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fondation de leur république: mais ici le payement des dîmes étoit une charge indépendante de celles de l'établiffement de la monarchie. On peut voir dans les difpofitions ajoutées à la loi des Lombards (a), la difficulté qu'il y eut à faire recevoir les dîmes par les Ïois civiles: on peut juger, par les différens canons des conciles, de celle qu'il y eut à les faire recevoir par les lois eccléfiaftiques.

Le peuple confentit enfin à payer les dîmes, à condition qu'il pourroit les racheter. La conftitution de Louis le Débonnaire (b), & celle de l'empereur Lothaire (c) ton fils, ne le permirent pas. Les lois de Charlemagne fur l'établisfement des dîmes, étoient l'ouvrage de la néceffité; la religion feule y cut part, & la fuperftition n'en eut aucune.

La fameufe divifion (d) qu'il fit des dîmes en quatre parties, pour la fabrique des églifes, pour les pauvres, pour l'évêqué, pour les clercs,

(a) Entr'autres, celle de Lothaire, liv. III, tit. 3, chap. 6.

(b) De l'an 829, art. 7, dans Baluze, tom. I, pag. 663.

(c) Loi des Lombards, liv. III, tit. 3, §. S. (d) Ibid. §. 4.

prouve bien qu'il vouloit donner à l'églife cet état fixe & permanent qu'elle avoit perdu.

Son teftament (a) fait voir qu'il voulut achever de réparer les maux que Charles Martel fon aïeul avoit faits. IL fit trois parties égales de fes biens mobiliers: il voulut que deux de ces parties fuffent divifées en vingt-une, pour les vingt-une métropoles de fon empire; chaque partie devoit être fubdivifée entre la métropole & les évêchés qui en dépendoient. Il partagea le tiers qui reftoit en quatre parties; il en donna une à fes enfans & fes petitsenfans, une autre fut ajoutée aux deux tiers déjà donnés, les deux autres furent employées en œuvres pies. Il fembloit qu'il regardât le don immenfe qu'il venoit de faire aux églifes, moins comme une action religieufe, que comme une difpenfation politique.

(a) C'eft une espece de codicille rapporté par Eginhart, & qui eft différent du teftament même qu'on trouve dans Goldafte & Baluze.

CHAPITRE XIII.

Des élections aux évêchés & abbayes.

LE

ES églifes étant devenues pauvres, les rois abandonnerent les élections aux évêchés & autres bénéfices eccléfiaftiques (a). Les princes s'embarrafferent moins d'en nommer les miniftres, & les compétiteurs réclamerent moins leur autorité. Ainfi l'églife recevoit une espece de compenfation pour les biens qu'on lui avoit ôtés.

Et fi Louis le Débonnaire laiffa au peuple Romain le droit d'élire les papes, ce fut un effet de l'efprit général de fon temps (b) on fe gouverna, à l'égard du fiege de Rome, comme on faifoit à l'égard des autres.

(a) Voyez le capitulaire de Charlemagne, de l'an 803, art. 2, édit. de Baluze, p. 379; & l'édit de Louis le Débonnaire, de l'an 834, dans Goldaste, conftit. impériale, tom. I.

(b) Cela eft dit dans le fameux canon, Ego Ludovicus, qui eft visiblement fuppofé. Il eft dans l'édition de Baluze, p. 591, fur l'an 817.

CHAPITRE

XIV.

Des fiefs de CHARLES MARTEL.

JE ne dirai point fi Charles Martel

donnant les biens de l'églife en fief, il les donna à vie ou à perpétuité. Tout ce que je fais, c'eft que, du temps de Charlemagne (a) & de Lothaire I (b), il y avoit de ces fortes de biens qui paffoient aux héritiers, & fe partageoient entr'eux.

Je trouve de plus qu'une partie (c) fut donnée en alleu, & l'autre partie en fief. J'ai dit que les propriétaires des alleus étoient foumis au fervice comme les poffeffeurs des fiefs. Cela fut fans doute en partie caufe que Charles Martel donna en alleu auffi-bien qu'en fief.

(a) Comme il paroît par fon capitulaire de l'an 801, art. 17, dans Baluze, tom. I, pag. 360.

(b) Voyez fa conftitution inférée dans le code des Lombards, liv. III, tit. 1, S. 44.

(c) Voyez la conftitution ci-defius, & le capitulaire de Charles le Chauve de l'an 846, chap. xx, in villa Sparnaco, édit. de Baluze, tome II, pag. 31; & celui de l'an 853, chap. 111 & v, dans le fynode de Soif fons, édit. de Baluze, tome II, pag. 54; & celui de l'an 854, apud Attiniacum, ch. x, édit. de Baluze tom. II, pag. 70. Voyez auffi le capitulaire premier de Charlemagne, incerti anni, art. 49 & 56, édit. de Baluze, tom. I, pag. 519.

CHAPITRE

CHAPITRE

X V.

Continuation du même fujet.

L faut remarquer que les fiefs ayant été changés en biens d'églife, & les biens d'églife ayant été changés en fiefs, les fiefs & les biens d'églife prirent réciproquement quelque chofe de la nature de l'un & de l'autre. Ainfi les biens d'églife eurent les privileges des fiefs, & les fiefs eurent les privileges des biens d'églife: tels furent les droits (a) honorifiques dans les églifes, qu'on vit naître dans ces temps-là. Et comme ces droits ont toujours été attachés à la haute juftice, préférablement à ce que nous appelons aujourd'hui le fief; il fuit que les juftices patrimoniales étoient établies dans le temps même de ces droits.

(a) Voyez les capitulaires, liv. V, art. 44; & l'édit de Piftes de l'an 866, art. 8 & 9, où l'on voit les droits honorifiques des feigneurs établis tels qu'ils font aujourd'hui.

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