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CHAPITRE VI

De la Monarchie et de la République d'Hayti.

TOUS

ous les gouvernemens sont placés entre deux écueils fameux en naufrages, le despotisme et l'anarchie; l'un est aussi dangereux que l'autre à la stabilité des empires et au bonheur des peuples; chez les uns, la liberté comprimée conduit au despotisme; chez les autres, la liberté licencieuse entraîne à l'anarchie. Chaque genre de gouvernement a donc ses inconvéniens et ses dangers; c'est pourquoi les législateurs les plus sages ont cherché les milieux, en évitant de tomber dans les extrêmes.

Les publicistes modernes ont beaucoup écrit sur la nature et le principe des différens gouvernemens; ils ont donné naissance à bien de systèmes théoriques.

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La manie du siècle étant de tout réduire en règles générales et de tout soumettre à des calculs géométriques; la science de gouverner a été considérée comme une machine et la préférence a été donnée au gouvernement représentatif sur tous les autres, parce que les trois pouvoirs y sont distribués et sagement balancés.

Si-le monde moral comme le monde physique pouvait se gouverner invariablement par les lois de la mécanique, tout dans la nature prendrait une marche uniforme et régulière; mais l'immobilité contraire aux lois qui régis sent l'univers, n'est point aussi le partage de l'homme les intérêts et les passions feront toujours rompre l'équilibre et pencher la balance des pouvoirs soit d'un côté ou de l'autre.

Déjà une grande partie de l'Europe éclairée a adopté la forme du gouvernement représen tatif et s'est donné des chartes constitutionnelles, qui consacrent plus ou moins tous les droits sans doute il serait à désirer que tous les peuples de la terre fussent propres à cette sorte de gouvernement.

Mais comme il n'y a point deux peuples dans le monde qui se ressemblent, il n'y a point non plus deux constitutions semblables. Pour que tous les peuples pussent se ranger sous la forme du gouvernement représentatif, il faudrait aussi qu'ils eussent le même degré de lumière et de civilisation, le même climat, le même langage, les mêmes mœurs, les mêmes habitudes et les mêmes besoins.

L'expérience de tous les siècles nous apprend qu'il importe peu quelles soient la forme et la dénomination des gouvernemens pour rendre les peuples heureux; le point essentiel et que nous indique la saine raison, est que les gouvernans doivent être sages, justes, éclairés et bienfaisans, et que les gouvernés doivent avoir de la religion, des vertus et des mœurs.

C'est pour atteindre ce but que doivent se diriger tous les efforts du législateur; et en effet, à quoi servirait la constitution la plus belle en théorie, si l'exécution en était impraticable et ne produisait aucun résultat satisfaisant? Il faut donc commencer avec le législateur d'Athènes par corriger les

vices de sa nation, lui former un caractère national lui donner des mœurs et des

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vertus, et penser avec le célèbre Montesquieu, que la meilleure constitution n'est pas la plus belle en théorie, mais celle qui convient le mieux au peuple pour lequel elle a été faite.

Ce serait aussi une erreur de penser et que détruit l'expérience, de croire que la liberté règne plutôt dans les républiques que dans les monarchies. Le peuple le plus librequi ait jamais existé sur la terre et qui jouisse de la plénitude de ses droits politiques est le peuple anglais, et il est gouverné par un gouvernement monarchique.

L'histoire des républiques anciennes et modernes nous démontre le contraire; elles ont produit des multitudes de tyrans; et jamais a-t-il existé une plus affreuse tyrannie que celle de Robespierre, sous les comités de Salut Public et de Sûreté Générale, qui opprimaient la république française?

C'est d'après l'expérience de tous les siècles que nos législateurs se sont guidés, lorsqu'ils

ant fondé la monarchie haytienne; ils n'ont pas cherché à faire une constitution belle en théorie, dont l'exécution fût impossible; mais une constitution d'une application facile, simple et convenable à nos besoins actuels.

Nous sortions de l'état de république, nous étions rassasiés des vices de ce gouvernement chancelant; nous cherchions un port assuré qui pût nous mettre à couvert des tempêtes révolutionnaires. Ce sont l'expérience et les malheurs qui nous ont conduits de la République à la Monarchie.

Par la Constitution du 28 Mars 1811, le Président Henry Christophe est déclaré Roi d'Hayti, sous le nom de Henry; ce titre, ses prérogatives et immunités, héréditaires dans sa famille, dans les descendans, mâles et légitimes en ligne directe par droit d'aî nesse, à l'exclusion des femmes.

L'Epouse du Roi, déclarée Reine d'Hayti, et l'héritier présomptif de la couronne dénommé Prince Royal.

Les membres de la Famille Royale portent le titre de Princes et de Princesses, et sont qualifiés d'Altesses Royales.

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