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ses concitoyens et de son pays, manquait de talens nécessaires pour bien gouverner; et à ce premier malheur il joignait encore celui de s'entourer d'hommes immoraux et corrompus, vendus aux français, qui l'entraînèrent à sa perte, comme les ex-colons avaient entraîné le gouverneur Toussaint.

Il est fastidieux, sans doute, de se répéter mais il est des vérités que l'on ne peut trop souvent reproduire quand le salut d'un pays et de tout un peuple en dépend! Le premier devoir de l'écrivain politique est d'éclairer, le' second de dire la vérité sans crainte; il ne doit voir que ce qui est juste, utile et avantageux à son pays; il ne doit pas craindre de froisser ni de choquer les intérêts, les opinions, les passions de qui que ce soit; il doit dévouer généreusement sa vie pour le bonheur, la gloire et le salut de sa patrie, et s'il ne se sent pas assez de force d'âme pour exécuter son entreprise, s'il ne peut faire une abnégation entière de sa personne, il doit cesser d'écrire, se taire et briser sa plume!....

Par une ordonnance, du 26 Juillet 1805; an deux de l'indépendance, l'Empereur nomma

le général de division Henry Christophe Général en Chef de l'armée d'Hayti, André Vernet, Ministre des Finances et de l'Intérieur, et Etienne Elie Gérin, Ministre de la'

et de la Marine.

guerre

Les généraux de couleur Pétion, Geffrard et Gabart furent maintenus dans leurs come mandemens. (1)

Alors les haytiens qui s'étaient expatriés volontairement avec les français cherchaient les moyens de pouvoir rentrer dans le sein d'une patrie qu'ils avaient déchirée, pour y exciter encore de nouveaux troubles. L'Empereur mû par des intentions libérales, plutôt que réfléchies, leur permit d'entrer dans le pays, et ordonna de payer les frais de leurs passages; bientôt on vit arriver Blanchet Dartiguenave, Faubert, David Trois, tous partisans des français et de Pétion, les ennemis les plus cruels de leur pays.

L'Empereur accueillait ces hommes perfides et ingrats avec bonté, les comblait de ses

(1) Clerveaux, Gabart.et Geffrard, ces trois génér raux de couleur sont morts à peu-près dans le mêma temps.

faveurs; mais il ne minent pas sitôt le pied à terre qu'ils se joignirent à Pétion et travaillêrent, de tous leurs efforts, aux moyens de bouleverser l'empire et d'allumer la guerre civile.

Le but de cette faction était de porter Pétion à la tête du gouvernement; pour cet effet, il fallait détruire les deux chefs noirs Jean-Jacques Dessalines et Henry Christophe qui avaient droit au gouvernement, par l'ancienneté de leurs services, par le vœu du peuple et de l'armée. Voici comme les factieux s'y prirent pour exécuter leurs projets; leurs agens étaient apostés de toutes parts, ceux qui étaient auprès de la personne de l'Empereur l'excitaient à persécuter les hommes qui lui étaient attachés et qui ne voulaient point prendre part à la conspiration; par ce moyen les conspirateurs avaient le double avantage d'éloigner de l'Empereur ses propres amis, et d'empêcher la vérité de parvenir jusqu'à lui. Les complices répandus dans les provinces travaillaient sourdement à égarer l'esprit public Papalier aux Cayes, Gérin à l'Anse-à-Veau, où il s'était retiré, feignant d'être malade;

Blanchet jeune aux Gonaïves, faisait de fro quens voyages de l'Ouest et au Sud; David Trois, déguisé en pacotilleur, parcourait le pays, se rendait dans les montagnes du Roche lois, au Môle, au Port-de-Paix, au Grose Morne, au Cap-Henry, pour nouer le fil de la conspiration qui devait avoir son effet de toutes parts.

Pétion était l'âme du complot; il était le puissant mobile qui faisait tout mouvoir; i affectait d'avoir pour l'Empereur la plus tendre amitié, qui de son côté, était complètement aveuglé sur son compté, et avait en lui une confiance illimitée. Pétion possédait la tactique des grands conspirateurs; il s'attachait à se rendre, de jour en jour, plus populaire flattait le peuple, caressait les troupes, autorisait la licence et la démoralisation; il s'affubla du masque de la philosophie; il abandonna ses devoirs; il avait l'air de ne rien ambitionner, honneurs, ni grades, ni richesses, il méprisait tout; sous les haillons de Diogène, il cachait ses désirs immodérés; et tel qu'un nouveau Sixte-Quint, cet hypocrite marchait hardiement, et dans une parfaite sécurité à l'exé cution du plan qu'il s'était tracé.

Un désordre général eut licu dans l'empire les finances désorganisées, les troupes sans paye et sans habillemens, la vérification des titres de propriétés poussée à l'extrême, sans un juste examen; la corruption des gens qui occupaient les fonctions les plus éminentes un mécontentement général qui se manifestait sourdement dans le peuple et les troupes, menaçaient l'état d'une subversion prochaine. Toutes ces calamités étaient encore envénimées et agravées par les complices de Pétion, les partisans des français qui arrivaient de tous. côtés, et se rendaient dans l'Ouest et le Sud pour préluder au grand drame qui devait avoir lieu. (1)

Dans ce débordement de meurs corrompues, le général en chef Henry Christophe cherchait en vain à y opposer une digue, il avait maintenu, autant qu'il était en son pouvoir, plus

(1) Il est à remarquer qu'à chaque fois que les français ont voulu faire une entreprise contre le pays, ils se sont fait précéder par des espions et des agens secrets; les prêtres ont été les instrumens particulièrement employés pour cet effet, ainsi que les indigènes de la peau, blancs ex-colons par principes et par caractère, tels que Milcent, Colombel, Labelinais, etc.

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