Page images
PDF
EPUB

droits sacrés de l'hospitalité, et a vécu avec confiance at milieu de vous; il vous a parlé le langage de sa mission; éloigné de deux milles lieues de sa patrie, il a représenté avec chaleur les prétentions de son Gouvernement, et n'a été arrêté par aucune considération; vos chefs et vos magistrats, ont été appellés et consultés, ils ont écouté avec calme les propositions de la France. Un gouvernement fort et établi sur les bases solides de la justice et de la raison, peut tout entendre et sait également tout discerner; ces propositions étaient incompatibles avec vos principes et vos institutions, elles ont été unanimement rejettées, ainsi le seront toutes celles qui tendront à vous faire rétrograder de la carrière que vous avez parcourue.

Ne craignant pas la guerre vous avez voulu prouver que vous désiriez la paix, et éviter à vos familles, à vos enfans, ce qu'elle entraine d'affligeant après elle; en offrant des sacrifices pécuniaires, pour imposer silence à vos persécuteurs, dont les cris et les plaintes importunent le trône français, pour la restauration des biens, qu'ils craindraient d'aborder, s'ils pouvaient se convaincre, qu'ils seraient, à leur approche, transformées en cendres brùlantes. Vos chefs, dépositaires de vos intentions, généralement exprimées, sur tout depuis la paix continentale, en ont fait la proposition généreuse en votre nom; elle vous honore et donnera l'idée de votre sagesse, autant qu'elle fera craindre d'exciter votre ressentiment.

Haytiens! vous avez fait ce que vous avez dû faire. Le droit des armes a mis le pays dans vos mains, il est votre propriété irrévocable, et vous ètes les maîtres de faire tel usage que vous voulez de ce qui vous appartient.

Les nations, par un accord mutuel entre elles et dont elles ne s'écartent jamais, respectent le droit des gens; le caractère d'un Envoyé est toujours sacré, ses intentions fussent-elles des plus coupables. Le général Français Dau xion Lavaysse est parti, sa mission étant finie. Vous n'aurez pas à vous reprocher d'avoir inanqué à ce que vous vous devez à vous-mêmes. Vous n'avez pas violé ce principe fondamental, qui établit parmi les gouvernemens ces communications nécessaires pour leurs relations politiques; Vous vous êtes rendus estimables à vos propres yeux, vous étes dignes de l'être aux yeux des nations.

La

La victoire accompagne toujours une cause juste; c'est Vous dire qu'elle vous est assurée, si l'on prétend vous troubler. Dans ce cas, vous me verrez toujours à votre tête, fier de vous y conduire ou de périr avec vous. Quel que soit le sort que le ciel nous destine, nous devons nons y préparer. C'est aux chefs dont l'autorité paternelle vous dirige dans les arrondissemens dont le commandement leur est confié, à établir des retraites assurées aux habitans,, dans l'intérieur de nos montagnes; à employer pour cela les ouvriers qui sont sous leurs ordres: c'est encore à eux à multiplier les plantations de vivres de toute espèce. C'est aux magistrats, aux juges de paix à recommander l'union, la concorde, l'amour du travail et la confiance parmi leurs concitoyens. La République compte que chacun fera son devoir; j'en donnerai l'exemple.

J'ai ordonné l'impression des pièces relatives aux communications faites, par le gouvernement français; elles seront mises sous vos yeux, à la suite des présentes. Vous verrez ce qu'on vous propose et ce que vous deviez répondre.

Donné au Port-au-Prince, le 3 Décembre 1814, an XI de l'indépendance.

PÉTION.

Par le Président,

Le Chef d'Escadron et Secrétaire,

B. ING IN A C.

G

An Port-au-Prince, de l'Imprimerie du Gouvernement,

NUMERO 3.

INSTRUCTION S

Pour MM. Dauxion Lavaysse, de Médina et Dravermann.

Les intentions paternelles de Sa Majesté étant derétablir f'ordre et la paix dans toutes les parties de ses états par les moyens les plus doux, elle a résolu de ne déployer sa puissance pour faire rentrer les insurgés de Saint-Domingue dans le devoir, qu'après avoir épuisé toutes les mesures que lui inspire sa clémence. C'est plein de cette pensée que le Roi a porté ses regards sur la colonie de Saint-Domingue. En conséquence, quoiqu'il ait donné ordre de préparer des forces majeures et de les tenir prêtes à agir si leur emplo; devenait nécessaire, il a autorisé son Ministre de la marine et des colonies à envoyer à Saint-Domingue des agens pour prendre une connaissance exacte des dispositions de ceux qui y exercent actuellement un pouvoir quelconque, de même que de la situation où s'y trouvent les choses, et les individus de toute classe. Sa Majesté est disposée à faire des concessions et des avantages à tous ceux qui se rangeront promptement à l'obéissance qui lui est dûe et qui contribueront au rétablissement de la paix et de la prospérité de la colonie. C'est d'après le rapport que lui fera son Ministre de la marine, lorsque ce Ministre aura entendu celui des agens ci-dessus désignés, qu'il déterminera la mesure de ces concessions.

