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été prédit à Gordium: voyez comment toutes les villes courent pour ainfi dire, audevant de lui, comment les fatrapes & les grands arrivent en foule. Il s'habille à la maniere des Perfes ; c'eft la robe confulaire de Clovis. Darius ne lui offrit-il pas la moitié de fon royaume? Darius n'eft-il pas affaffiné comme un tiran? La mere & la femme de Darius ne plurent-elles pas la mort d'Alexandre ? Quinte-Curce, Arrien, Plutarque étoient-ils contemporains d'Alexandre? L'imprimerie (S) ne nous at-elle pas donné de lumieres qui manquoient à ces auteurs? Voilà l'histoire de l'établissement de la monarchie Françoife

dans les Gaules.

CHAPITRE XXV.

De la Nobleffe Françoife.

ONSIEUR l'abbé Dubos foutient que,

M dans les premiers tems de notre mo

narchie, il n'y avoit qu'un feul ordre de citoyens parmi les Francs. Cette préten

tion

(§) Voyez les difcours préliminaires de Mr. l'abbé Dubos.

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tion injurieufe au fang de nos premieres familles, ne le feroit pas moins aux trois grandes maifons qui ont fucceffivement régné fur nous. L'origine de leur grandeur n'iroit donc point fe perdre dans l'oubli, la nuit & le temps : l'hiftoire éclaireroit des fiecles où elles auroient été des familles communes: & pour que Chilpéric, Pepin, Hugues-Capet fuffent gentilhommes, il faudroit aller chercher leur origine parmi les Romains ou les Saxons, c'est-àdire, parmi les nations fubjuguées.

Mr. l'abbé Dubos fonde (*) fon opinion fur la loi falique. Il eft clair, dit-il, par cette loi, qu'il n'y avoit point deux ordres de citoyens chez les Francs. Elle donnoit deux cent fous de compofition (†) pour la mort de quelque Franc que ce fut: mais elle diftinguoit chez les Romains le convive du roi, pour l'amour duquel on donnoit trois cent fous de compofition, du Romain poffeffeur à qui elle en donnoit cent, & du Romain tributaire à qui elle n'en donnoit que quarante-cinq. Et comme la différence des compofitions faifoit la distinction principale, il conclut que, chez

les

(*) Voyez l'établiffement de la monarchie Frangoife, tom. III, Liv. VI, ch. IV, pag. 304.

(†) Il cite le titre 44 de cette loi, & la loi des Ripuaires, titre 7 & 36

les Francs, il n'y avoit qu'un ordre de citoyens ; & qu'il y en avoit trois chez les Romains.

Il eft furprenant que fon erreur même ne lui ait pas fait découvrir fon erreur. En effet, il eût été bien extraordinaire que les nobles qui vivoient fous la domination des Francs y euffent eu une compofition plus grande, & y euffent été des perfonnages plus importans que les plus illuftres des Francs & leurs plus grands capitaines. Quelle apparence que le peuple vainqueur eût eu fi peu de refpect pour lui-même & qu'il en eût eu tant pour le peuple vaincu? De plus, Mr. l'abbé Dubos cite les loix des autres nations barbares, qui prouvent qu'il y avoit parmi eux divers ordres de citoyens. Il feroit bien extraordinaire que cette regle générale eût précifément manqué chez les Francs. Cela auroit dû lui faire penfer qu'il entendoit mal ou qu'il appliquoit mal les taxes de la loi falique; ce qui lui eft effectivement arrivé. On trouve, en ouvrant cette loi, que la compofition pour la mort d'un antruftion (4) c'eft-à-dire, d'un fidele ou vaffal

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(4) Qui in trufte dominicâ eft, tit. 44, §. 4; & cela fe rapporte à la formule 13 de Marculfe, de

regis

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vaffal du roi, étoit de fix cent fous ; & que celle pour la mort d'un Romain convive (§) du roi n'étoit que de trois cent. On y trouve (**) que la compofition pour la mort d'un fimple Franc (tt) étoit de deux cent fous, & que celle pour la mort d'un Romain (44) d'une condition ordinaire n'étoit que de cent. On payoit encore pour la mort d'un Romain (SS) tributaire, efpece de ferf ou d'affranchi, une compofition de quarante-cinq-fous, mais je n'en parlerai point, non plus que de celle pour la mort du ferf Franc, ou de l'affranchi Franc: il n'eft point ici question de ce troifieme ordre de perfonnes.

Que fait Mr. l'abbé Dubos? Il paffe fous filence le premier ordre de perfonnes chez les Francs, c'eft-à-dire, l'article qui concerne les antruftions: & enfuite, comparant le Franc ordinaire pour la mort du quel on payoit deux cent fous de compofition, avec ceux qu'il appelle des trois ordres chez les Romains, & pour la mort

def

regis antruftione. Voyez auffi le titre 66 de la loi faliquè, 9. 3 & 4 ; & le tit. 74; & la loi des Ripuaires, tit. 11 ; & le capitulaire de Charles le chauve, apud Carifiacum, de l'an 877, ch. XX, (6) Loi falique, tit. 44, §. 6.

(**) Ibid. §. 4. (tt) Loi falique, §. I. (++) Ibid. tit. 44, §. 15. (§§) Ibid. §. 7.

defquels on payoit des compofitions différentes, il trouve qu'il n'y avoit qu'un feul ordre de citoyens chez les Francs, & qu'il y en avoit trois chez les Romains.

Comme, felon lui; il n'y avoit qu'un feul ordre de perfonnes chez les Francs, il eût été bon qu'il n'y en eût eu qu'un auffi chez les Bourguignons, parce que leur royaume forma une des principales pieces de notre monarchie. Mais il y a dans Îeurs (***) codes trois fortes de compofitions; l'une pour le noble Bourguignon ou Romain, l'autre pour le Bourguignon ou Romain d'une condition médiocre la troifieme pour ceux qui étoient d'une condition inférieure dans les deux nations. Mr. l'abbé Dubos n'a point cité cette loi.

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Il eft fingulier de voir comment il échappe aux (†††) paffages qui le preffent de toutes parts. Lui parle-t-on des grands, des feigneurs, des nobles? Ce font, dit-il,

de

(***) Si quis, quolibet cafu, dentem optimati Burgundioni vel Romano nobili excufferit, folidos viginti quinque cogatur exfolvere; de mediocribus perfonis ingenuis, tam Burgundionibus quàm Romanis, fi dens excuffus fuerit, decem folidis compo❤ natur; de inferioribus perfonis, quinque folidos: art. 1, 2 & 3, du tit. 26 de la loi des Bourguignons.

(tt) Etabliffement de la monarchie Françoife tome III, Liv. VI, chap. IV & Y,

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