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Conseil et sans opposition, que l'on marche rait de suite 'contre le Port-au-Prince.

Les préparatifs de guerre se firent avec une activité incroyable; l'événement de l'escadre avait eu lieu dans le mois de Février, et vers le milieu de Mars l'armée était en campagne.

Le gros de l'armée dirigea sa marche par le Mirebalais, devánt déboucher dans la plaine du Cul-de-Sac, par les défilés du Pensez-y-Bien, et le Roi avec sa Maison Militaire, prirent le grand chemin de l'Arcahaye, qui conduit directement au Port au-Prince.

Les deux corps d'armée deva ent faire jonction dans la plaine du Cul-de-Sac.

L'escadre côtoyait la côte, ayant à borð des vivres des munitions de guerre et tout le matériel de l'armée pour la campagne. Malgré que la trahison avait livré une partie de nos bâtimens, notre marine était encore supérieure à celle de l'ennemi.

Pétion était instruit d'avance de tous nos mouvemens par les conspirateurs et les espions qu'il avait dans notre sein; il savait il savait que nous faisions des préparatifs pour l'attaquer; mais sur ces entrefaites, ayant appris que

des

mouvemens avaient éclaté dans le Sud en sa faveur, il se hâta de se rendre au Pont de Miragoane avec quelques troupes, pour aider ses partisans. A son départ, il laissa le commandement au général Boyer, avec ordre de se hâter de mettre en état de défense les forts de Cibert et de la Croix-des-Bouquets', pour arrêter les premiers efforts de nos armées et lui donner du temps.

Depuis la révolution, c'était la première fois que nous voyions figurer le nom du général Boyer; dans nos fastes militaires, il avait été toujours le secrétaire du général Pétion ; il parvint rapidement au grade de général; c'est le même aujourd'hui qui est le Président de la république. Lorsque nous envisageons sa carrière et le haut rang où il se trouve placé, nous serions tentés de croire, avec les anciens, qu'il existe une fatalité injuste, aveugle et bizarre, qui préside à la destinée des humains; si d'ailleurs nous n'étions entièrement convaincus que Dieu gouverne le monde par une providence juste et par des voies impénétrables aux faibles mortels.

A la nouvelle de notre marche, Boyer

s'était placé avec ses troupes sur la ci-devant habitation Santo, dans cette position intermédiaire entre les forts de Cibert et de la Croix-des-Bouquets; il interceptait les deux routes qui conduisent au Port-au-Prince, et couvrait cette ville qui était sur ses derrières, il avait au front de son armée la savanne Houblon, sa droite appuyée sur le fort de la Croix-des-Bouquets et sa gauche sur celui de Cibert.

Le Roi rallentissait à dessein sa marche, pour donner le temps à l'armée qui avait fait un long détour par le Mirebalais de se rendre en même temps que lui dans la plaine du Culde-Sac.

Déjà notre vue s'étendait dans la plaine, nous n'étions plus qu'à deux petites lieues de Cibert, lorsque le bruit du canon et de la mousqueterie nous annoncèrent la bataille de Santo: Nous précitâmes notre marche; bientôt les tirailleurs de notre avant-garde engagèrent Je feu avec l'ennemi qui se hâta de se renfermer dans le fort de Cibert.

Dans la même journée nous communiquâmes avec l'armée, et nous apprîmes le résultat de la bataille de Santo.

Boyer, après une vigoureuse résistance avait été vaincu; il précipita sa retraite sur le Port-au-Prince avec le débris de ses troupes qui avaient été taillées en pièces; les nôtres irritées de la résistance et des pertes qu'elles avaient éprouvées, ne firent, dans la chaleur du combat, qu'un très-petit nombre de prisonniers, qui furent envoyés au Roi, qui les fit acheminer immédiatement pour le Nord, où ils sont encore maintenant.

Après la bataille de Santo l'armée se porta devant le Port-au-Prince.

Le fort de Cibert ne pouvait pas être enlevé de vive force; il fallait l'assiéger dans les règles. Au milieu d'une grêle de balles et de boulets, nous fimes nos approches, et nous établîmes nos batteries, à demi-porté de fusil de la place: déjà les remparts du fort foudrovés. par notre artillerie tombaient en ruines; presque toutes ses pièces étaient démontées; Henry touché de la triste position des assiégés, voyant qu'ils ne pouvaient plus tenir davantage et qu'ils avaient dû éprouver une perte considérable, se rendit en personne dans une des batteries qui était le plus près de la place, dans

l'intention de faire parler aux assiégés et de les exhorter à se rendre.

Le Roi fit cesser le feu; l'on annonça aux assiégés que l'on allait leur parler; ils cessèrent également leur feu, et soudain le plus grand` silence régna de part et d'autre.

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Alors Henry voulant se montrer aux assiégés pour mieux les persuader, monta sur la tranchée environné de ses aides de camp; il portait ses décorations militaires afin qu'il fut reconnu des officiers et soldats de la garnison de Cibert; le Roi donna ses ordres au comte de Limonade qui exprima les intentions de S. M., d'une voix forte et intelligible, dans ces termes: • Généraux, officiers, sous-officiers et sol-

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dats, c'est au nom du Roi, notre bien-aimé souverain, qui est ici présent que je vous parle. Rendez-vous; vous serez maintenus dans vos grades et dans vos emplois ; vous » êtes dans l'erreur, vous avez été trompés ; cessez de continuer une guerre injuste et » barbare; vous êtes réduits à la dernière » extrémité, vous ne pouvez plus vous défendre. » Rendez-vous donc; rien ne vous sera fans nous vous en conjurons pour vous-mêmes 2 et au nom de la patrie

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