendu. Le Roi Edouard. Mylords, laissez-nous en tête-à-tête un moment; je veux sonder cette veuve. Maintenant, madame, répondez-moi;

aimez-vous vos enfants?

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Lady Grey. Aussi tendrement que moi-même.

Le Roi Edouard. Et ne feriez-vous pas beaucoup pour leur être utile? Lady Grey. Pour leur faire du bien, j'endurerais volontiers quelque mal. Le Roi Edouard. Dans ce but, il vous faut obtenir la restitution des propriétés de votre mari.

Lady Grey. C'est pour cela que je suis venue trouver votre majesté. Le Roi Edouard. Je vais vous dire comment vous pourrez l'obtenir. Lady Grey. J'en conserverai pour votre majesté une éternelle reconnaissance.

Le Roi Edouard. Si je vous rends ces biens, par quel service reconnaîtrez-vous ma bienveillance?

HENRI VI.-3eme Partie.-Acte III. Scène II.

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