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et que les vaisseaux anglais couvraient les mers, qu'il n'avait osé se déclarer ouvertement en faveur de la France, de crainte de s'attirer les forces anglaises jointes avec les nôtres sur les bras, ce qui l'avait obligé jusqu'alors de conspirer sourdement, et dans l'obscurité la ruine de sa patrie.

Nous verrons bientôt à découvert les trames odieuses de cet homme criminel; nous verrons ce fier républicain, cet ange de bonté, ce père de la patrie, comme l'appellent Colombel et Milcent, prosterné aux pieds d'un vil espion, conspirer contre l'état et se rendre coupable, du crime de haute-trahison!

Pétion ne pouvait donc voir le rétablissement de Louis XVIII que comme l'instant favorable où il pourrait mettre à exécution ses desseins de faire retourner Hayti sous le joug de la France.

L'Europe était pacifiée; il n'avait plus rien à craindre des anglais, et il pouvait communiquer librement avec la France et se faireappuyer, au besoin, de ses forces; il vit donc avec joie l'arrivée des envoyés français à la Jamaïque, qui allaient lui en faciliter les moyens.

Pétion était déjà d'accord avec les français sur le point principal qui était, qu'Hayti retournerait dans l'état de colonie française; mais il différait sur divers points et sur les moyens d'exécution; le ministre Malouet et les ex-colons voulaient qu'aussitôt que l'acte de l'indépendance eut été aboli, que l'escla vage eut été rétabli, immédiatement comme en 1789; leur éloignement du pays, vingtcinq années d'absence, la tenacité de leurs principes coloniaux, leurs préjugés, leur orgueil et leur avarice ne leur avaient pas permis de voir différemment.

Au lieu que Pétion qui avait une connaissance plus exacte des choses, était effrayé du danger et de l'impossibilité qu'il y avait de replonger la population noire dans l'esclavage, il voulait que l'on eût accordé aux haytiens, les droits de sujets et de citoyens français, et quand au rétablissement de l'esclavage, que cela se fusse fait lentement, sans secousses violentes, avec le secours du temps; il voyait donc avec chagrin et inquiétude, lorsqu'il eut pris lecture du pamphlet de H. Henry, que les français s'étaient mal pris, et qu'ils

s'étaient égarés de la vraie route qu'ils auraient dû prendre, pour réussi. Pour les remettre sur la voie, il fit repondre à ce pamphlet par un autre intitulé : Colombus (1). La réponse était délicate, il fallait emprunter un nom étranger pour en tenir le langage, se mettre à couvert de tout soupçon et atteindre le but qu'il s'était proposé.

Par cet écrit, Pétion avait un double objet à remplir, le premier était de préparer le peuple à recevoir les émissaires français et à faire le sacrifice de son indépendance, sans murmurer; pour y parvenir, il commença par corrompre l'esprit public, et vouloir réveiller l'ancien attachement que nous avions à la France.

« C'est ainsi (dit Pétion, dans l'écrit de » Colombus) que j'ai jugé l'esprit public à Hayti, lorsque l'arrivée à la Jamaïque » d'une délégation envoyée par S. M. Louis » XVIII, chargée de traiter avec ce gouver

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(1) Le pamphlet intitulé Colombus est officiel; le général Pétion l'a reconnu pour être un écrit du gouvernement. Voyez la pièce justificative page 3.

»nement a été annoncée. Cette nouvelle n' produit aucune impression défavorable chez les haytions; leurs yeux ont été souvent » tournés vers le rivage pour voir arriver les députés des dispositions honorables ont été » faites pour les recevoir, et une communica❤ » tion électrique, de sensibilité, d'égards, de prévenance et de tout ce que le droit des » gens a de plus sacré, s'est insinué dans » tous les cœurs »>..

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C'est ainsi qu'il corrompait l'esprit public;; et son second objet étant de faire connaître ses intentions aux français, et de leur démontrer qu'ils s'étaient mal pris, qu'il était impossible, dangereux et contre les intérêts de la France de brusquer le rétablissement de l'esclavage; il poursuit ainsi : « Cette attente jusqu'à présent a été trompée, et je le regrette d'après la sensation qu'a produite l'écrit, de M, H. Henry J'y ai vu ( dit-il ) un acte peu propre à ramener les esprits sur-tout dans la circonstance actuelle ». C'est dans cet écrit, chef-d'œuvre de perfidie de la part de Pétion, eu sous le faux nom de Colombu, qu'il tracait aux français et aux ex-colons la conduite qu'ils

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devaient suivre; de peur qu'ils ne s'égarassent i Pétion les prenait pour ainsi dire, par la main les initiait dans sa politique infernale, leur donnait des conseils, que le génie du mal aurait pu seul inventer, pour replonger ses concitoyens, ses frères, par succession de temps dans les horreurs de l'esclavage.

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Vous n'avez pas (leur disait Pétion) » vous n'avez pas une connaissance exacte » sur le véritable état des choses actuelles, » vous ne pouvez pas avoir une omniscience » certaine de tout ce qui s'est passé, après » une longue série d'année d'absence et d'in»terruption de communication à deux mille

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lieues de ce pays; vous devez donc com» mencer par vous instruire à fond de tout ce » que vous avez à faire, pour ne pas vous » tromper; sans quoi vous serez sujet à com» mettre de grandes erreurs, et vous apporte»rez des remèdes souvent pires que le mal; » comme cela est toujours arrivé au gouver»nement français dans tout le cours de la » révolution des colonies, particulièrement « lors de l'expédition de Leclerc. Si vous un'aviez pas été si pressé à prendre des me

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