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At puer Ascanius mediis in vallibus acri

Gaudet equo; jamque hos cursu, jam præterit illos
Spumantemque dari pecora inter inertia votis
Optat aprum, aut fulvum descendere monte leonem.

« Ascagne aiguillonnant un coursier plein de cœur,
» Court, vole, et, dédaignant des combats sans honneur,
>> Voudroit qu'un fier lion, un sanglier sauvage,
>> Vint d'un combat plus noble honorer son courage. »

On aime à voir dans ce jeune chasseur ces premiers symptômes d'ardeur et de courage, prémices de sa valeur future. Enfin, Virgile est admirable dans le récit qu'il fait de son premier fait d'armes. C'est au géant Numanus, fier de sa taille et de sa force, et qui, placé au premier rang, prodigue des injures aux Troyens, qu'il oppose cet enfant héroïque; c'est par ses mains que Numanus est terrassé, et Apollon lui

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même vient sur un nuage le féliciter

de sa victoire:

Macte novâ virtute, puer; sic itur ad astra.

Mais un caractère plus original encore, et d'un effet plus nouveau, c'est celui de Camille, imité par le Tasse dans le personnage de Clorinde, copie bien inférieure à l'original. Là se trouve réuni, à toute la richesse de l'épopée, tout l'intérêt du roman : Camille n'est point une amazone; c'est la fille d'un roi malheureux, banni de ses états. En fuyant, il emporte sa fille, son trésor le plus précieux. Un fleuve débordé l'arrête; les ennemis s'approchent : moins alarmé pour lui que pour sa fille, il l'attache à un javelot, l'enveloppe d'une écorce de liège, d'un bras vigoureux

lance le javelot au-delà du fleuve, le passe à la nage, et reprend à l'autre rive son javelot et son enfant. La peinture de l'éducation champêtre et guerrière de Camille, est de la plus grande beauté; sa manière de combattre, et le genre de combat dans lequel il la représente, conviennent parfaitement aux qualités qu'il lui a données dans les vers par lesquels il l'annonce. La première de ces qualités est une extrême légèreté à la course; c'est de-là qu'il a tiré l'idée du premier exploit de cette héroïne. Un fantassin ligurien lui reproche de combattre à cheval, tandis qu'il combat å pied; son orgueil blessé la détermine à descendre de son coursier : le rusé Ligurien le monte et s'enfuit; Camille court après lui, l'atteint et l'immole.

En un mot, tout en elle intéresse, sa naissance, son éducation, sa vie et sa mort. Mais c'est dans l'original qu'il faut apprendre à sentir tout ce qu'a de touchant cette dernière partie de son histoire.

On sait quel rôle brillant jouent les femmes dans le poëme du Tasse. Le courage belliqueux des Amazones étoit connu de toute l'antiquité; il paroît étonnant qu'Homère n'en ait fait aucun usage. Ses héros sont de véritables chevaliers; il auroit pu y joindre quelques héroïnes. La timidité et la foiblesse naturelle de ce sexe font ressortir encore mieux le courage de celles qui, franchissant le cercle étroit de leurs goûts frivoles et de leurs occupations paisibles et sédentaires, se montrent

dans le champ des combats. Ces êtres intéressans, en partageant les travaux des guerriers, redoublent les jouissances du lecteur, et fournissent une multitude de ressources au poëte, par les attachemens et les passions qu'elles peuvent inspirer. Telles sont, dans la Jérusalem délivrée, Armide, Herminie et Clorinde, dont le poëte a tiré un si grand parti. Aussi Voltaire a-t-il dit, après avoir parlé d'Homère:

De faux brillans, trop de génie,
Mettent le Tasse un cran plus bas;
Mais que ne pardonne-t-on pas
Pour Armide et pour Herminie?

Boileau a paru penser de même, lorsqu'il a dit, en parlant du Tasse:

Je ne veux point ici lui faire son procès;

Mais, quoi que notre siècle à sa gloire publie,

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