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194. LETTERA, etc. - Lettre de M. J. LABUS à M. Emmanuel CICOGNA, sur une inscription antique découverte à Venise, en 1830. In-4°, avec une planche. Venise, 1830; Picotti.

L'inscription qui est le sujet de cette lettre est gravée sur un sarcophage en marbre blanc, dont la partie antérieure, ornée d'un pilastre à ses deux extrémités, montre le tiers de sa surface, vers le milieu, occupé par le texte de l'inscription ainsi conçue:

M. AVREL. EVTYCHE
S. ET AVRELIA. RVFENA

HANC. SEDEM.

VIVI. SIBI POSVER.

VNO ANIMO LAB

ORANTES S SINE

VLLA QVAERELLA.

L'espace qui reste à la droite et celui qui est à la gauche des inscriptions, sont occupés chacun par la figure d'un arc à plein ceintre, soutenu par deux colonnes, et l'on remarque entre les colonnes de l'arc de la droite un niveau d'architecte, et dans celui de la gauche un Ascia ou doloire. M. Labus voit avec toute raison, dans ces deux instrumens, les marques de la profession de Marcus Aurelius Eutyches, et il présume qu'il exerça celle de menuisier, Textov, Faber Lignarius, Tignuarius, (un Falegname). M. Labus cite, à l'appui de son opinion, une foule d'exemples qui la corroborent et que fournissent une foule d'autres monumens funéraires, sur lesquels sont gravés les principaux outils ou instrumens de la profession du défunt, que leur figure nous fait connaître.

Une autre discussion, et d'un genre assez rare, se rapporte à cette inscription de Marcus Aurelius Eutyches: De quelle ville a été tiré son sarcophage? Découvert, à Venise, le 1er août 1830, y a-t-il été apporté d'un autre licu? Parmi les collecteurs d'inscriptions antiques, les uns prétendent qu'il appartient à la ville de Brescia; les autres à Venosa; Muratori et ses continuateurs à Pola; c'est, en effet, dans cette dernière ville que l'a vu, en 1465, Joannes Marchanova, qui a laissé, sous le titre de quædam antiquitatum fragmenta, studio Joannis Marchanovce ar, et med, doct, P. (Patavini) collecta, un recueil

d'inscriptions et de notes latines, manuscrit in-folio, sur papier, de la bibliothèque du Roi, à Paris. C'est à la fin d'une espèce de préface dédicatoire de l'ouvrage, adressée Divo Dno Malatestac Novello principi Ces., qu'on trouve la date de 1465; et Marchanova mourut, selon ses biographes, deux années après. On ne peut guère douter que le sarcophage de Marcus Aure lius ne fût alors à Pola; Martin de Sieber l'y vit encore, en 1503, comme le prouve son recueil manuscrit d'épigraphes latines, qui existe à la bibliotheca Estense, ainsi qu'une copie de celui de Marchanova; enfin, Totti, dont M. le Dr Labus possède aussi un manuscrit du même genre, cite ce sarcophage parmi les antiquités de Pola. Enlevé de cette ville, aurait-il successivement séjourné dans celles où le placent les divers collecteurs d'inscriptions qui le citent? Quoi qu'il en soit, il fut transporté à Venise, où il fut destiné, en 1563, à servir de sépulture à Francesco Sorenzo et à Chiara Cappello sa femme. Les deux époux furent déposés dans le sarcophage, et on remplaça son couvercle, qui était perdu, par une dalle de marbre rouge, sur laquelle furent gravées ces paroles : Francisci Superantii Jacobi procuratoris ecclesiæ sancti Marcii filii, et Claræ Cappello uxoris ejus amantissimæ hic ossa jacent. Obiit anno Domini MDLXIII, die xx mensis Augusti. C'est dans cet état qu'il a été trouvé dans la grande chapelle de l'église de St.-Paul, il n'y a pas encore une année.

Quant au texte même de l'inscription antique, M. Labus fait remarquer les nombreuses différences qu'il présente dans les divers recueils où elle est publiée. Je ne pense pas qu'elle soit nulle part plus mal traitée que dans le manuscrit de Marchanova; en voici la copie figurée (feuillet cx11, verso};

M. AREL. EVFICHEVS.

SEIA. VICELIA RV

FEN. HANC. SEDEM.

VIVI. SIBI. POSVER.

VNO. ANIMO. LABO

RANTES. SINE IV
LIANO. FILIO.

Il y a, au moins de plus, un fils, Julianus, dont l'inscription du sarcophage ne parle nullement; du reste, la formule uno animo laborantes, était à la mode dans les ménages antiques de

UNO,

meme

Pola; deux autres époux ont écrit sur un autre sarcophage du même lieu, uno animo laborantes, uno animo nobis posuimus. Je n'ose pas donner leurs noms d'après le manuscrit de Marchanova (f° CXLII, recto), tant ils m'ont semblé défectueux; on les lit, en effet: POPPIUS VVLSOR SEPULTA JULIANI. P. R. conjuge N. S. etc. M. Labus pense que Marcus Aurelius Eutyches vécut au siècle des Antonins: son nom et son prénom autorisent cette conjecture. Les Aurelii se retrouvent plusieurs fois sur les monumens de Pola; sous Septime Sévère, deux Marcus Aurelius Menophilus figurent dans la même inscription, et on Ꭹ lit pour le père la qualification de Libertus Augusti Aedilis Polac cum Menophilo patre liberto Augusti. Enfin, M. Labus pense que le M. Aurelius du sarcophage de Pola, que des signes assez positifs nous prouvent avoir été Faber Tignuarius, est le que l'Aurelius nommé, avec les mêmes prénoms et surnoms, dans la dédicace d'une statue à l'empereur Caracalla, par un college d'artistes de la même profession (Smezio, fol. 57, no 3), et le jurisconsulte Gaius donne une idée avantageuse des personnes de cette classe, en disant Fabros Tignuarios dicimus non cos dumtaxat qui tigna dolent, sed omnes qui ædificant (L. 62; de verb. signif.). On ne s'étonnera donc pas de la richesse des sépultures de cette classe de citoyens, ni de ce que les plus proches parens d'Aurelius Eutyches furent appelés aux premières fonctions municipales de Pola. Un autre Faber Tignuarius accomplit un vœu à Hercule, comme le prouve une inscription de Brescia, également publiée par M. Labus (page 11 de sa Lettera), et comme eile est inédite, nous la rappellerons ici, après avoir applaudi aux fréquens témoignages que donne M. Labus de son zèle pour la recherche et la publication des monumens antiques, comme de sa science et de sa bonne critique pour leur illustration. C. F.

