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défendu de mettre à mort un citoyen Romain, elles n'eurent plus d'application.

Voilà le temps auquel on peut rapporter ce que Tite-Live ($) dit des Romains, que jamais peuple n'a plus aimé la modé ration des peines.

Que fi l'on ajoute à la douceur des peines, le droit qu'avoit un accufé de fe retirer avant le jugement, on verra bien que les Romains avoient fuivi cet efprit que j'ai dit être naturel à la république.

Sylla, qui confondit la tirannie, l'anarchie & la liberté, fit les loix Cornéliennes. Il fembla ne faire des reglemens que pour établir des crimes. Ainfi qualifiant une infinité d'actions du nom de meurtre, il trouva par tout des meurtriers ; & par une pratique qui ne fut que trop fuivie, il tendit des piéges, fema des épines ouvrit des abîmes fur le chemin de tous les citoyens.

Prefque toutes les loix de Sylla ne portoient que l'interdiction de l'eau & du feu. Céfar y ajouta la confifcation des biens (**), parce que les riches, gardant dans l'exil leur

[S] Liv. I.

[**] Panas facinorum auxit, cùm locupletes eò faciliùs fcelere fe obligarent, quòd integris patri. moniis exularent. Suétone, in Julio Cafare.

leur patrimoine, ils étoient plus hardis à commettre des crimes.

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Les empereurs ayant établi un gouvernement militaire, ils fentirent bien - tôt qu'il n'étoit pas moins terrible contr'eux que contre les fujets; ils chercherent à le tempérer; ils crurent avoir befoin des dignités, & du refpect qu'on avoit pour

elles.

On s'approcha un peu de la monarchie, & l'on divifa les peines en trois claffes (††); celles qui regardoient les premieres perfonnes de l'état (44), & qui étoient affez douces; celles qu'on infligeoit aux perfonnes d'un rang (SS) inférieur, & qui étoient plus feveres; enfin celles qui ne concernoient que les conditions baffes (***), & qui furent les plus rigoureufes.

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Le féroce & infenfé Maximin irrita pour ainsi dire, le gouvernement militaire qu'il auroit fallu adoucir. Le fénat apprenoit,

[tt] Voyez la loi 3, §. legis ad leg. Cornel. de ficariis, & un très-grand nombre d'autres au di gefte & au code.

[H] Sublimiores.
ESS] Medios.

*** ] Infimos. Leg. 3. §. legis ad leg. Cornel, de ficariis.

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Un impofteur (*), qui fe difoit Constantin Ducas, fufcita un grand foulevement à Conftantinople. Il fut pris & condamné au fouet: mais ayant accufé des perfonnes confidérables, il fut condamné comme calomniateur, à être brûlé « Il eft fingulier qu'on eût ainfi proportionné les peines entre le crime de leze - majefté & celui de calomnie.

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Cela fait fouvenir d'un mot de Charles II. roi d'Angleterre. Il vit, en paffant un homme au pilori: il demanda pourquoi il étoit là. Sire, lui dit-on, c'est parce qu'il a fait des libelles contre vos miniftres. Le grand fot! dit le roi: que ne les écrivoit - il contre moi? on ne lui auroit rien fait.

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Soixante & dix perfonnes confpirecontre l'empereur Bafile (†); il les fit fuftiger; on leur brûla les cheveux & le poil. Un cerf l'ayant pris avec fon bois par la ceinture, quelqu'un de fa fuite tira fon épée, coupa fa cein,, ture, & le délivra: il lui fit trancher la tête, parce qu'il avoit, difoit-il, tiré l'épée contre lui ". Qui pourroit pen

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[*] Hift. de Nicéphore, patriarche de Cons. tantinople.

[+] Id. ibid,

fer que, fous le même prince, on eût rendu ces deux jugemens?

C'eft un grand mal, parmi nous, de faire fubir la même peine à celui qui vole fur un grand chemin, & à celui qui vole & affaffine. Il eft vifible que, pour la fureté publique, il faudroit mettre quelque différence dans la peine.

A la Chine, les voleurs cruels font coupés en morceaux (+), les autres non: cette différence fait que l'on y vole; mais que l'on n'y affaffine pas.

En Mofcovie, où la peine des voleurs & celle des affaffins font les mêmes, on asfaffine (S) toujours.

on, ne racontent rien.

Les morts,

Les morts, y dit

Quand il n'y a point de différence dans la peine, il faut en mettre dans l'efpérance de la grace. En Angleterre, on n'affaffine point, parce que les voleurs peuvent efpérer d'être tranfportés dans les colonies, non pas les affaffins.

C'est un grand reffort des gouvernemens modérés, que les lettres de grace. Ce pouvoir que le prince a de pardonner, exécuté avec fageffe, peut avoir d'admirables effets. Le principe du gouverne

[+] Du Halde, Tome I, pag. 6.

ment

[§] Etat préfent de la grande Ruffie, par Perry,

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