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Postquam primus amor deceptam morte fefellit;
Si non pertæsum thalami tædæque fuisset,
Huic uni forsan potui succumbere culpæ.
Anna, fatebor enim; miseri post fata Sychæi,
Conjugis, et sparsos fraterna cæde Penatis,
Solus hic inflexit sensus, animumque labantem (8)
Impulit. Adgnosco veteris vestigia flammæ (9).
Sed mihi vel tellus optem prius ima dehiscat (1),
Vel pater omnipotens adigat me fulmine ad umbras,
Pallentis umbras Erebi, noctemque profundam,
Ante, pudor, quam te violo, aut tua jura resolvo.
Ille meos, primus qui me sibi junxit, amores ('')
Abstulit; ille habeat secum servetque sepulcro.
Sic effata sinum lacrimis implevit obortis ('').

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Anna refert : « O luce magis dilecta sorori (13),
Solane perpetua morens carpere juventa?
Nec dulcis natos, Veneris nec præmia noris?
Id cinerem aut Manis credis curare sepultos?
Esto; ægram nulli quondam flexere mariti,

Si ce cœur, trop puni d'avoir été sensible,
Ne s'étoit commandé de rester inflexible;
Si, depuis que la mort trahit mes premiers feux,
Je pouvois consentir à former d'autres nœuds;
Chère sœur, c'eût été mon unique foiblesse!
Oui, depuis qu'un époux si cher à ma tendresse
Par mon barbare frère a vu percer son flanc,
Et nos dieux paternels arrosés de son sang,
Cet étranger lui seul, dans mon ame constante,
Ébranla, j'en conviens, ma vertu chancelante;
Lui seul, apprivoisant ma farouche pudeur,
M'a fait ressouvenir de ma première ardeur :
Du feu dont j'ai brûlé je reconnois la trace.
Mais des dieux, qui du crime épouvantent l'audace,
Que le foudre vengeur sur moi tombe en éclats;
Que la terre à l'instant s'entr'ouvre sous mes pas;
Que l'enfer m'engloutisse en ses royaumes sombres,
Ces royaumes affreux, pâle séjour des ombres,
Si jamais, ô pudeur! je viole ta loi!

Celui qui le premier reçut jadis ma foi

Dans la tombe emporta le seul bien que j'adore;
Dans la tombe avec lui mon cœur habite encore. »
Elle dit: et des pleurs ont inondé ses yeux.

« O vous que j'aime plus que la clarté des cieux, Voulez-vous, dit sa sœur, toujours triste et sauvage, Vous imposer l'ennui d'un éternel veuvage;

Et, près d'un vain tombeau consumant vos beaux jour Fuir le doux nom de mère, et languir sans amours? Hôtes inanimés de la nuit éternelle,

Les morts s'informent-ils si vous êtes fidèle?

Non Libyæ, non ante Tyro; despectus Iarbas,
Ductoresque alii, quos Africa terra triumphis
Dives alit: placitone etiam pugnabis amori (14)?
Nec venit in mentem, quorum consederis arvis?
Hinc Gætulæ urbes, genus insuperabile bello,
Et Numidæ infræni cingunt, et inhospita Syrtis;
Hinc deserta siti regio, lateque furentes
Barcæi. Quid bella Tyro surgentia dicam (15),
Germanique minas?

Dis equidem auspicibus reor, et Junone secunda,
Hunc cursum Iliacas vento tenuisse carinas.

Quam tu urbem, soror, hanc cernes! quæ surgere regna Conjugio tali! Teucrum comitantibus armis,

Punica se quantis adtollet gloria rebus!

Tu modo

posce deos veniam, sacrisque litatis Indulge hospitio, caussasque innecte morandi,

Que mille adorateurs dans Sidon autrefois
Aient brigué vaînement l'honneur de votre choix;
Qu'Iarbe, redouté sur ce brûlant rivage,

Vous ait lassée en vain de son superbe hommage;
Qu'enfin dans ces climats féconds en grands exploits,
Tant de fameux guerriers et tant d'illustres rois,
Descendus pour Didon de leur char de victoire,
En vain aient à vos pieds mis leur sceptre et leur gloire;
Nul n'a pu
dans votre ame effacer votre époux;
Mais pourquoi vous armer contre un penchant plus doux?
De vos états au moins que l'intérêt vous touche.
Ici le Maure altier, le Barcéen farouche,
Contre vos murs naissants frémit de toutes parts;
Là des sables déserts entourent vos remparts;
Par-tout il faut lutter, sur ces affreux rivages,
Contre un climat barbare et des peuples sauvages.
Et ne craignez-vous point votre frère en courroux?
Quels orages dans Tyr s'élèvent contre vous!

Il n'en faut point douter, ces fiers enfants de Troie,
C'est Junon, c'est le ciel, ma sœur, qui les envoie.
Dieux! combien cet hymen vous promet de grandeur!
Qu'llion de Carthage accroîtra la splendeur!
Voyez vos murs peuplés, vos villes florissantes,
Et la mer se courbant sous vos flottes puissantes.
Vous, seulement des dieux implorez la bonté;
Par les soins caressants de l'hospitalité,

Du Troyen dans ces lieux prolongez la présence:
Que l'amour naisse en lui de la reconnoissance;
Prétextez ses périls, les rigueurs de l'hiver,
Ses nefs à réparer, l'inclémence de l'air;

Dum pelago desævit hiems, et aquosus Orion,
Quassatæque rates, dum non tractabile cœlum.

His dictis incensum animum inflammavit amore,
Spemque dedit dubiæ menti, solvitque pudorem (1).
Principio delubra adeunt, pacemque per aras
Exquirunt; mactant lectas de more bidentis
Legiferæ Cereri, Phœboque, patrique Lyæo,
Junoni ante omnis, cui vincla jugalia curæ.
Ipsa, tenens dextra pateram, pulcherrima Dido,
Candentis vaccæ media inter cornua fundit;
Aut ante ora deum pinguis spatiatur ad aras,
Instauratque diem donis, pecudumque reclusis ('7)
Pectoribus inhians spirantia consulit exta.

Heu vatum ignaræ mentes! quid vota furentem,
Quid delubra juvant? est mollis flamma medullas (18)
Interea, et tacitum vivit sub pectore volnus.
Uritur infelix Dido, totaque vagatur

Urbe furens, qualis conjecta cerva sagitta ('9),
Quam procul incautam nemora inter Cresia fixit
Pastor agens telis, liquitque volatile ferrum
Nescius. Illa fuga silvas saltusque peragrat
Dictæos hæret lateri letalis arundo.

Nunc media Enean secum per mœnia ducit (2o),

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