MM. Dauxion Lavaysse, de Médina et Dravermann désignés au Roi pour remplir cette mission se rendront incessamment, soit à Porto Rico, soit à la Jamaïque par un des

paquets-bots anglais qui font voile de Falmouth régulièrement deux fois chaque mois De celles de ces îles où ils au ront débarqué, ils passeront à Saint Domingue et ne s'y' montreront d'abord que comme gens qui viennent préparer pour leur compte, ou pour celui de quelque maison de commerce, des opérations de ce genre. Deux d'entr'eux se mettront le plutôt qu'ils pourront, mais avec beaucoup de circonspection, en rapport avec Péthion et son second Borgella: le troisième fera de même à l'égard de Chiristophe. Ce ne sera qu'après avoir sondé adroitemeut les dispositions de ces chefs, après avoir pris connaissance de leurs moyens intérieurs, de leur plus ou moins de prépondérance dans l'île, de l'esprit de toutes les classes subor données, qu'ils s'ouvriront davantage à eux, et ils n'iront jusqu'à leur donner connaissance de leurs lettres de créance' que lorsqu'ils jugeront que le moment en est venu. On ne saurait à cet égard, leur tracer une marche précise, on s'en repose donc sur leur prudence.

Lorsqu'ils en seront venus au point de traiter, franchement avec ces chefs, ils discuteront un plan d'organisation politique quileur agrée et qui soit tel que le roi puisse consentir à l'accorder Ils recevront de ces chefs l'assurancé qu'ils adhéreront à ce plan, et que, protégés par la puissance royale, ils rangeront à l'obéissance tous leurs subor donnés. De leur côté, les agens, sans signer aucun traité formel, chose qui ne serait pas de la dignité du Roi, assureront aux chefs que Sa Majesté est disposée à accorder ce dont on aura été convenu, et qu'elle le fera connaitre aussitôt leur retour en France, par une déclaration émanée de sa grâce. Ils pénétreront en outre ces chefs de cette vérité, que ce que le Roi aura une fois déclaré sera irrévocablement et religieusement observé.

Si ces chefs sont comme on l'assure des gens instruits et éclairés (particulièrement Péthion et Borgella) ils sentiront qu'il ne suffit pas pour eux, et pour les leurs successivement en descendant, d'obtenir des avantages, qu'il faut aussi les rendre solides; ils reconnaitront que, pour être tels, ces avantages ne doivent être exagėrės, ni en mesure pour eux-mêmes, ni en extension à la généralite; ils verront bien que si la grande masse des noirs n'est pas remise et maintenue dans un état d'esclavage, ou tout ou moins de soumission semblable à celui où elle était avant les troubles, il ne peut y avoir ni tranquillité, ni prospérité pour la colonie, ni sûreté pour eux-mêmes. Ils verront encore que pour que cette classe nombreuse qui constitue le peuple dans la colonie, demeure soumise à un régime exact quoique modéré, il faut que l'intervalle qui la sépare de l'autorité suprême soit rempli par des intermédiaires, et que l'exemple d'une prééminence et d'une obéissance graduées, lui rendent son infériorité moins frappante. D'après ces considérations, il est raisonnable de supporter que Péthion et Borgella, satisfaits d'obtenir faveur entière, pour eux, et pour un petit nombre des leurs qui sont les instrumens nécessaires, consentiront, sans difficulté, à ce que leur caste, en acquérant la presque totalité des droits politiques, reste pourtant, à quelques égards, un peu audessous de la caste blanche; car d'une part, l'assimiliation totale à eux accordée sera plus saillante et plus flatteuse; et de l'autre, leur caste sera d'autant plus assurée de maintenir la caste noire libre et par celle-ci les noirs non libres à la distance où il lui importe de les maintenir, qu'elle aura elle-même laissé subsister une petite différence entr'elle et les blancs.

а

On insiste beaucoup sur ce point parce qu'il doit être le

« PreviousContinue »