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oubli de leurs devoirs n'a pas laissé que d'enhardir les ex-colons dans leur système de duplicité et de mensonge ! Cependant le gouvernement du Sud-Ouest est composé d'un sénat et d'une chambre de représentans où siègent, sans doute, des hommes éclairés, de bons observateurs qui veillent aux intérêts du peuple!

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Que faisiez-vous donc alors pères conscrits, assis sur vos chaises curules, lorsque le président de la République, tramait sous vos yeux et par écrit, l'esclavage des noirs, la ruine de votre patrie et la destruction de vos concitoyens ? yous dormiez, sans doute, hélas ! d'un sommeil bien profond? car tous les cris de sauvages malfaisans, de nègres marrons, d'île de Ratau qui rétenussaient dans vos oreilles n'ont pu vous retirer dans cette profonde l'éthargie? vous étiez donc dans un entier renoncement de vous mêmes, dans un parfait oubli des affaires de ce monde? car vous vous seriez inquiétés du sort de votre patrie et de vos infortunés concitoyens; vous auriez pu lire dans les actes et dans les actions de Pétion, combien il vous avait indignement trompés, trahis et

avilis; et au lieu de vous atteler, comme vous avez fait, dans son char mortuaire, comme d'indignes républicains, vous eussiez jetté le cadavie de ce traître à la voierie ! mais pères conscrits vous dormicz alors; vous étiez dans un entier renoncement de vous mêmes, dans un par fait oubli des affaires de ce monde ? néanmoins vous avez péchés; mais c'est sans connaissance de cause et sans préméditation, vous êtes donc bien excusables, et nous vous excusons! . . . .

Le 6 Octobre le vicomte de Fontanges notifie à Pétion l'ordonnance de Louis XVIII, qui nommait ses commissaires à St-Domingue: « Cette ordonnance ( dit Fontanges) doit calmer toutes les inquiétudes et remplir tous les cœurs d'espérance, elle vous fera connaîtreaussi, Général, quelle est l'étendue de nos pouvoirs

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Par l'ordonnance en question, les commissaires devaient s'entendre avec les administrateurs actuels, sur tout ce qui tient à la légisJation de la colonie, au régime intérieur et d'ordre public, aux fonctionnaires civils et militaires, à l'état des personnes et au rétablissement des relations commerciales avee la metropole, etc.

Or, qu'est-ce que Petion avait besoin d'en savoir davantage? N'avait-il pas sous les yeux toute l'étendue des pouvoirs de ces commissaires? Toutes les propositions les plus avantageuses qui pouvaient lui être faites, ne se réduisaient-elles pas à reconnaître la souveraineté de la France? le pouvail-il? en avait-il le droit et le pouvoir ? Il ne pouvait donc entamer une ouverture sur des bases inadmissibles; c'est cependant ce qu'il a fait.

Il paraît par la correspondance que j'ai sous les yeux, que Pétion avait eu des entretiens secrets avec le vieux vicomte de Fontanges; avant qu'il en ait eu de publiques, où sans doute, il lui avait fait savoir toutes les difficultés de sa position; ce n'est qu'après avoir eu ces entretiens particuliers, que Pétion donna à ces commissaires ex-colons, une audience à sept heures du soir, en présence des principales autorités de la République.

Cette audience nocturne à la lueur des flambeaux devait présenter une scène assez curieuse, plaisante même les maîtres d'un côté faisant valoir leurs anciennes prétentions. et les sujets de l'autre qui avaientla bassesse de

les écouter; il fut question de l'espionnage de Dauxion Lavaysse; ensuite, il fut sans doute convenu entre Pétion et les ex-colons qu'il était essentiel de sonder les dispositions du Nord-Ouest, avant que de pouvoir rien

entamer.

Si dans cette circonstance le malheur avait voulu que les rênes du gouvernement du Nord-Ouest eussent été aussi bien confiées à un chef aussi vil qu'était celui du Sud-Ouestl'on aurait vu à la honte de l'espèce humaine, ces deux gouvernemens se disputer de bassesse pour rentrer sous le joug de ces maîtres orgueilleux; et le peuple indiguement sacrifié eut cté encore obligé de révendiquer de nouveau ses droits, par la force en accourant aux armes !

Heureusement pour le peuple haytien, pour son honneur et sa gloire, qu'Henry tenait les rênes du gouvernement du Nord-Ouest, d'une main ferme et sage; son énergie, son patriotisme, ses principes invariables d'honneur et de probité, ont été le régulateur qui a tout ramené à la cause de la liberté et de l'indépendance!

Les commissaires ex-colons partirent donc

pour le Nord, dans l'intention de retourner au Port-au-Prince, s'aboucher avec Pétion, après qu'ils auraient toutefois sondé les dispositions du Roi d'Hayti.

Voici comme la Gazette Royale d'Hayti du 27 Octobre, rend compte de cet événement; je ne pourrais le faire d'une manière plus exacte et plus fidèle.

« Pour la première fois, (dit la Gazette Royale) depuis vingt-sept ans, le pavillon

blanc vient de se montrer sur nos côtes d'une

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manière aussi peu honorable que ridicule pour le gouvernement français; la vue de ce pavillon méprisable, symbole de l'esclavage, sous lequel nous avons gémi pendant des siècles, a excité dans tous les cœurs la plus profonde indignation. La cause d'un peuple juste, brave et généreux qui résiste à la persécution et à la plus monstrueuse de toutes les tyrannies, dont il n'existe aucun exemple dans les annales des peuples; cette cause, dis-je, ne peut être indifférente à l'universalité des hommes: nous ne devons donc jamais nous lasser de faire eutendre notre voix, discuter nos droits et plaider la plus juste des causes au tribunal du

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