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d'ordre et de régularité dans l'administration, et la discipline parmi les troupes. Sa conduite privée, ses mœurs régulières avaient fait tourner tous les regards vers lui; il était l'espoir des gens de bienet des pères de famille. L'empereur n'apportait aucun remède à ces maux; il les ignorait complètement, il était aveuglé par sa prospérité et par les flatteurs ses alentours qui lui cachaient les gémissemens du peuple; cos vils flatteurs, ces hommes corrompus et méchans ne s'occupaient que de futilité, de danses, de bagatelles, d'intrigues de femmes, etc; ils étaient bien éloignés de vouloir lui donner des conseils salutaires qui pouvaient lui faire ouvrir les yeux sur sa situation, et le sauver du péril qui le menaçait, et consolider son gouvernement; l'Empereur se jettait lui-même dans le piége que lui tendaient ses ennemis, qui l'entraînaient à négliger ses devoirs et à commettre des actions indignes de lui, pour lui faire perdre l'amour et la vénération du peuple, et être immolé ensuite avec plus de facilité.

Cependant Petion et ses complices ne sẽ dissimulaient pas qu'ils auraient de grands obstacles à surmonter, pour parvenir à leurs desseins. L'empereur abattu, le timon de l'état revenait de droit au général en chef; ce premiet pas obtenu, ils n'avaient encore rien fait, ils avaient tout à craindre et à redouter du peuple et des troupes: ils résolurent de se servir du nom du général en chef, pour opérer avec moins de dangers la révolution qu'ils méditaient.

Ils fabriquèrent une lettre au nom du Général en Chef qui appelait le peuple et les trompes à la révolte contre l'empereur; en agissant ainsi, les conjurés atteignaient u double objet, dans le cas où l'empereur aurait échappé de leurs embûches, ils le compromettaient avec le Général en Chef. Ainsi d'une manière ou de l'autre, ils ne pouvaient manquer de faire tomber l'Emperenr sous leurs coups, ou le Général en Chef sous ceux de l'empereur.

Le complot éclata le 10 Octobre, 1806 dâns la plaine des Cayes; les partisans de l'Empereur furent

furent sacrifiés à la vengeance des conjurés.

Le Ministre de la Guerre Gérin, qui prétextait être malade à l'Anse-à-Veau, se mit à la tête de l'insurrectiou du Sud et marcha avec les troupes sur le Port-au-Prince.

Pétion, pour tenir l'Empereur dans une sécurité traîtresse, lui annonça qu'une insur rection s'était manifestée dans le Sud et qu'il partait pour en arrêter le cours.

L'empereur qui avait en Pétion la plus grande confiance se reposa entièrement sur lui et lui ordonna de prendre des mesurés pour appaiser ces troubles.

Pétion partit du Port-au-Prince avec ses troupes dans l'intention de faire jonction avec celles du Sud; il emmena avec lui le général Gerinain, dont il n'était pas sûr, et donna ses ordres par terre et par mer que personne ne sortit de la ville, pour empêcher que l'Empereur ne fût instruit de se qui se passa't; Pétion laissa ses troupes au Grand-Goave, et se rendit auprès de Gérin au Petit-Goave où ils s'abouchèrent ensemble. Les deux corps d'armée firent jonction au Grand-Goave; là, ils arrêtèrent le général Germain, défilèrent

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pour le Port-au-Prince et entrèrent dans cette ville le 16 Octobre, avec les généraux Yayou, Magloire, Ouagnac et autres principaux instrumens de la conjuration.

Pendant ce temps l'Empereur était à Dessalines; après avoir donné quelques ordres préaJables à son départ, il prévint le général en chef de l'insurrection qui avait éclatée dans le Sud, en lui mandant de se tenir prêt à marcher au premier ordre; il laissa le commandement de Dessalines et de la Province de l'Ouest au ministre des finances André Vernet, avec ordre de faire défiler successivement les troupes de l'Ouest pour le joindre, en cas qu'il en eut besoin, et il partit pour l'Arcahaye presque seul, suivi de quelques aides de camp et d'une faible escorte de cavalerie.

Le général en chef, à la réception de la lettre de l'empereur, fût pénétre de la plus vive inquiétude; il dépêcha de suite un de ses aides de camp auprès de l'empereur pour lui demander ses ordres pour mai cher, et lui recommander de ne pas s'aventurer sans troupes et sans être bien informé de la situation des choses, mais malheureusement l'aide de

camp ne put atteindre l'empereur; arrivé à la Source-Puante (1), il apprit que l'empereur n'était plus.

Une incroyable fatalité le conduisait à la mort; dans sa route pour l'Arcahaye, il rencontra un de scs aides de camp, qu'il avait précédemment envoyé en mission dans le Sud; cet officier qui n'avait pu pénétrer que jusqu'à Miragoane, rendit un compte exact à l'empereur et l'engagea de ne pas entrer au Port-au-Prince sans troupes; mais l'empereur qui avait une confiance aveugle dans Pétion, et dont l'âme intrépide était au-dessus de la crainte, méprisa l'avis salutaire qui lui était donné et chassa l'aide de camp de sa présence,

A l'Arcahaye, il prit pour sa garde les six compagnies d'élite du 3e régiment et les fit défiler sous le commandement du colonel Thomas et du lieutenant colonel Gédéon, avec ordre d'aller l'attendre aux portes du Portau-Prince, à l'endroit appelé le Pont-Rouge; pour lui il s'arrêta sur la ci-devant habitation Labarre où il se reposa; c'est dans cet endroit,

(1) Distante de six lieues du Port-au-Prince

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