Page images
PDF
EPUB

254

L'ILIADE, CHANT IV.

aussitôt son glaive, il lui ravit le jour. Mais il ne peut le dépouiller de ses armes : Pirus est environné de ses compagnons, des Thraces hardis, à la courte chevelure, et qui, tenant en main de longues piques, repoussent loin 'd'eux Thoas, malgré sa stature, sa force et son audace : il est contraint de reculer. Ainsi ces deux chefs, dont l'un commandait les Thraces, et l'autre les Épéens, armés de lourdes cuirasses, sont étendus ensemble dans la poussière : autour d'eux sont immolés un grand nombre de héros.

Alors si quelque vaillant guerrier, encore libre de l'atteinte du glaive et du javelot, eût parcouru les rangs au fort de la mêlée, et que Minerve l'eût conduit elle-même en lui prenant la main, écartant de lui les traits impétueux, il eût admiré le courage de tous les combattans : car en ce jour une foule de Troyens et de Grecs tombaient confondus, et jonchaient la terre de morts.

FIN DU CHANT QUATRIÈME.

REMARQUES

SUR LE CHANT QUATRIÈME.

N

(Page 229. Les dieux....)

On voit ici un grand spectacle, les dieux délibérant sur le sort de Troie. La perfidie à laquelle consentent Jupiter et Minerve, a scandalisé Platon : on lui a répondu que, Pâris n'ayant pas été TUÉ, selon les termes de l'accord, les Troyens avaient un prétexte légitime de recommencer la guerre. Jupiter favorisait Troie : il adresse des reproches à Junon et à Minerve, parce que, comme l'a dit madame Dacier, si Ménélas avait remporté une victoire complète, le siége aurait été levé. Mais, après tout, suivant la théologie païenne, son pouvoir se bornait à retarder la ruine à laquelle cette ville avait été condamnée par les Destins : ainsi, il consent à ce que la guerre (soit renouvelée. On n'a pas remarqué un autre motif un peu plus secret de la conduite de Jupiter. Si la paix se confirmait, il ne pouvait accomplir la promesse qu'il avait faite à Thétis, et qu'il avait signée du signe irrévocable de sa tête sacrée, savoir, de venger la gloire d'Achille, et d'amener les chefs de la Grèce aux pieds de ce héros pour implorer son secours.

(Ibid. Et l'immortelle Hébé.

C'est pour faire entendre que les dieux jouissent

d'une jeunesse et d'une félicité éternelles. (Madame Dacier.)

(Page 231. Perds-les.....)

Homère, dit madame Dacier, a voulu peindre ici le naturel de bien des femmes, qui n'ont rien de cher qu'elles ne sacrifient à leur ressentiment. Elle trouve dans ces mots, «Soyons donc prêts à nous plier tour « à tour à nos désirs », une bonne leçon adressée aux époux, pour qu'ils vivent en bonne intelligence. Malheureusement le but de cette leçon n'a rien de fort louable en cet endroit, puisqu'il s'agit de se sacrifier l'un à l'autre des villes que ces dieux font profession de chérir.

(Page 232. Telle qu'une étoile brillante.)

pas

Ernesti montre que le scoliaste s'est trompé, en interprétant ceci par une comète. Pope a suivi le scoliaste, et a produit, il est vrai, une comparaison plus magnifique que celle d'Homère ; mais il n'est ; nécessaire de prêter des beautés à ce grand poëte, et l'on peut dire que sa comparaison a plus de justesse, Ce météore, qui nous fait voir une étoile tombante, est une vive image de la rapidité avec laquelle Pallas se précipite du haut des cieux.

(Page 233. Armées de leurs boucliers.)

Ces troupes ne les avaient pas quittés, ou elles les avaient repris; ce qui prépare l'action de Pandarus. Minerve le prend par tous les motifs les plus propres

à le frapper. Pandarus, comme dit le scoliaste, était d'une nation connue par sa perfidie; et il était avare, ainsi qu'on le voit au cinquième chant, où il dit que pour ménager ses chevaux, il ne les avait pas amenés à Troie.

(Page 234. Saisit à la fois la flèche et la corde de l'arc.)

Et duxit longè, donec curvata coïrent

Inter se capita, et manibus jam tangeret æquis,
Lævâ aciem ferri, dextrâ nervoque papillam.

AENEID. LIB. XI.

Homère appelle la flèche de Pandarus, SOURCE de CRUELLES DOULEURS : elle eut des effets terribles, en renouvelant la guerre jusqu'à la destruction de Troie. Cette action de ce chef était assez importante par ses suites, pour que le poëte la décrivît avec étendue : d'ailleurs le repos du reste de l'armée lui permettait ces détails. (Pope.)

(Ibid. L'arme retentit.)

Sonat unà letifer arcus.

AENEID. LIB. XI.

Cette imitation est inférieure à Homère, λiyže Biòs. Quintilien, à cette occasion, fait une sortie contre la langue latine, et l'accuse de n'oser hasarder de telles onomatopées. Mais Virgile n'en a-t-il pas un trèsgrand nombre, quoiqu'il ne réussisse pas toujours à égaler celles qu'il imite du poëte grec? On déclame I. II. 17

aujourd'hui avec la même injustice contre la langue française, qu'on cherche trop à déprimer, parce qu'elle se prête difficilement à rendre les beautés des autres langues mais cela n'empêche pas qu'elle n'ait des

beautés qui lui appartiennent.

On pourrait appliquer ces vers de Pope à toutes ces disputes quelquefois ennuyeuses sur les langues :

For forms of government let fools contest,
Whate'er is best administred is best:

For modes of faith let graceless zealots fight.
His can't be wrong whose life is in the right.
ESSAY ON MAN.

Les vers de l'original d'Homère où se rapporte la note présente, ont une rapidité singulière qu'on a imitée dans la traduction : il personnifiè cette flèche. Ce poëte est plein de métaphores qui animent les choses insensibles.

(Page 234. Ménélas....)

Homère use de ces apostrophes pour réveiller l'attention, mais ce n'est jamais qu'à propos et pour des personnages qui le méritent. (Madame Dacier.)

(Ibid. Comme une mère.)

Charmante image, qui peint en même temps le pouvoir de la déesse. Minerve voulait seulement que l'alliance fût rompue.

(Page 235. La forte cuirasse.)

Clarke fait remarquer comment ces deux vers diá

« PreviousContinue »