Inscription

inédite

du Musée

de Brescia.

SEX. CVNOPENNVS

SECVNDVS

FABER. TIGNVAR.

HERCULI.

V. S. L. M.

195. INSCRIPTION ROMAINE, en Angleterre.

On lit, à Water Crook, près de Kendal, dans le Westmore

land, l'inscription suivante, sur une pierre enchassée dans le mur d'une

grange:

P. AEL. P. F. SERG. BASS.

Q. D. LEG. XX. V. V. VIXT. AN.
GT. P. RIVATUS. LIBB. GT. HER.

M. LEG. VI. VIX. FEC. LI. Q.
SEPULCHRUM ALIUM MORT.

RIT. IN. FER. F. Dc. D. N. N.
(Athenæum; 18 septembre 1830, p. 591).

e

196. NOTICE SUR LA PIERRE SÉPULCHRALE DE ST.-FLORBERT, mort à Gand vers le milieu du 7° siècle; par M. J. RAEPSAET. (Messager des Sciences et des Arts des Pays-Bas, 1re liv. 1829).

C'est M. de Bast, secrétaire de la Société des beaux arts de Gand, qui a communiqué à l'auteur de la notice une inscription de ce monument intéressant par lui découvert dans les archives de la cathédrale de St.-Bavon, à Gand.

Cette pierre est de marbre blanc, et présente des vestiges de mortier ou de chaux, qui font présumer qu'elle a été maçonnée dans un mur ou dans un pavé; mais il est plus probable que c'était dans un mur, puisque l'inscription ne présente aucune trace du frottement des pieds que la pierre aurait subi pendant tant de siècles, si elle avait été scellée dans le pavé. Voici cette inscription :

II

REQVIESCIT FLOR
BERTVS ABBA...:

GANDENSIS. CÆ

NOBII OBIT. VIII.

ID OCTB

Cette inscription est un document précieux pour les agiographes. Les savans, long-temps partagés sur l'année de la mort de St.-Florbert, premier abbé du monastère de St.-Bavon, s'accordaient encore moins sur le jour. Le savant Bollaudiste Périerus, sur la vie de St.-Bavon, et Mabillon, se sont accordés à fixer l'époque de cette mort vers l'année 664.

Après une longue dissertation, où l'auteur de la notice s'attache à prouver l'originalité de cette pierre sépulchrale, il en

conclut qu'il ne reste aucun doute sur la date de la mort du saint abbé, qui cut lieu le 8 octobre, et que pour l'année qui n'est point relatée dans l'inscription, c'est une des plus grandes preuves de son authenticité. En effet, cette omission dans une inscription lapidaire du VII° siècle est caractéristique. A cette époque, on n'énonçait pas encore l'année, pas même dans les actes publics, nì dans les chartes royales. On doit donc s'en rapporter à l'autorité des Bollandistes qui ont fixé cette année.

La découverte de cette pierre fournit à M. RAEPSAET l'occa sion d'entrer dans quelques détails sur un point d'histoire auquei se rattache celle de St.-Florbert. C'est l'origine de la ville de Gand, dont l'époque n'est point encore exactement fixée. Sans parler des fables qui donnent pour berceau à cette ville un castrum Ganda, bâti par J. César, ou pour fondateur un Gandarus, qui existait 300 ans avant l'ère chrétienne, réveries rejetées par la chronique de St.-Bavon, ouvrage du XIIe siècle, et adoptées par Sanderus, l'auteur s'attache à prouver la fausseté de l'opinion vulgaire, d'après laquelle la ville de Gand devrait son existence et son nom au monastère même de St.Bavon.

Dans des chartes et des chroniques du IX et Xe siècles, on trouve ce monastère désigné sous le nom de Gant, ou de Gand. De là, tous les écrivains postérieurs ont répété les uns après les autres, que l'abbaye de St.-Bavon avait été bâtie dans le castrum Gandlavense; que ce monastère s'appelait Ganda, Gent, et qu'il a donné son nom à la ville de Gand.

Tous ces auteurs n'auraient point avancé et adopté ces erreurs s'ils n'avaient point perdu toute tradition de l'organisation du gouvernement des Francs avant le VIIIe siècle.

Ces sortes de châteaux (castra) n'existaient point dans les Gaules au VIIe siècle. Ils ne datent que de la naissance de la féodalité; du IX au Xe siècle, époque à laquelle les gouverneurs et capitaines de ces châteaux devinrent héréditaires, sous le titre de chátelains, et qu'ils obtinrent aussi, à titre héréditaire et foncier, l'administration du territoire ressortissant du château, territoire auquel on donna le nom de castellania, et qu'ils avaient régi jusqu'alors, en qualité d'officiers du roi, comme licutenans, vicarii, du comte du Pagus ou province.

Sous la domination des Francs, et long-temps encore après,

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