CHANT IV. 1 Imitez le Poussin aux fêtes bocagères Il nous peint les bergers et les jeunes bergères. Ce fameux tableau est sans doute le plus beau des tableaux de paysages. Si l'on ne savait d'ailleurs combien l'imagination du Poussin s'était nourrie des ouvrages des grands poëtes anciens, ce tableau suffirait pour le proumême caractère : ver. Presque toutes les odes voluptueuses d'Horace ont partout, au milieu des fêtes et des plaisirs, il montre la mort dans le lointain. « Hâtez-vous, dit-il : qui sait si nous vivrons demain? Nous mourrons, il faudra quitter cette belle maison, cette femme charmante, et de tous ces arbres que vous cultivez, le seul cyprès suivra son maître, hélas ! trop peu durable. » C'est cette même philosophie, puisée dans les poëtes anciens, qui dictait Chaulieu ces vers, pleins d'une si douce mélancolie Muses qui dans ce lieu champêtre Avec soin me fites nourrir, Beaux arbres qui m'avez vu naître, Bientôt vous me verrez mourir. Ces contrastes de sensations moitié voluptueuses, moitié tristes, agitant ⚫ l'âme en sens contraire, font toujours une impression profonde; et c'est ce qui m'a engagé à jeter au milieu des scènes riantes des jardins la vue mélancolique des urnes et des tombeaux consacrés à l'amitié ou à la vertu. 2 Voyez sous ces vieux ifs la tombe où vont descendre Dans ces vers, consacrés aux humbles sépultures des habitants de la campagne, j'ai imité quelques vers du Cimetière de Gray. 3 Dans Stow, je l'avouerai, l'art plus judicieux, etc. Stow, château et jardin situés dans le comté de Buckingham. C'est ce jardin qui a fourni le premier modèle des jardins dits anglais. Kiow des plants étrangers a rassemblé le choix. Kiow, résidence royale à deux lieues de Londres: on en admire le jardin botanique, où se trouvent les plantes les plus rares des deux hémisphères. 5 Mais loin ces monuments dont la ruine feinte M. de Chabanon, dans une épître fort agréable, écrite en faveur des jardins du genre irrégulier, a remarqué avant moi que les vieux monuments réveillaient des souvenirs; avantage que n'ont pas les ruines factices. Cette idée se trouve dans d'autres ouvrages, et particulièrement dans celui de Whateli : et d'ailleurs elle est si naturelle, qu'elle était facile à trouver. 6 Toi, surtout, brave Cook, etc. Tout le monde connaît les voyages instructifs et courageux du célèbre et malheureux Cook, et l'ordre que fit donner Louis XVI de respecter son vaisseau sur toutes les mers; ordre qui fait un égal honneur aux sciences, à cet illustre voyageur, et au roi, dont il devenait pour ainsi dire le sujet par ce genre nouveau de bienfaisance et de protection. DELILLE. 28 L'HOMME DES CHAMPS. CHANT PREMIER. Boileau jadis a su, d'une imposante voix, Du régime rural d'autres riment le code; A son style divin tout cède, je l'avoue; Inspirez donc mes chants, beaux lieux, frais paysages, Ce sont les vrais plaisirs, les vrais biens que je chante. Nos riches d'autrefois, nos pauvres Lucullus, O vous qui dans les champs prétendez vivre heureux, Le calme heureux des champs craint une pompe vaine : L'orgueil produit le faste, et le faste la gêne. Tel est l'homme; il corrompt et dénature tout. Qu'au milieu des cités son superbe dégoût Ait amené les bois, les fleurs et la verdure, Je lui pardonne encor : j'aime à voir la nature, |