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sera redevable; elle n'en sera que plus dévouée; ses sentimens lui appartiendront exclusivement. Si au contraire une force essentiellement obéissante a des droits acquis et indépendans de la volonté royale, sa reconnoissance est partagée entre le Roi et la loi; le soldat devient jusqu'à l'abus, soldat citoyen. Le nom de citoyen a sans doute été prostitué par les égaremens et les excès révolutionnaires; mais la qualité ne l'est pas; elle convient à toutes les classes de la société, et aux royalistes plus qu'à tous autres, en ce sens que le meilleur citoyen est, dans la monarchie, le sujet le plus soumis et le plus fidèle à son Roi. Si dans l'armée on peut avoir un état indépendant de la volonté du Souverain, le principe monarchique est violé, et incessamment une autre loi voudra encore plus que celle dont il s'agit. Les affections de l'armée n'étant pas homogènes, il sera un peu plus tard facile d'obtenir qu'elle devienne nationale. Le mot nationale a reçu un développement de signification tel que je suis dispensé d'expliquer tout ce qu'on peut entendre par-là.

On ne peut assez répéter que les mauvaises lois sont les causes les plus efficaces des révolutions, et que ceux qui concourent à la formation des lois ne peuvent trop se pénétrer de ce principe, qu'il faut qu'elles soient en rapport direct avec la nature du gouvernement, pour

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lequel elles sont faites. Il faut donc que nos lois soient essentiellement monarchiques; si elles ne le sont pas, il faudra que la monarchie lutte contre les lois et les institutions qui en dérivent, et que les lois et les institutions luttent contre la monarchie quelle source de désordres!

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Les deux Chambres ont-elles le droit de voter des lois fondamentales?

Au premier aperçu le titre de ce chapitre va paroître une irrévérence. On ne peut élever une question semblable et conclure, par l'affirmative; car alors la question seroit oiseuse. Conclure par la négative, c'est renverser toutes les idées reçues. La Charte n'a institué les deux Chambres que pour voter les lois sur la proposition du Roi. La raison de douter n'existe pas, ou il faut anéantir la Charte. Conserver la Charte dans son intégrité est précisément une des raisons que je ferai valoir pour soutenir la négative. Je la développerai avec et par quatre autres puissantes raisons chacune d'elles me semble si péremptoire, qu'une d'elles suffiroit seule pour assurer le succès de ma négation.

Je prouverai que les Chambres ne PEUVENT ni ne DOIVENT faire les lois fondamentales; je prouverai qu'elles ne le peuvent par deux raisons la première, à cause de l'urgence de chacune de ces lois et de l'urgence de leur en

semble; la seconde, à cause de l'incohérence inévitable qui existeroit entre ces diverses lois, et de plus entre elles et la Charte, si elles sont faites de session en session, avec le concours d'une Chambre qui se renouvelle par cinquième tous les ans.

Je prouverai qu'elles n'ont pas le DROIT de les faire, et j'en établirai deux raisons; la première, faute de pouvoir spécial; pár la seconde, qui naîtra de la supposition que le pouvoir spécial est inutile, je démontrerai qu'il résulte des rapports politiques établis par la Charte entre le Roi et les deux Chambres, que celles-ci sont incompétentes pour voter les lois fondamentales. Commençons.

J'ai peu de choses à ajouter pour démontrer combien il est urgent que les lois fondamentales soient faites, à ce que j'ai dit dans les chapitres précédens, et particulièrement au chapitre IV, et j'y renvoie simplement le lecteur pour le fond des preuves; mais je n'ai pu jusqu'ici tirer les conséquences de l'urgence, quoique déjà démontrée. Les voici :

Quand des lois sont d'autant plus urgentes qu'elles sont actuellement et seront chaque jour plus indispensables, la conséquence est qu'il faut qu'elles soient faites dans le plus court délai possible, dans le moindre temps nécessaire pour les bien faire. Or, il y a quatre ans que la Charte nous a été donnée par le Roi;

nous avons eu une longue session chaque année, et cependant sur neuf lois au moins, qu'on doit considérer comme fondamentales, deux seulement ont été promulguées, et toutes deux sont inexécutables toutes deux seront nécessairement, quelques erremens que l'on suive, remises en discussion En procédant ainsi, nous sommes avertis que notre corps de droit politique ne sera complet que dans dix-huit ans, à compter de la prochaine session, en supposant encore que ces lois soient toutes faites à l'avenir, de telle façon que leur exécution soit possible. C'est-à-dire que pendant dix-huit ans s'exécutera cette loi non rendue d'exception générale, qui maintient les antécédens au retour du Roi dans l'état où Sa Majesté les a trouvés; c'est-àdire que pendant dix-huit ans le contrat qui résulte de la Charte ne sera que partiellement exécuté, mais ne le sera pas dans son ensemble; c'est-à-dire, enfin, que pendant dix-huit ans le gouvernement du Roi sera privé des forces vitales et vivifiantes nécessaires pour agir et faire agir, et forcé de recourir à des lois provisoires ou d'exception, forcé aussi de suppléer la volonté de la loi par la volonté arbitraire; que cet élat de choses, nécessairement précaire, est continuellement favorable aux agitateurs; car rien n'est plus aisé à renverser qu'un édifice dont les bases sont bien décrites dans le plan, mais ne sont pas encore établies. La fixité si désirable ne

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