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La province du Nord et la première division de la province de l'Ouest qui n'avaient pris aucune part à l'événement, ne reconnaissaient que l'autorité du général en chef et n'obéissaient qu'à ses ordres immédiats; au lieu que la province du Sud et la seconde division de l'Ouest qui avaient opérée la révolution, n'obéissaient et n'exécutaient que les ordres émanés de Pétion et de Gérin; ces deux chefs avaient bien l'air d'agir et d'obéir aux ordres du général en chef, mais ils ne les exécutaient que suivant leur bon plaisir, Dans cet état de choses, la guerre civile ne pouvait tarder d'arriver.

Les conjurés étaient restés au Port-auPrince. Après la mort de l'Empereur, ils tinrent conseil ; le fougueux Gérin opinait que l'on marchât de suite sur la ville de Dessalines, Jieu où étaient renfermés les trésors du tyran, disait-il; mais comme il aurait fallu auparavant combattre, l'artificieux Pétion fut de l'avis contraire, et s'y opposa. Il représenta que la révolution s'étant faite sous le nom du général en chef, si on marchait sur des troupes qui obéissaient à ses ordres, c'était se montrer

à découvert contre lui et commettre un acte d'agression qui pourrait leur faire un tort considérable dans l'esprit du peuple et de l'armée; Pétion qui avait son plan de conduite tout tracé préférait d'employer la dissimulation, la perfidie et la séduction plutôt que la force ouverte, pour combattre son ennemi, qu'il espérait d'attirer dans un piége semblable à celui qu'il avait tendu à l'empereur, et de le faire succomber sous ses coups, avec autant de facilité.

Voici les moyens qu'ils employèrent et la manière qu'ils s'y prirent.

Il fallait exposer aux yeux du peuple et de l'armée et rendre compte au général en chef des causes qui avaient nécessité l'événement qui venait d'avoir lieu; en conséquence Gérin écrivit au général en chef, de l'Anse-à-Veau, le 12 Octobre 1806, et lui rend compte de l'insurrection des Cayes et des causes qui l'ont amenée; sa lettre commence par ces mots : » Mon cher Général, tous les militaires et le peuple vous regardent depuis long-temps comme le le Successeur au Gouvernement d'Hayti >>. Et la termine ainsi : « Mais bien

de vous reconnaître pour le premier chef de cet Empire, jusqu'à ce que le moment heureux de vous le prouver de vive voix soit arrivé ».

en masse :

Le 13 Octobre, les chefs de l'armée da Sad écrivent collectivement au général en chef, pour lui rendre compte de leur levée « Nous ne vous cacherons pas, disent-ils, digne Général en Chef, que nous croyons votre indignation au moins égale à la nôtre; et nous vous proclamons avec joie et à l'unanimité le Chef Supreme de cette Isle sous quelle dénomination qu'il vous plaise de choisir. Tous les cœurs sont à vous; nous jurons devant Dieu de vous être toujours fidèles, et de mourir pour la liberté et pour vous.

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L'on y voit encore ces mots : Acquin, l'Anse-à-Veau, Jacmel, sont pour vous et pour nous ». Et ensuite: « Nous attendons, Général en Chef, vos ordres pour l'ensemble

de nos opérations; soyez notre protecteur et celui d'Hayti; nous espérons que Dieu bénira ta bonne cause ».

Le

Le lendemain de la mort de l'empereur, le Ministre de la guerre Gérin, par sa lettre du 18 Octobre 1806, coroborre celle du 13 i

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Le tyrann'est plus et l'allégressé publique applaudit à cet événement comme elle vous nomme pour nous gouverner. Le peuple et l'armée ne doute pas, Excellence, que vous vouliez bien agréer les fonctions qu'il vous charge par une volonté générale bien prononcée et spontanée

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Pétion, lui-même, l'artificieux Pétion écrivit au général en chef aprés l'événement. Sa lettre datée du 16 parle de l'événement arrivé le 17; il la termine par ce paragraphe :

« Nous n'aurions pas achevé notre ou vrage, Général, si nous n'avions pas été pénétrés qu'il existait un chef fait pour com

mander à l'armée avec toute la latitude du

pouvoir dont il n'avait eu jusqu'à ce jour que le nom; c'est au nom de toute cette armée toujours fidèle, obéissante, disciplinée, que nous vous prions, Général, de prendre les rénes du gouvernement, et de nous faire jouir de la plénitude de nos droits, de la liberté pour

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laquelle nous avons si long-temps combattus et d'étre le dépositaire de nos lois auxquelles nous jurons d'obéir puisqu'elles seront justes »

Les généraux assemblés au Port-au-Prince rédigèrent une Proclamation portant pour titre: Résistance à l'Oppression, dans laquelle ils s'expriment ainsi :

En attendant le moment où il sera possible de l'établir la Constitution) nous déclarons que l'union, la fraternité et la bonne amitié, étant la base de notre réunion, nous ne déposerons les armes qu'après avoir abattu l'arbre de notre servitude et de notre avilissement, et placé à la tête du gouvernement un homme dont nous admirons depuis longtemps le courage et les vertus et qui comme nous, était l'objet des humiliations du tyran; le peuple et l'armée dont nous sommes les organes proclament le général Henry Christophe Chef Provisoire du Gouvernement Haytien, en attendant que la Constitution en lui conférant définitivement ce titre auguste, en ait désigné la qualification

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Or, toutes ces pièces authentiques prouvent.

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